La recette appliquée à la lettre !

Pour pouvoir critiquer un film de Malick il me semble nécessaire de revenir sur sa carrière tant chaque personne possède un rapport différent à l’œuvre de ce réalisateur. Pour faire court disons que j'ai toujours apprécié sa filmographie jusqu'à The Tree of Life (inclus). Ces films se rendant de plus en plus expérimentaux et hermétiques au fil des années: une voix off quasi omniprésente, un montage fragmentaire avec un flux ininterrompu d'images s'entrechoquantes, une narration presque abandonnée , etc... The Tree of Life correspondait à la quintessence de la formule "Malick". Mais une fois passé l'aboutissement formel de ce dernier, Malick n'a plus su renouveler son cinéma et à donc enchaîné (abusivement) les films depuis 2011. 9 films en quarante ans mais 5 depuis 2011 ! Nous avons donc eu droit à A la merveille et Knight of Cups suivant au précepte près la formule "Malick" à base d'instants magique de coucher de soleil, montage fragmenté, voix off qui se substitue aux dialogues, vous voyez le topo.
Il est donc tout naturel de commencer à se sentir léser tant Terrence Malick fait du surplace depuis maintenant un certain temps. Je passe sous silence Voyage of Time qui lui aussi applique inlassablement la formule Malick sans arriver à fasciner ne serait-ce qu'une seconde malgré un sujet aussi ambitieux, ce qui fonctionne sur une partie de The Tree of Life irrite sur la longueur d'un long métrage.
Nous arrive donc Song to Song ( dont je ne connaissais même pas l’existence avant sa sortie) en 2017 et autant dire que je n'en attendais rien et que je savais d'avance à quoi aller ressembler le film. Je suis tout de même aller le voir tant j'espère voir un jour ce réalisateur proposer de nouvelles choses. Hors Song to Song n'est rien d'autre qu'un nouveau décalque exact de ces précédents films. Malgré une tentative d'approfondir la psychologie des personnages en leur laissant quelques dialogues (ce que Christian Bale n'a pas eu l'opportunité de faire dans Knight of Cups uniquement composé de voix off) le film n'arrive pas à intéresser le spectateur, du moins sur la longueur. Parce que je fus tout de même séduit par la première moitié car il est toujours fascinant de voir le jeu de fragmentation/reconstruction qu'effectue Malick.
Mais le film fait malheureusement 2h10 et ce jeu formel arrive vite aux bouts de ces limites (limites qui je le rappelle furent atteintes avec The Tree of Life et ces 20 dernières minutes totalement mièvres). Et non il ne s'agit pas d'un film "expérimental" qui divise par ces choix radicaux, ce qui était expérimental en 2011 (quoique son système de montage est présent sur certaines scènes de La Ligne rouge donc 20 ans auparavant mais The Tree of life l'a quand même systématiser à l'intégralité du long métrage) n'a rien de surprenant en 2017 puisqu'il arrive après déjà deux (répétitives) déclinaisons.
La durée fut toujours pour moi un soucis chez Malick avec les 3 (longues) heures de Le Nouveau monde, le final lourdingue de The Tree of life, les 2 (très longues) heures de Knight of Cups. Je ne commente pas ici l'importance de la religion et des questionnements existentiels présents dans toute son œuvre car précisément ils sont présents dans toutes son œuvre en mieux traité et Song to Song n'apporte rien de neuf sur ce sujet. Terrence Malick semble totalement sans inspiration, n'a plus grand chose à dire sur le monde si ce n'est les mêmes sempiternels questionnements intérieurs des personnages, le milieu du monde musical n'apporte rien au film si ce n'est une BO effectuant un grand écart entre Die Antwoord (si si vous avez bien lu) et du Heavy Metal par moment, ainsi qu'une apparition oubliable de Iggy Pop dont Malick s'efforce tout de même de capter les mutilations sur son corps.
Difficile d’imaginer un si grand réalisateur faire autant de surplace, Il n'était peut être pas si grand que ça au final.

Antichrist
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le 13 juil. 2017

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