C'est y'a déjà quelque années, je ne sais plus si c'est quatre ou seulement trois, en tout cas ça remonte un peu, après un fabuleux et honteusement décrié To the Wonder qu'on apprend que le grand et très discret Terrence Malick avait enchaîné les tournages de deux autres films en 2012.
En admirateur absolu des œuvres du monsieur je ne pouvais que trépigner d'impatience de découvrir ces nouveaux projets déjà magiques dans mon esprit.
J'ai donc dû attendre la sortie blu ray de Knight of Cups pour en voir un des deux, merveille évidemment, et le second ne pouvait forcément pas sortir en même temps, ni quelques mois après... commercialement ça ne rime à rien, puis Terry soigne son montage jusqu'à la dernière minute. Montage initial de huit heures encore une fois, tout comme pour The Tree of Life.
Lawless à la base, devenu Weightless en raison de la sortie du film de John Hillcoat en 2012 portant le même titre original, le nouveau bijou du grand Terry s'intitulera finalement Song to Song, phrase tirée d'une des répliques du film.


Si j'ai attendu ces quelques années pour découvrir cette œuvre, j'ai dû m'accrocher un mois de plus étant donné que mon cinéma ne l'a programmé qu'à partir d'aujourd'hui, à savoir le 17/08/2017. Après avoir raté navrement Voyage of Time au cinéma, j'ai enfin pu découvrir mon premier Malick sur grand écran. Song to Song sur grand écran...


Si Malick décide réellement avec son prochain film Radegund de revenir à une narration plus structurée, ce qu'il n'a pas fait depuis... pou... de très nombreuses années, il marquera un bien bel adieu à ce style qu'il a tant sublimé. L'homme délaissant Colin Farrell pour aller filmer un arbre aurait-il achevé son périple libertaire ?
Quoiqu'il en soit, il signe avec ce dernier né une prouesse de plus, que ce soit techniquement ou émotionnellement, j'avais littéralement le sourire pendant une bonne partie du film, notamment la première, quand j'ai découvert avec joie ces lieux... ces visages... ce soleil... ces feuilles... cette histoire. Cette histoire oui, car si Malick est libre, il n'a jamais pondu de films vides, pour certains si mais ces gens sont autres à mes yeux...


Si le synopsis vendait un triangle amoureux, des liaisons et trahisons, tout cela sous le regard de la scène musicale d'Austin, on ne peut qu'être étonné une fois face au métrage. La scène musicale prenant au final si peu de place, elle apparaît brièvement ici et là pour nous régaler de la présences de personnes populaires et atypiques tel un bon vieux Iggy Pop, une Patti Smith et j'en passe...
Voir même un Val Kilmer déchaîné que j'espérais ne pas voir coupé au montage tellement les images de tournages sont folles.
Ce film n'a donc pas pour principale quête la musique, bien qu'elle rythme intensément et superbement les deux heures qui en paraisses plus, partageant morceaux estivaux à du très beau classique.
Ce film est une vie, plusieurs vies mêmes, le montage nous le prouve bien, parfois nous sommes perdus comme les hommes et femmes que l'on suit à l'écran, est-ce un flashback, un fantasme, un souvenir ou simplement ce qui se déroule réellement ? Tant de questions qu'on finit par lâcher au fond de ces piscines à 50 000 dollars, ces baraques à dix fois plus cher, pour au final être libre de suivre ce couple dans de superbes rocheuses, où sont stagnantes quelques flaques claires et calmes.
Si la narration est une fois de plus bercée de plusieurs voix off, c'est avant tout les images qui priment, j'ai même après avoir lu une phrase, vu en vostfr je précise, oublié celle-ci, me demandant ce que je venais de lire, puis l'image avait tellement d'impact, de beauté, que je n'avais plus besoin de cette phrase. Le trajet de ce couple qui se disperse pour mieux se retrouver, qui rencontre d'autres personnes elles aussi perdues ou déchues, quel trajet, quel ode à la vie, à l'amour, à la liberté, qui forcément passe par la déception, le désenchantement et l'autodestruction.


Malick et Lubezki m'enchante une fois encore de cette photographie léchée et d'une beauté sidérante, cette caméra qui flotte telle une bulle entre ces êtres, ces lieux magnifiques, je n'ai pas de mots si ce n'est ceux que je pourrais répéter en boucle. Le montage du père Terry est toujours aussi vivant, frais, complexe, prenant.
Il se gave d'un casting parfait, d'ailleurs je me demande toujours comment on peut faire la promotion d'un film tourné quatre ans auparavant, c'est assez amusant je trouve, tout comme remettre cette brochette d'acteurs dans le contexte de 2012/2013.
Mon amour, Rooney Mara est incontestablement la plus mise en avant du groupe, celle qui évolue le plus, aux côtés d'un Ryan Gosling simple et attachant. La belle Natalie Portman enchaîne sous l’œil de Malick après Knight of Cups, tout comme la fabuleuse Cate Blanchett. Michael Fassbender, le Satan du récit est impeccable et surtout troublant.
Viennent s'agrafer comme à chaque fois des acteurs plus ou moins coupés au montage, telle que la française Bérénice Marlohe, Holly Hunter, Val Kilmer cité plus haut, ainsi que plusieurs artistes musicaux et autres que je ne connais pas bien. Je crois même avoir repéré durant un très bref instant Boyd Holbrook qui est passé à la coupure malheureusement, tout comme Benicio del Toro...


Song to Song est un bonheur visuel, auditif et émotionnel, en sortant de la salle je me sentais apaisé, pas pour longtemps certes, la vie reprend son cours mais j'étais léger, je n'avais pas envie de me prendre la tête...
Malick me bluffe encore et toujours, je le constate admirablement, malgré les thèmes abordés de manière évidement théâtral au vu du style de mise en scène, ce côté poussé à l'extrême des émotions, n'est en aucun cas étouffant, au contraire il laisse jaillir ce qui en vrai ne pourrait paraître qu’éphémère et furtif. Ici le temps est une boucle, pour la vie, à la vie, à l'amour !

-MC

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