Vous laissera sans voix.

Cela fait des mois que je subis une malédiction : à chaque fois que je suis confronté à une œuvre, elle est soit moyenne, soit mauvaise. Alors, quand j'ai entendu dire que A Silent Voice était excellent, j'ai osé le regarder. J'ai traîné pourtant, pour deux raisons. La première est que je n'osais pas affronter les deux heures de film. L'autre est que j'avais peur d'être déçu. J'ai tendance à râler sur beaucoup de choses en ce moment ; qui sait, peut-être étais-je devenu un spectateur trop exigeant et trop obtus pour apprécier les choses simples. J'avais peur que ce qu'on fait de meilleur ne soit pas assez pour satisfaire un goût peut-être trop prout prout. Mon expérience avec Kimi no nawa ne me rassurait pas : alors que ce film était couvert de louanges de toutes parts, je le trouvais correct mais très mal écrit dans sa dernière partie. Alors, oui, j'avais peur que A Silent Voice soit surestimé, ou que je sois devenu trop grognon pour apprécier les bonnes choses.
J'ai adoré. J'ai pleuré. J'ai retenu mon souffle. J'ai senti mon cœur battre dans ma poitrine. J'ai vécu ce film.
J'ai tendance à critiquer les choses avec méthode, alors faisons-le.
L'animation est très bonne, et bien meilleure que dans Kimi no nawa. Les décors sont certes un peu moins jolis, mais demeurent splendides. Mais Kimi no nawa avait un gros défaut : quand ils étaient vus de loin, les personnages étaient peu détaillés (moins que dans Shingeki no Kyojin, par exemple, ce qui est alarmant pour un film au cinéma). L'animation des personnages de A Silent Voice est bien meilleure, notamment en ce qui concerne l'expressivité des personnages. C'est clairement le summum de ce que l'on peut faire en animation 2D. Les incrustations 3D, quant à elles, sont pour l'instant réussies, mais je crains qu'elles vieillissent assez vite. Enfin, le film est plein de plans bien pensés, de mouvements de caméra intelligents, et de symboliques très intéressantes. Vraiment, ça fourmille de bonnes idées, parfois empruntées au manga, certes, mais toujours bien utilisées.
La musique, de surcroît, est grandiose. Je l'ai surtout remarquée dans la première partie du film - mais c'est parce que j'ai été trop occupé par la seconde. Mais c'est une bande-son originale, amusante, touchante et bien composée que nous offre ce long-métrage d'animation.
Les personnages sont très bons. Ils sont complexes, ont tous des nuances, des émotions et des raisons d'agir. On les trouve parfois vraiment injustes, et vraiment horribles. Mais ils sont ainsi, que voulez-vous qu'on y fasse ? Et quand des personnages sont un peu moins bien développés, le film en a pleinement conscience et n'essaie pas de vous les vendre. En général, le film n'essaie pas de vendre ses personnages, il se contente de bien les camper. Et c'est en ça qu'ils sont réussis. On ne fait pas des personnages pour plaire, on fait des personnages crédibles et intéressants. Le duo principal, par contre... est juste magnifique. Vraiment. Ils forment un duo magnifique, mais même à part, ce sont de magnifiques personnages. Je revois leurs interactions, les plus douces comme les plus violentes, et j'en ai les larmes aux yeux. Ces personnages doivent porter le long-métrage (qui fait tout de même deux heures) sur leurs épaules et y arrivent haut la main. Je crois sincèrement que le mot le mieux approprié pour décrire ces deux personnages est "magnifique". Ils sont vraiment grandioses, sublimes, touchants, émouvants, drôles, révoltants - en bref, magnifiques.
L'histoire est très classique, et très sobre. Mais elle a le génie d'instaurer une ambiance, de mettre çà et là des petites pointes d'émotion qui vous feront exploser à la fin. Le scénario est bien fait, et est très contemplatif. C'est pourquoi certains, sûrement peu habitués au genre du slice of life, trouvent le film un tantinet long. Mais je ne l'ai pas trouvé trop long, et, justement, j'ai tout au long du film eu peur qu'il se finisse, et qu'il me déçoive à la fin. Mais ça n'a heureusement pas été le cas.
En outre, ce film traite de sujets sérieux et importants tout en finesse. Le premier qui vient à l'esprit est évidemment le fait d'être malentendant, et plus généralement, la manière de gérer son handicap dans sa vie quotidienne, que ce soit chez soi, ou à l'école, par exemple. Mais ce très beau film brasse plus de thèmes, et le majeur n'est pas celui du handicap : c'est celui de la rédemption. Ce film traite principalement de la capacité à dire pardon, à se faire pardonner, à reconnaître ses erreurs, et à pardonner. Il en profite pour traiter les thèmes de l'amour (ou plutôt de la haine) de soi, du suicide et de l'anxiété sociale. Dire que ce film parle principalement de surdité est équivalent à dire que Shigatsu wa kimi no uso parle principalement de musique. C'est vrai, mais la thématique sur laquelle on veut principalement réfléchir est, pour ce film la rédemption, pour Your Lie in April la reconstruction d'un soi et d'un avenir. Néanmoins, ce film ne néglige pas le sujet du handicap, vraiment pas : il ne s'agirait pas d'offenser qui que ce soit.
Enfin, cette histoire est touchante ! Je ne détaillerai pas davantage (je vous laisse le plaisir de découvrir le film), mais ce film rejoint le cercle très fermé des œuvres qui m'ont fait pleurer pour autre chose que leur médiocrité (il y avait seulement Beauty and the Beast 2017 et Shigatsu wa kimi no uso auparavant).

En conclusion, un chef-d’œuvre comme on en fait rarement. Une pépite du septième art, un grand long-métrage qui vous émouvra et vous fera réfléchir. Un véritable bijou qu'il vous faut avoir vu. Une véritable œuvre poétique, profonde et belle. En bref, un film d'une grande sensibilité qui saura trouver un écho dans votre âme.