Quand Hollywood chie des billets verts sur la Bible.

J'aurai pu titrer cette chronique "Oh mon Dieu...", mais un dimanche de bon matin c'était inapproprié. Cependant, au lieu d'être assise sur le banc de la paroisse la plus proche je me permets de rédiger une critique sur un film au sujet ô combien fascinant, mais de ce que j'ai cru comprendre très souvent mal traité (et concernant, ce film, maltraité).

Son of God n'est ni plus ni moins qu'un empilement des miracles perpétués par Jésus, suivi de la passion du Christ et de sa résurrection. Deux heures et dix-huit minutes de film résumées en une phrase sans colifichets. Je parle bien d'empilement, tant transpire la morale évangéliste douteuse qui a du très probablement participé grassement sur le plan financier à la production d'une telle bouse intersidérale. Au départ du film, j'avais très peur. Les premières secondes, j'ai trouvé ça joli, bien filmé, les maquettes servant à représenter Jerusalem, Nazareth et autres cités juives étant bien faites. Apparaissent donc les Romains, grimés en grands méchants sanguinaires n'hésitant pas à enfoncer profondément leur lance dans la poitrine d'un Juif, sans motif précis (m'est avis qu'il y a un poil d'exagération sur cet aspect, mais je ne suis pas historienne). Nous voyons ensuite Jésus, aidant Pierre à pêcher des poissons, Pierre à qui pêcher des tonnes de poissons a révélé que oui, Jésus était fils de Dieu et qu'il fallait le suivre. En vrai, pour avoir lu pas mal de bouts de la Bible il me semble bien eu égard à mes maigres souvenirs que c'était beaucoup plus complexe que cela. Mais Pierre pêche beaucoup des poissons et décide donc de tout lâcher pour suivre Jésus. Premier miracle, pourquoi pas.

Attardons-nous un instant sur Jésus, ou plutôt l'acteur qui joue le rôle de Jésus. N'en doutons point, monsieur (je ne me rappelle plus de son nom anecdotique) a la tête de l'emploi. Regard bienveillant, cheveux ondulés, mi-longs, châtains mais pas trop, un peu mat de peau mais pas trop, mince mais pas trop. Et un espèce de sourire d'imbécile heureux vissé au visage pendant ces deux putain d'heure. On aurait mis Kit Harigton à sa place (Jon Snow) qu'on aurait eu le même jeu d'acteur dont on ne sait si on doit rire ou pleurer, sachant que cette fois on parle quand même de Jésus (Jon Snow à côté pardon, mais on s'en fiche). Il m'a rarement été donné de voir un acteur aussi mauvais, et aussi minable. Incapable de jouer la tristesse, la joie, et surtout la colère. Quand Jésus renverse les tables des marchands en train de négocier dans le Temple, l'acteur le fait avec le sourire aux lèvres, et cette espèce d'expression pathétique suppliante disant "ne voyez-vous paaaas ce que vous êtes en train de faire ?". C'est à en casser son écran. Même ses cris lors de l'épisode de la passion paraissent improbables, inappropriés par rapport à la douleur censée être vécue par notre Jésus. Je n'ai même plus de mots pour dire à quel point cette abomination humaine a saccagé le mythe.

Donc pendant une heure, enchaînements de miracle. Pierre qui pêche, la multiplication des pains et du poisson, Lazare "lève-toi", et cetera. Tu vois un miracle, pas le temps de l'analyser, d'en retirer un enseignement, hop ! On enchaîne sur une autre scène. Aucun mot sur la traversée du désert, thématique pourtant importante. Et bien sûr, comme on est chez les amerloques, aucun mot sur Marie-Madeleine : elle est là, pendant tout le film, mange à toutes les occasions avec Jésus et ses disciples, sauf pour la Cène. Incompréhensible. Juste elle disparaît, et elle revient après. Vient ensuite l'heure de la passion, un peu mieux que la fange précédente, malgré les aller-retours incessants sur Marie, sa mère qui au bout du cinquième n'a plus d'expressions faciales dans sa poche pour mimer sa tristesse inconsolable de voir son fils crucifié sous ses yeux. Enfin, on a la résurrection, Jésus perpétuellement baigné dans la lumière au sourire qui donne envie de lui casser la figure.

J'ai passé deux heures assez pénibles. Je ne m'attendais pas à une mise en image de mots triés et sortis du Nouveau Testament. Je n'ai pas eu l'impression de voir un film, mais plutôt un alignement de sermons prodigués par un prêtre, un pasteur, ce que l'on veut. Rien n'est creusé sur la psychologie des protagonistes, même pas sur Jésus lui-même, qui fait pourtant l'objet de ce film. C'est mou, indigeste et surtout on aurait pu s'en passer. Mais comme un film sur Jésus reste une machine à cash, il faut bien qu'il sorte par la porte de derrière (seules les métaphores scatologiques me viennent à l'esprit).

Spoiler : à la fin, il meurt.
-Ether
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le 29 juin 2014

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-Ether

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