En pleine découverte de l'Oeuvre d'un des plus grands cinéastes de tous les temps, je m'attaque donc à Solaris, le film qui, de premier abord, m'attirait le plus. Ne sachant pas trop à quoi m'attendre, je n'avais pas vraiment d'apriori, seulement qu'il s'agit discrètement d'un des plus grands films de science-fiction qu'il soit dans notre monde ; comme étant la réponse soviétique de "l'inégalable" 2001, l’Odyssée de l'espace de Kubrick. "Discrètement" lui va bien car il est vrai qu'Andreï Tarkovski fait sans conteste partie de ces grands au talent unique et aux ambitions débordantes, marquant ainsi de leur patte éternelle l'évolution du cinéma depuis ses débuts, mais cela sans une seule fois entrer dans les exigences du show-business. Andreï Tarkovski a donc su rester un artiste à part entière tout au long de sa carrière.

Enclenchant l'introuvable DVD (tout de même emprunté à la bibliothèque du coin), je commence enfin le film et mets en éveil tous mes sens dans les meilleures conditions possibles. Ce que j'en retiens principalement et en quelques mots sont ces longueurs, preuves d'une technicité véritable et propre au réalisateur. Non pas qu'elles sont lassantes, bien au contraire, ces longueurs nous permettent de nous laisser doucement mais surement absorber par cette ambiance ô combien indescriptible. Une ambiance unique, que l'on ne retrouve nulle part ailleurs et qui produit son effet. Car pendant tout ce temps, nous nous demandons où nous sommes et qu'est-ce qui nous a pris de nous lancer sur quelque chose de tel.

Bien sur, le mot "longueur" est dénué du moindre sens tel que je l'ai décrit. Mais il suffit de le voir. Chaque prise doit durer en moyenne quatre à cinq minutes. Certaines doivent même dépasser les dix minutes. Tout ce temps devant un décor empli de sobriété mais à la fois d'une richesse débordante. La séquence des tunnels sur les voies de Tokyo, la contemplation d'une Solaris hypnotique, les souvenirs et regrets du héros, manipulé par cet astre... Un tout qui nous laisse de glace et nous perd entre le rationnel et l'irrationnel, le rêve et la réalité. On se retrouve bien là devant quelque chose d'intemporel auquel il en ressort en plus une sorte de mysticisme, mettant en éveil nos sens de manière totalement inédite. Une fascination naît dès les premiers instants et nous questionne sur nos propres tourments existentiels, développe notre imagination et alimente nos rêves et nos fantasmes. Tel est, je le pense, le but de son Oeuvre, et de ce film.

Solaris d'Andreï Tarkovski est, en soi, un film impossible à noter. Il laisse le spectateur parfois perplexe à la fin de sa visualisation mais incite à la réflexion et permet une ouverture d'esprit et d'imagination telle qu'il n'est en aucun cas dédaignable. Sa complexité philosophique et sa perfection esthétique le qualifie d'emblée comme une oeuvre unique, munie d'une identité inimitable et irréductible, mais difficilement accessible. Tarkovski lui-même considère son film comme étant le moins réussi de sa carrière, tant ses enjeux sont complexes. Il m'a fallu environ six mois pour que je m'en fasse une idée précise. Et je surnage encore, à la frontière du réel...
langpier

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