Une introspection artistique, psychologique et historique pénible et surchargée, sauvée par ses actr

Ce long-métrage est un grand rendez-vous manqué à plus d’un titre. On a l’impression d’être devant une compilation ratée et mal digérée des films de Maïwenn dans « Sœurs ». Actrice qui se retrouve d’ailleurs en tête d’affiche de ce « Sœurs » terriblement décevant au vu de la brochette féminine devant et derrière la caméra. L’essayiste et documentariste Yamina Benguigui, qui avait tourné il y a vingt ans « Inch’allah dimanche » se prend les pieds dans le tapis avec cette introspection faite film qui navigue entre mise en abyme artistique, introspection psychologique, devoir de mémoire et tragédie familiale sans jamais trouver le bon ton, ni les bonnes mesures. Tout est lourd, surchargé et mal assemblé à tel point que l’on se croirait devant le brouillon de ce qu’aurait dû être le résultat final.


Benguigui veut parler de beaucoup de choses, plutôt lourdes en émotion et en possibilités de développement, mais se prend les pieds dans le tapis et ne raconte in fine pas grand-chose d’intéressant. Trop de thèmes, trop d’enjeux, trop de digressions, trop d’improvisation, trop de couches narratives… A tel point qu’on se demande ce que la cinéaste a voulu nous raconter dans « Sœurs ». Ce qui semble être peut-être un moyen de catharsis pour elle (et ses actrices?) devient pénible, confus et fastidieux pour le spectateur. Devoir de mémoire sur la colonisation algérienne et les maquisards, études de caractère sur les relations entre sœurs issues de l’immigration ou encore libération psychologique par l’art, ce mélange ne prend pas un seul instant. Les trois actrices ont beau, avec pas mal d’improvisation ressentie, donner du leur, cela ne fonctionne jamais.


Pourtant il y a de belles scènes grâce à leur prestation (celle de l’ascenseur à l’hôpital ou encore celle avec leur mère) mais toute la partie de la pièce de théâtre et celles des flashbacks sur le passé sont ratées et forcées. A plusieurs reprises, on se demande où Benguigui veut en venir et on perd le fil ainsi que la patience et on se désintéresse. Même la scène clin d’œil ou Maiwenn critique le processus de mise en scène théâtrale de sa sœur ainée (une catharsis que l’actrice réalisatrice use dans la majorité de sa filmographie) semble trop fabriqué et ne sonne pas juste. D’autant plus que même si elle le fait bien, on en a un peu marre de voir cette actrice pleurer sur les mêmes sujets. Alors on se rattache au jeu des actrices lorsqu’elles sont réunies et on se désole de cette réunion au sommet manquée et maladroite qui aboutit à un film insignifiant, pesant et pénible. Heureusement la dernière partie en Algérie où elles sont ensemble est (un peu) plus pertinente et intéressante que la première heure imbuvable.


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JorikVesperhaven
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le 6 nov. 2020

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Rémy Fiers

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