C'est définitif, Star Wars n'existe plus pour moi. Du moins, je ne considère pas les films de la nouvelle trilogie comme faisant partie de la grande mythologie qui m'a fasciné durant mon enfance et mon adolescence.
Alors attention, je ne fais pas non plus partie des dangereux illuminés qui harcèlent une actrice sur internet à cause de son rôle dans l'Episode VIII (bêtise humaine, quand tu nous tiens...) ou des fans puérils qui plaident pour un remake de ce même film. Non.
Mais, sans parler de leurs qualités cinématographiques intrinsèques, les nouveaux films n'incarnent plus, pour moi, ce qui faisait l'identité de Star Wars: la générosité et la prise de risques.
Car aussi bancale qu'elle soit, la prélogie avait le mérite de créer un vaste paysage politique, introduire de nouvelles planètes fascinantes (Kamino, Mustafar...), et surtout de donner une véritable signification à la victoire des rebelles sur l'Empire à la fin du "Retour du Jedi", à la vue des tragédies qui se déroulent sous nos yeux dans "La Revanche des Sith".
La prélogie apportait une vraie pierre à l'édifice Star Wars, à sa mythologie, au même titre que l'Univers Étendu (désormais estampillé "Legends").
Alors, certains diront que le Star Wars sauce Disney est également généreux. Fans de la première heure brossés dans le sens du poil, tragédies, combats spatiaux, duels de sabres... Sauf que, pour moi, il s'agit avant tout de cynisme.
Exit la contextualisation, le pourquoi du comment de la situation, de pourquoi l'Empire (pardon, le "Premier Ordre") domine encore la galaxie. Après le visionnage de l'Episode VII, les choses étaient évidentes: Ces nouveaux Star Wars ressemblaient à du Star Wars, en maniaient les codes (sabre laser, batailles spatiales, planètes désertiques...), mais n'en avaient pas l'âme. Pire, ils n'apportaient absolument rien à l'univers.
J'ai pu entendre un peu partout que l'Episode VIII insufflait du renouveau à la saga, brisait les codes... Ouais, enfin, si l'idée était de faire rentrer dans le crâne des gamins qu'eux aussi ils pouvaient devenir des jedi, y avait pas besoin de faire un film de 2h20, le service marketing pouvait se charger d'écouler son sabre de sabre laser en plastique qui font "vrooouuum".
"Faisons table rase du passée", c'est un pseudo-message tellement hypocrite quand on voit à quelle point la nouvelle trilogie a été teasée à grand coups de nostalgie, et que les soit-disant "surprises" (un Seigneur Noir des Sith qui se fait découper comme un naze, un maître jedi iconique qui s'est retiré du monde, et une petite Rey dont les parents ne sont pas des têtes d'affiche) sont mal amenées...ou complètement inutiles. Parce que perso, j'en avais rien à carrer des origines de Rey, je m'intéressais à Snoke seulement pour comprendre le contexte de son ascension, et Luke en ermite, oui...ça aurait pu être super bien fait mais on se contente d'un Mark Hamill poseur et cabotin qui semble s'être trompé de plateau.
Ajoutez à cela un humour lourdeau qui plombe la tension, et on avait, pour moi, le pire Star Wars. Pas parce que je suis "un fanboy qui n'accepte pas le changement", non. Juste parce que c'est naze et niais... et naze.
Pourquoi ce pavé introductif qui n'a pas grand chose à voir avec le film dont il est question dans cette chronique? Tout simplement pour dire qu'avec l'Episode VIII, j'ai fait le deuil de "mon Star Wars", de la saga que j'aimais, de sa saveur si particulière. Je me suis résolu à aborder chaque nouveau film (un par an, maintenant) comme un simple divertissement à la Marvel, puisque c'est la recette que veut appliquer Disney.
Et en tant que tel, "Solo" n'est pas déplaisant.


Je m'interroge quand même toujours sur l'utilité du projet (surtout à la vue du bide qu'il a fait au box-office). Han Solo est un second couteau charismatique, drôle et mystérieux. Pourquoi vouloir lui ôter ce mystère alors que c'est grâce à lui que le personnage fonctionne si bien dans les vieux films ?
Peut-être qu'à travers son histoire, les auteurs du film voulaient enrichir l'univers Star Wars, mais même pas. Tous les événements (ou presque) qui nous sont présentés ont déjà été mentionnés dans les films (Han gagne le Faucon en jouant aux cartes avec Lando, il fait le run de Kessel). Et ceux qui ne sont pas mentionnés sont prévisibles si on s'intéresse un peu à l'Univers Étendu (rencontre avec un Chewbacca esclave, enrôlement dans l'armée impériale).
Donc, on choisit de démystifier un des personnages les plus iconiques de la saga sans que cela apporte un véritable cachet à l'univers de Star Wars. Pourquoi pas? Mais vous étonnez pas de bider...
Et pourtant, malgré ça, j'ai passé un plutôt bon moment. En fait, le film est centré sur Solo mais ça aurait pu être n'importe quel personnage issu de n'importe quel univers autre que celui de Star Wars tant les péripéties sont classiques. C'est peut-être pour ça que la pilule passe pas trop mal, parce que Disney a rangé au placard des ambitions de "grand renouveau" et se contente de nous servir un p'tit western de l'espace pas désagréable, même si assez oubliable.


Ron Howard surprend à la réalisation, pour le meilleur comme pour le pire. La scène d'attaque du train sur la planète enneigée (dont j'ai déjà oublié le nom) est un exemple de bonne gestion de l'espace et du déroulement de l'action, fluide, immersive, intense. A l'inverse, les affrontements sur Kessel sont ultra-cut et souvent illisibles...
Mais on sent qu'Howard a voulu sortir de son image de simple "faiseur", tentant de rendre iconique certaines scènes de manière bien lourde, comme la rencontre entre Han et Lando à la table de jeu, avec des lumières artificielles tamisées, une ambiance presque mystique. Le résultat est naïf mais plutôt plaisant.
Niveau scénario, ça pêche quand même par manque d'originalité. Pour la faire courte: Un jeune Han, pris pour cible par un baron de la pègre, se voit obligé de quitter Corellia, sa planète natale, sans Qira, sa petite amie. Il s'engage dans la marine impériale et jure de revenir la chercher. Trois ans plus tard, il fait la rencontre d'une bande de pirates de l'espace, prend le large avec eux accompagné de son nouveau compagnon, Chewbacca (fort mal introduit dans le film, mais passons...), et se met en tête de rassembler assez d'argent pour retourner sur sa planète sauver sa dulcinée. Bien entendu, tout ne se passe pas comme prévu, et les embrouilles propres au milieu de la pègre vont le mettre dans le pétrin, l'amenant même à côtoyer la rébellion naissante.
Le film est bien rythmé, on ne peut pas lui enlever ça. Le schéma est simple: on va d'une planète à une autre pour remplir une mission, mais ça foire entre-temps, ce qui amène à des conséquences fâcheuses.
Alden Ehrenreich fait un Solo ma foi convainquant. Il a intégré les principales mimiques et la diction d'Harrison Ford, et le résultait est satisfaisant. Childish Gambino incarne Lando avec un certain brio, même si l'utilité du personnage est assez discutable, à part en tant que PNJ chargé de fourguer le Faucon Millenium à Han.
Et c'est aussi ça le problème de ce film: le Han Solo que l'on connaît semble s'être entièrement construit sur une période de 3 ans. Passage par l'armée, rencontre avec Chewie, début de sa carrière de contrebandier, acquisition de son blaster, puis de son vaisseau...et même de son nom (dans une scène tellement ridicule que je ne la mentionnerai pas ici).
Alors certes, ça donne un film bien rempli et pas chiant, mais terriblement superficiel dans le traitement de son intrigue et de ses personnages.
En parlant de personnages, Emilia Clarke (ici Qira) joue toujours aussi mal, mais son personnage a le mérite d'être plus intéressant que le "love interest" de base des films du genre, de par ses choix de (sur)vie qui l'éloignent de son ancien amour. De manière générale, le film fait la part belle aux personnages féminins forts, notamment à travers la jeune leader de la rébellion.
Le problème, c'est que ce discours d'empowerment est un peu forcé et aboutit à des aberrations telles qu'un droïde féminin (jusqu'ici tout est normal, il y en a d'autres dans l'univers Star Wars), qui entretient une relation amoureuse et physique avec un humain (là, on part sur du chelou, mais passe encore) et qui appelle à la révolte des droïdes contre leurs maîtres, mais de manière tellement...forcée et déplacée que le personnage n'a aucune crédibilité, comme s'il n'était pas vraiment issu de Star Wars. Elle donne l'image d'un comic-relief dont le but serait de constamment faire allusion aux problèmes d'égalité de notre époque...de notre époque, de nos sociétés, pas de l'univers de Star Wars! On sent que le perso était pensé comme une vraie caution progressiste pour le film, mais c'est tellement raté...gardez ce genre de persos pour les films Marvel.
Dans le rôle classique du mentor, Woody Harrelson convainc, comme d'habitude, sans briller particulièrement. Les autres personnages sont assez oubliables (surtout le méchant joué par Paul Bettany...qui est très méchant).


Malgré son déroulement très classique, "Solo" s'achève sur une note assez amère, une réflexion (bon, on est pas sur de la haute volée, hein) sur les chemins divergents que des proches sont contraints d'emprunter pour survivre dans un univers hostile. Le film séduit en grande partie par cette absence de manichéisme.
Et en parlant de la fin, ce n'est désormais plus un secret pour personne, Darth Maul fait un caméo holographique et se révèle être à la tête du cartel pour lequel travaille Qira.
Disney n'a pas pu résister à la tentation de fanfaronner en mode "regardez les fans, on a ressuscité Maul dans "The Clone Wars" (l'Univers Étendu "Legends" y avait déjà pensé, mais passons), donc voilà un peu de fan service !" En gros, c'est l'acte de création du "Star Wars Disney Cinematic Universe". Wééééé...
Et dans le même esprit, on peut entendre le personnage de Woody Harrelson balancer au détour d'un dialogue qu'il a "tué Aurra Sing". Alors, de un, c'est du name-dropping totalement inutile. De deux, ça illustre pour moi le cynisme de Disney: effacer l'Univers Etendu du canon mais reprendre ses personnages et se donner le droit de les tuer comme ça, entre la poire et le fromage, sans se soucier de ce qu'ils représentent.
Parce que oui (mode fan hardcore activé): Aurra Sing est une ancienne padawan jedi formée par un maître aux méthodes atypiques, surnommée "La femme sombre". Enlevée par une secte de dangereux assassins, les anzatis, elle se formera à leurs techniques de combat avant de se lancer dans une quête vengeresse d'assassinat de jedi qu'elle juge responsables de son sort. Ses histoires sont narrées dans de nombreux comics dont un où elle affronte Aayla Secura en duel.
Donc, ouais, balancer ce nom comme ça, sans contexte ni explication, c'est inutile. A part énerver les gens comme moi, je vois vraiment pas le but.


Pour conclure, "Solo" est un Star Wars à la sauce Disney. Il est sympathique, plutôt bien troussé, mais scénaristiquement pauvre, "marvelisé" dans son humour, et pas très utile...
Mais ça ira, j'ai fait le deuil.

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le 23 juin 2018

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Mr_Step

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