Soul Docter
Reprochez ce que vous voulez à Pixar, mais la firme à la lampe n'est pas dénuée à la fois d'ambition dans les histoires qu'elle veut raconter comme dans la manière dont elle les raconte ainsi que...
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le 28 déc. 2020
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Avouons-le tout de go : j'ai eu envie de voir ce film en raison de sa seule première bande-annonce. Difficile de faire plus consensuel et cliché, mais c'est ainsi.
Le scénario est du jamais vu chez Pixar : c'est l'histoire d'un type, passionné de musique et appartenant à l'une des fortes minorités ethniques américaines qui se retrouve brutalement projeté dans l'au-delà et doit trouver un moyen d'en sortir avant qu'il ne soit trop tard, aidé par un autochtone…
Oui oui, c'est le scénario de base de Coco. Je m'étais amusé à le faire remarquer à qui voulait l'entendre avant sa sortie. Mais pour être honnête, ce n'est que le scénario de base. Le reste est assez original et bienvenu.
L'animation en particulier. Bien entendu, l'univers de l'au-delà et des limbes est très original, abstrait et doux pour les limbes, majestueux et impressionnant pour le « Grand après » (oh, ce navire spirituel naviguant dans les limbes, quelle splendeur!) ; mais on peut en dire autant du style très particulier par lequel notre monde nous est présenté : il est si travaillé que certains plans ressemblent à s'y méprendre à des photographies, on atteint un degré de réalisme rarement, voire jamais vu dans un film d'animation par ordinateur. Sans même parler des jeux de lumière sur les personnages, véritables toiles informatiques.
Le scénario, bien que traitant de thèmes assez durs (on parle tout de même d'un homme qui estime n'avoir pas encore vécu et cherche donc à échapper à la mort) est d'une très grande simplicité dans le meilleur sens du terme. Le spectateur comprend très vite et très bien les enjeux du récit et des personnages et peut ainsi comprendre ces derniers sans problème.
En parlant des personnages, ils sont eux aussi très réussis. Ce tandem d'une âme qui ne veut pas mourir et d'une âme qui ne veut pas vivre (merci à Douglas Walker) nous séduit très facilement, tant ces deux personnages sont, chacun à sa manière, très réussis. Les personnages secondaires ne sont pas en reste, notamment les « Jerry », sortes de gentils organisateurs des limbes, et Terry, comptable des morts (même si j'aurais aimé voir ce dernier un peu plus), ce dernier conférant une touche quasi-mythologique au film, agissant comme un Charon conceptuel obsédé par son travail.
Par ailleurs, on notera (comme beaucoup l'ont déjà noté) que Soul est clairement destiné aux adultes. Bien sûr, un enfant pourra le regarder sans problème, mais il n'est pas la cible principale du film, tant il est évident que, mis à part sous certains aspects mineurs (les âmes des limbes par exemple), Soul s'adresse à un public plus mûr. Il s'agit là d'un point important, et on espère que ceux qui croient encore que l'animation est destinée aux enfants méditeront là-dessus.
Toutes ces qualités font que l'on regrette sincèrement plusieurs trous de scénario, pas tous gênants au premier visionnage, mais préoccupants lorsqu'on y repense. En vrac :
Pourquoi la famille de Joe n'est-elle pas au courant de son accident ?
Comment Terry arrive-t-il à identifier Joe Gardner aux archives, sachant qu'il n'avait rien pour cela ?
Et surtout, vers la fin, pourquoi nous faire croire que Joe devrait mourir, quand le film nous montre clairement que ceux qui voyagent dans les limbes par leur art peuvent très aisément revenir sur terre ? Sachant cela, le sacrifice consenti (mais non accompli) de Joe perd beaucoup de sa force émotionnelle, sans même évoquer la pirouette scénaristique finale (je ne partage pas en revanche l'opinion de ceux qui estiment que le film aurait du s'achever par la mort de Joe).
Mais baste ! La puissance émotionnelle et intellectuelle (bac plus deux les enfants) du film l'emporte de beaucoup sur ces quelques défauts. Le spectateur se souviendra longtemps de la musique, de l'animation, des personnages et de deux ou trois scènes particulièrement mémorables (notamment celle, excellente, du barbier). Surtout, les questions posées par le film sur le sens de la vie, la mort, les raisons de vivre, la passion et le temps occuperont longtemps son esprit.
A voir absolument (et jusqu'à la fin du générique).
Créée
le 12 janv. 2021
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