Entre génies, plagiats et invraisemblances



  • J'ai passé en revue les résultats de Bond au test. Apparemment vous êtes reçu. Ça n'a tenu qu'à un fil. Vous reprenez le service actif.

  • Félicitations.

  • Merci. Je vais attendre dehors.

  • J'aurai une petite question. Pourquoi ne pas rester mort ? C'est une voie de sortie royale. Allez vivre tranquillement quelque part. Peu d'agents de terrain ont le luxe de décrocher en douceur.

  • Vous partez souvent en mission ?

  • Inutile d'être agent de terrain pour voir ce qui crève les yeux. Il s'agit d'un sport de jeunes. Vous avez été gravement blesssé. Il n'y a aucune honte à avouer que vous avez perdu la main. La seule honte serait de l'avouer quand il sera trop tard.

  • Gardez-moi, virez-moi, ça dépend de vous seul.

  • S'il déclare qu'il est prêt, c'est qu'il est prêt.

  • Peut-être que vous ne voyez rien, où ne voulait rien voir.

  • Que sous-entendez-vous par là ?

  • Vous faites du sentiment avec lui.

  • Tant que ce service se trouve sous mes ordres, c'est moi qui décide qui part en mission.

  • À votre guise. Bonne chance double zéro sept, ne faites pas tout foirer.




Génies



Skyfall réalisé par Sam Mendes en tant que troisième chapitre de la saga James Bond made in "Daniel Craig" offre une expérience à part entière qui vient éclaircir le mystérieux passé de l'agent 007 à travers un récit bourré d'action et de fond sur une intrigue malheureusement inaboutie à cause de quelques défauts grossiers qui aurait pu être largement évité. Skyfall est certainement l'opus de la saga le mieux réalisé, possédant un esthétisme vraiment réussit avec une mise en scène particulièrement soignée qui vise toujours juste en nous emmenant dans des endroits très intéressants, composé de décors incroyablement mémorables, où la violence graphique prend un autre essor sauvage sans jamais être outrancièrement spectaculaire. Toute la partie à Shanghai est visuellement incroyable avec des lieux d'une beauté renversante génialement présentée à travers un jeu d'ombres et de lumières via des éclairages LED et néon qui subjugue tout du long avec des plans dingue magnifiquement orchestré qui amène une atmosphère saisissante. La bande-son de Thomas Newman fonctionne à merveille avec quelques nouvelles musiques qui ajoute de la teneur et de l'ambiance au récit. La chanson d'introduction chantée par Adele est excellente avec une scène d'intro superbement réalisé.


Les scènes d'action sont saisissantes et incroyablement bien tournées. Sam Mendes parvient à maintenir une tension qui ne retombe que rarement pour laisser place, et sans effets superflus, à des chorégraphies de qualité. Skyfall répond enfin à mes agacements en étant le premier Bond sous l'ère de Craig à offrir une confrontation finale digne de ce nom. Une conclusion sur les chapeaux de roues qui conclut parfaitement le récit avec un instant particulièrement dramatique qui n'est pas sans rappeler Casino Royale. La première heure du film est intéressante mais un peu décousue offrant quelques plans particulièrement intense et stylé comme le duel au corps-à-corps dans la pénombre en haut de la tour située à Shanghai, ou encore lors de l'affrontement dans le casino. Skyfall prend toute son ampleur lorsqu'arrive enfin l'antagoniste principal qui déchire tout sur son passage mais qui est introduit trop tardivement. Son arrivée donnera lieu aux meilleures séquences du film autant sur le plan action que dramatique, le tout alimenté par des dialogues remarquables. La grosse partie située à Londres mettant en place une séquence d'évasion qui se transforme en attentat donne lieu à une tension atmosphérique totalement dingue, qui sera à plusieurs reprises reproposée comme lors du final dans la chapelle abandonnée, ou encore lors du fameux duel au tir.


Daniel Craig revient en tant que James Bond charismatique mais usé et fatigué. Il apparaît encore plus vulnérable qu'auparavant ce qui l'humanise davantage. Pour cette mission, James ne doit pas sauver le monde, mais simplement protéger M. Simple mais efficace permettant de toujours plus exploiter la relation ambiguë qui le lie à celle-ci. Judi Dench en tant que M, offre sa meilleure performance, du grand art. Solide, inflexible et déterminée elle démontre sans mal quelle mérite d'être à la tête du MI6, même si les vieux démons du passé sont revenus se venger. L'intrigue tourne autour d'elle ce qui permet de mettre en avant des séquences intéressantes. Ralph Fiennes sous les traits de Gareth Mallory est également de la partie dans un rôle nuancé que l'on devine finir par devenir plus important. Arrive enfin "Q", incarné par Ben Whishaw, j'aime bien cette proposition qui fonctionne habilement en tant que génie informatique, mais beaucoup moins sur le plan concepteur d'armes et de gadgets. En tant que James Bond Girl on retrouve la comédienne Naomie Harris qui n'est autre que Monneypenny. Son introduction dans l'univers bondien est intelligente, elle apporte une figure féminine intrigante qui certes ne casse pas l'écran mais s'avère toujours plus convaincante et intéressante que toutes les autres Monneypenny que l'on a pu voir à ce jour. Bérénice Marlohe en tant que Séverine incarne une Bond Girl plus dramatique se sachant condamné par avance. La comédienne est magnifique, elle amène beaucoup de classe à son personnage qui connaîtra un sort tragique au cours d'une admirable séquence.


L'antagoniste principal incarné par Javier Bardem est monumental ! En tant que "Silva" ancien agent 00 du MI6, Javier Bardem présente une figure du mal incroyablement complexe et sinistre. Une réécriture de l'agent 006 de Goldeneye version plus sombre, instable et fou. La relation qui l'unit à M est terriblement complexe et dramatiquement solide. Silva est un homme profondément traumatisé dans son esprit et dans sa chair, on se prendrait de pitié pour lui. La cicatrice à sa bouche une fois la prothèse retirée est surprenante, par contre les CGI représentant la cicatrice sont atroces. L'introduction de Javier Bardem sur son île dévastée est remarquable. Sans conteste l'une des meilleures introductions pour un antagoniste que j'ai pu voir. Il se découvre pour la première fois lors d'un plan fixe effarant qui commence au moment où il sort d'un ascenseur en fond d'image ce qui ne permet pas de voir clairement son visage. Finalement, il s'avance calmement vers Bond qui est ligoté à une chaise, permettant ainsi de lever petit à petit le voile sur son visage, le tout appuyé par un discours autant abracadabrant qu'ébouriffant autour des rats. Un antagoniste qui capte sans mal l'attention. Avec un tel personnage je ne comprends pas le choix de Sam Mendes pour l'avoir introduit si tardivement.



Si nous ne sommes plus aujourd’hui cette force qui jadis remua Ciel et Terre, ce que nous sommes nous le sommes. Des cœurs héroïques d’une même trempe, affaiblis par le temps qui passe et la fatalité, mais forts par la volonté de lutter, d’explorer, de découvrir et de ne rien concéder.




Plagiats et invraisemblances



J'ai un petit problème avec la scène d'ouverture qui commence par une course-poursuite en voiture nonchalante fonctionnante sur un faux rythme ennuyant qui finalement se transforme en traque plus rythmée sur les toits du Grand bazar d'Istanbul en Turquie et qui... minute... minute papillon. Ouverture sur une poursuite à voiture entre Bond et un assassin venant de tuer des agents du MI6 qui se poursuit sur des toits dans un pays étranger, voit le méga repompage sur Quantum of Solace, qui en scène d'ouverture présente la même chose. Heureusement que la séquence se termine par l'affrontement sur le train en marche cela permet d'éviter le plagiat. Sauf que voilà, ce n'est pas la seule fois que Skyfall fera des "emprunts" à Quantum of Solace, puisque James durant Skyfall part dans un autre pays pour trouver un assassin grace au renseignement du MI6 qu'il va rapidement trouver sur place pour le questionner. Malheureusement Bond va le tuer après un combat au corps-à-corps. Flute, mais pas grave grace à un objet que trouvera Bond appartenant au cadavre de l'assassin qui le conduira vers une autre piste qu'il suivra en se faisant passer pour celui qu'il a tué, jusqu'à ce qu'il soit rapidement démasqué par une femme qui est l'amante de l'antagoniste principal, amante dont veux se débarrasser l'antagoniste principal. Cela ne vous rappelle rien ?

C'est exactement ce qui se passe durant la première partie de Quantum of Solace, fallait oser le faire. Sur la première heure de Skyfall on est vraiment dans du plagiat sur certaines séquences importantes. J'ai toujours trouvé cela fou que personne ne remonte cette information.


La première rencontre invraisemblable entre "Q" et Bond. Si je trouve l'échange de dialogues entre les deux hommes amusants, je dois dire que la rencontre dans un musée n'a aucun sens sachant que le MI6 possède une nouvelle planque après l'attentat et qu'en toute logique c'est là-bas que les armes devraient être remises. Sauf que durant cette scène, "Q" remet à Bond une arme dans une mallette qu'il ouvre en grand dans un musée qui forcément est bourré de caméra et de civils. C'est idiot et n'a une fois encore aucune espèce de logique. Vous vous rendez compte si on remettait au GIGN leurs armes dans un lieu public entouré de mondes, bien c'est pareil. Bon je sais ce que vous allez me dire, ce n'est qu'une petite invraissemblance pas bien grave, "chose avec laquelle je suis totalement d'accord", sauf qu'une invraisemblance, plus une autre invraisemblance, plus une autre, une autre et encore une autre, et là cela devient problématique.


On peut voir encore cela avec le choix illogique de Bond de partir seul affronter à Skyfall l'antagoniste Javir Bardem, jusque-là aucun problème, mais sans arsenal !? Bond file dans une réserve secrète et la seule chose qu'il décide de prendre avec lui c'est sa voiture mythique l'Aston Martin DB5, tant pis pour les armes à feu. Sérieusement ! Bond se retrouve avec rien pour affronter tous les antagonistes et protéger par la même la directrice du MI6. Genre, Bond n'avait pas prévu d'artilleries avant de partir avec "M" sachant qu'il était juste avant entrain de parler à Q qui aurait pu l'aider en tant que concepteur d'armes. Le MI6 n'aurait aucune planque d'armes! Pour rappel, James précise à "M" qu'avec cette nouvelle voiture ils ne pourront pas être repérés, bien alors du coup file te chercher des armes abruties! C'est totalement irrationnel! Le plus drôle dans tout cela, c'est qu'une fois à Skyfall Bond fera la tronche devant le garde chasse lorsqu'il lui dira qu'il n'a qu'un vieux couteau et le fusil de chasse de son père en matière d'armes. Et sinon des renforts pour aider le duo ce n'est pas possible ? Je ne sais pas mais il s'agit de la directrice des services secrets cela n'inquiète personne qu'elle soit seule avec Bond. "M" n'a pas d'autres agents "00" qui pourrait venir l'aider avec Bond à Skyfall ? Ce n'est pas comme s'ils n'avaient pas eu le temps de réagir à cela vu qu'il se passe plus d'une journée d'attente et qu'en plus "Q" sait où ils se trouvent tous. Si encore on justifiait cela intelligemment dans le film pour rendre tout cela crédible, le problème c'est qu'ici c'est seulement due au choix personnel de Bond.
Donc résumons : pas d'armes, pas de renforts et le tout sans aucune justification, tu m'étonnes que le MI6 part en vrille.


Craig a pris un coup de vieux avec une calvitie qui s'étend toujours plus, je ne critique pas son âge car on vieillit tous, seulement, lorsque cela vient nuire à une cohérence c'est problématique. Dans Skyfall on fait comprendre que Craig à eu un paquet de mission et qu'il est aujourd'hui usé et fatigué, pourtant Casino Royale et Quantum of Solace sont présentés comme un seul et unique film en deux parties, une seule mission qui se passe l'une après l'autre dans une continuation de seulement quelques heures. À la fin de Quantum of Solace, Bond est encore un jeune agent qui a réussi à aller au bout de sa seconde mission divisée en deux étapes (la première mission se passe dans Casino Royale durant la scène d'ouverture en noir et blanc). Vient la question qui fâche : c'est quoi les autres missions qui ont fait de Bond un agent aguerri devenu une légende qui l'a rendu particulièrement usé et fatigué ? On dirait qu'il manque deux/trois films entre Quantum of Solace et Skyfall pour rendre cela crédible.


CONCLUSION :


Skyfall de Sam Mendes est un bon crue provenant de l'écurie Bond qui avait tout pour être grandiose, malheureusement plusieurs problèmes que l'on peut qualifier de terriblement grossier viennent freiner la réussite de celui-ci. Fort heureusement, les nombreuses qualités ne suffisent pas à gâcher l'expérience (seulement à la freiner) car Skyfall peut compter sur une réalisation impressionnante, des scènes d'action percutantes, des personnages mémorables alimentés d'un casting et d'une direction d'acteur efficace, d'une composition musicale au top, d'un final grandiose, et surtout d'un Javier Bardem inoubliable en antagoniste principal. Javier Bardem, la révélation de Skyfall.


Il n'est rien qui ait un goût plus amer qu'un potentiel jamais exploité à 100% surtout lorsque celui-ci est perceptible.



Ma grand-mère aussi avait une île. Rien de bien extraordinaire, on en faisait le tour à pieds en une heure… Mais pour nous, c’était le paradis. Un été, on est allé la voir et on a découvert que les lieux étaient infestés de rats. Ils étaient venus sur un bateau de pêche et s’étaient gavés de noix de coco. Alors comment on chasse les rats d’une île ? C’est ma grand-mère qui m’a montré. On a enterré un baril de pétrole et mis un bâton sur le couvercle avec de la noix de coco comme appât. Alors les rats sont venus chercher la noix de coco, et ils sont tous tombés dans le baril. Et au bout d’un mois on a attrapé tous les rats. Mais pour en faire quoi ? On jette le baril dans l’océan ? On le brûle ? Non. On le laisse comme ça. Les rats se mettent à crever de faim, et au bout d’un moment… il s’entre-dévorent. Jusqu’à ce qu’il n’en reste plus que deux… Les deux survivants. Et après est-ce qu’on les tue ? Non ! On les récupère, pour les remettre dans les cocotiers. Mais là ce ne sont plus des noix de coco qu’ils mangent, ce qu’ils veulent maintenant c’est du rat. On a modifié leur nature. Deux survivants… c’est ça qu’elle a fait de nous.


B_Jérémy
7
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le 30 avr. 2021

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