Snake Eyes est un film qui peut se voir découper en deux parties distinctes, autant du point de vue de la qualité sur tous les plans que du rythme et de l'histoire. Tant et si bien qu'on ne sait pas trop quoi en dire à la fin puisque d'un côté on peut être impressionné par la maîtrise du réalisateur et de l'autre du côté bâclé de certains aspects du film. Chronologiquement, on peut analyser le film comme suit :

Première partie. Assez grandiose, maîtrisée et tout bonnement très efficace dans le genre thriller/huis clos. Le film s'ouvre avec cette séquence devenue culte d'un faux plan séquence d'une dizaine de minutes et qui est jouissif de par sa mise en scène et son efficacité pour faire entrer le spectateur dans cette histoire de flics ripoux. Un stade, deux boxeurs, un flic ripou et son ami de toujours militaire et très propre sur lui doivent faire face à un attentat contre la vie du Vice Président. On apprendra d'ailleurs par la suite que ce dernier succombe des suites du tir d'un extrémiste caché dans le stade. On sait qu'il va se passer quelque chose, la tension monte, encore et encore jusqu'à atteindre une telle intensité que le coup de feu lançant l'intrigue principale du film arrive comme une sorte de soulagement. Et pour le spectateur averti, Brian de Palma dissémine un lot d'indices permettant d'élucider le mystère. S'ensuit un film policier tout à fait classique à la recherche du coupable véritable.
Conspiration, action et lutte contre l'ennemi sont donc de mise dans une Amérique assez patriotique pendant l'heure et demi du film, sans grande surprise donc.

Deuxième partie. Les pions sont mis en place et il est difficile de ne pas prédire ce qui va se passer, quel rôle va jouer la tempête ? Quel est le but du méchant de l'histoire. Finalement, on est en face d'une histoire très classique, trop même. On n'est surpris en rien et si la mise en scène de la première partie laissait présager un résultat à la hauteur, on en est loin. Dommage. Puisque le film se veut assez en accord avec son époque sauf qu'on n'y croit pas ou plus. Nicolas Cage en rajoute des tonnes, mais on a l'habitude et Gary Sinise se rapproche de la monoface exigée pour sa série des Experts. Rien à gagner des deux interprètes principaux et encore moins du méchant fabricant d'armes qui est forcément méchant puisqu'il vend des engins de destruction et dont on peut facilement croire qu'il est resté bloqué dans les années 80 et dans le genre buddy movie. La trahison de l'ami ne vaut pas mieux tant, dès le départ, on voit bien qu'il y a quelque chose de louche. Mais où est donc passé le talent de M. De Palma ? Pourquoi s'enfermer dans un script trop hollywoodien ?

Finalement, on ressort du film avec l'impression que le réalisateur a voulu oublier le système qui l'a produit (pour ce film tout du moins) en s'appropriant le film mais qu'il abandonne tout espoir et nous pond une fin des plus prévisibles et sans grand suspense donc. Trop de patriotisme envers l'armée américaine, le gouvernement corrompu par des lobbys trop présents dans la politique du pays, dénonciation ratée, thriller sans rebondissement. Mais voilà, on ne peut pas ne pas mettre la moyenne tant le début restait prometteur, surtout au vu des moyens de l'époque même si la VHS se fait sentir et la technologie alors à la pointe parait désuète de nos jours. Là où il pourrait y avoir un charme, on s'aperçoit que Snake Eyes marque la fin d'une époque, celle des héros américains des années 80 qui pouvaient changer le monde. Bel exercice de style.
Carlit0
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le 6 févr. 2012

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