De bien belles images pour un film ambitieux et lent. Et une histoire du genre qui fait forcément un film intéressant : l'évangélisation du Japon par les missionnaires portugais. Une entreprise vouée à l'échec, malgré un certain succès initial, qui a abouti à l'isolement du Japon pendant un certain nombre de décennies. Et l'occasion d'une réflexion sur l'opportunité de mondialiser une culture. Les missionnaires jésuites se vivaient comme des saints, s'identifiant à Jésus lui-même, tentant d'imiter sa compréhension des choses et achoppant encore et encore sur la cruauté du monde, là où lui n'a, semble-t-il, jamais dévié de sa course. Or cruel, le Japon l'était. Les dirigeants faisaient même montre d'une créativité mondialement reconnue dans les supplices, privilégiant avec les têtes pensantes les raffinements psychologiques. Autant dire qu'on prend plaisir à observer les démêlés du petit "padre" idéaliste avec sa conscience, quand ses tortionnaires retors le confrontent à ses faiblesses et à ses contradictions. Au final, n'y avait-il pas une extraordinaire arrogance à se réclamer de Jésus ? Scorcese semble penser que si et je lui emboîterais volontiers le pas. Son film, bien que lourdement démonstratif, prend la forme d'une parabole. Approprié. Malgré sa pertinence, je ne peux pas dire que j'aie passé un moment aussi intense que devant Mission, par exemple. La faute à une excessive lenteur, peut-être, qui pourtant donne l'occasion de se repaître de la beauté des plans. Les interprètes sont en tout point exemplaires, en prime. Difficile de dire alors pourquoi l'ensemble n'a pas déchaîné mon enthousiasme. Je ne suis jamais contre les excès de formalisme, ni les sujets historiques pointus, ni une certaine complaisance devant la violence quand elle est justifiée par une conclusion à la hauteur du sujet... Mais bon, c'est un excellent film quand même, qui vaut le déplacement.