Il faut bien l'admettre, lorsque j'ai vu la première fois la bande annonce de Source Code, tout ce qui m'est venu à l'esprit furent les noms d'autres films comme L'armée des Douze Singes, Un Jour Sans Fin, Déjà Vu ou même la série Code Quantum. Bref, ça ne sentait pas du tout l'originalité. Est-ce pourquoi je ne suis pas allé le voir au cinéma, surtout dans ce cinéma sans clim' hein. Donc, lorsqu'il sort en DVD, je me dis que ça serait con de rater un film de SF comme je les aime, sur un thème que j'adore : la manipulation du temps. Alors bon, je vous invite à monter dans le train avec moi, car on va parler de Source Code.

Un homme (Jake Gyllenhaal) se reveille dans un train, comme sorti d'une énorme cuite, une femme aussi belle que craquante (Michelle Monaghan) se tient devant lui et lui parle comme si visiblement elle le connaissait. Elle l'appelle Sean, pourtant ce n'est pas son nom, il s'appelle Colter Stevens, c'est un pilote d'hélicoptère et il ne la connait pas du tout. Paniqué, Colter se rue dans les toilettes du train pour se passer de l'eau sur le visage, lorsqu'il voit son reflet dans le miroir : ce n'est pas lui, c'est le visage d'un autre homme. Colter ne comprend pas ce qu'il se passe, il est totalement désorienté. La jeune femme vient le voir pour lui demander si ça va, lorsque le train explose, brûlant tout sur son passage. Colter se reveille, il est attaché à une chaise au centre d'une capsule métallique, il ne sait pas non plus où il est, il ne comprend rien... Jusqu'à ce qu'une voix se fasse entendre.

Une intro sur les chapeaux de roues, si tant est qu'on n'ait pas vu la bande annonce avant. C'est chiant à la longue ces trailers qui en révèlent trop, et en même temps pour un film pareil comment ne pas spoiler l'histoire? Comment être surpris? En allant voir un film dont on ne sait rien pour près de 10 euros? Et si finalement le seul espace de découverte cinématographique, c'est quand tu zappes un dimanche matin et que tu tombes sur un film qui commence à peine, et dont tu ne sais rien? Mais bon on va faire avec ! Alors Source Code ça commence par l'explosion d'un train. On ne sait pas qui est le responsable, ce que Colter faisait là, qui est la jeune femme, on ne sait même pas "quand" ça se passe... On sait juste qu'ils se dirigent vers Chicago.

Cette mise en bouche a le talent d'exposer énormément de choses, et de mettre le spectateur averti déjà en alerte. A base d'inserts d'ordinaire parfaitement inutiles, le réalisateur Duncan Jones joue avec nous et nous dit "Oui désolé, vous savez de quoi il est question dans le film, alors commencez déjà à chercher". Et on cherche, on se dit que le film est un mélange de plein d'autres films bien plus vieux, et que celui-là ne va pas nous tenir en haleine autant que ses prédécesseurs, car on est déjà bien rodé. Et c'est super intelligent de la part du réal' d'avoir fait ça, parce que notre réaction est conne, tout simplement. On commence ce film en essayant de l'analyser techniquement, alors qu'on devrait juste en profiter comme des spectateurs et se laisser porter par l'histoire qu'on veut nous raconter. Cette intro est à la fois très intéressante pour celui qui ne sait rien du film, mais c'est également un joli amortisseur pour celui qui est dans la confidence, à qui on promet finalement un film qui va au-delà de cette "recherche du coupable".


Source Code ne parle pas vraiment du voyage dans le temps, on ne nous gave pas avec une tirade sur l'explication scientifique qui tenterait vainement de poser une logique à une technologie futuriste. Et par cette discrétion, Source Code s'octroie le privilège d'être plus cohérent et plus réaliste que ce que j'aurais pensé à la base. Cette histoire se tient de bout en bout, elle ne s'éparpille pas dans des délires et retournements de situation saugrenus , jamais. Source Code c'est une histoire de voyage dans le temps bien carré, avec un système qui a des règles simples et des limites bien distinctes. Mais alors pourquoi le regarder s'il n'y a pas de surprise? Et bien en fait ce que la bande annonce de Source Code ne dit pas, c'est qu'elle ne parle pas que de ce voyage, elle parle avant tout de son personnage principale, Colter, et elle le fait bien.

Colter ne sait pas où il est, il ne comprend pas comment il a pu attérir dans cette capsule pour servir d'observateur pour cette obscure cellule militaire. Son dernier souvenir remonte à sa mission en Afghanistan en tant que Pilote d'Hélicoptère. Entre deux informations, il va essayer de soutirer des révélations de Goodwin, son agent de liason avec la direction, son seul lien entre le monde réel et le Source Code. Sa mission dans le Source Code est claire : un attentat a eu lieu tôt dans la matinée, et un second va avoir lieu dans quelques heures. Colter va devoir chercher le moindre indice suceptible d'empêcher la deuxième explosion. Cependant Colter a du mal à réaliser qu'il n'est qu'un observateur dans ce train, qu'il a déjà explosé, et que tous les passagers, la belle Christina comprise, sont morts.

On retrouve beaucoup d'Un Jour Sans Fin dans le déroulement du film, puisque Colter n'a qu'une fenêtre de 8 minutes pour observer, après quoi il doit recommencer à partir du début de la "mémoire". Ainsi on assiste aux mêmes actions, mais qui vont différer suivant les actions de Colter. Toutes ces modifications au fur et à mesure des venues de Colter vont le pousser à éprouver les limites du Source Code. Car plus ça va, plus il s'attache à la magnifique Christina, et ne peut se résoudre à la croire indubitablement morte alors qu'il la voit si pleine de vie. Voir Colter agir et modifier le déroulement de ce passé à chaque fois est assez déroutant, car ça ne colle pas vraiment au postulat de départ, néanmoins le scénariste a trouvé une manière particulièrement judicieuse et intelligente pour faire tenir tout ça et nous proposer une narration finalement plus ouverte. Il faut bien le dire, si le film n'aurait été qu'un aller-et-retour dans le même wagon de train, ça aurait été très léger, et il aurait fallu bien plus de talent pour en faire quelque chose de potable.


Le film se trouve donc séparé en deux, entre la mémoire du train où Colter n'est pas lui, mais la représentation d'un des passagers tués lors de l'explosion, et cette capsule étrange où il reçoit ses ordres depuis l'image d'une webcam. C'est finalement à l'intérieur du Source Code que Colter est le plus libre, que ce soit de ses mouvements ou pour rechercher les informations que ses supérieurs ne lui donnent pas. On assistera à un jeu assez sympa où Colter va essayer de contacter ses supérieurs depuis le Source Code, où il va essayer d'ouvrir les limites de ce programme. On est littéralement portés par ce personnage, joué avec talent par le non moins talentueux Gyllenhaal. Il fait de ce personnage un héros bien plus intéressant qu'un militaire bodybuildé prêt à tout pour sauver l'Amérique. Colter est finalement l'évolution logique de l'image du patriote américain. Sa relation avec Michelle Monaghan (vous ai-je déjà dit à quel point elle est craquante?) est vraiment excellente, un peu à la manière du duo Bill Murray/Andie McDowell, sauf que là on y rajoute l'angoisse de l'attentat, la brièveté de la rencontre, et le fait également que Colter "remplace" quelqu'un d'autre, et que son comportement va différer de celui de son hôte.

Côté technique, les divers effets spéciaux sont vraiment convainquants, et le film n'est pas plombé par ces putains de lens flare ! Quel miracle. En faisant de Source Code un double huis-clos, on aurait pu craindre à une certaine lassitude, voir à une branlette intellectuelle postmoderne; Finalement ça reste mainstream, donc à la fois léger dans son traitement, mais finalement assez intelligent pour un film grand public. Le film ne pose pas véritablement de question à proprement parlé, mais il arrive à certains moments à nous faire réagir, sur le libre arbitre, la liberté individuelle.. Ce n'est jamais très profond attention, et puis le film n'a jamais été prévu pour ça, mais bon on nous offre une histoire intéressante à suivre et pas bête pour deux sous, ce qui est au final une bonne surprise.

Malgré une bande annonce qui augurait d'un film vu et revu, d'un mélange à peine dissimulé de plusieurs films, j'ai pris un véritable plaisir à suivre la mission de Colter. L'histoire est intéressante à suivre même si le fond n'est en rien original, les relations entre les personnages sont agréables à suivre, la réal' est bonne... Non franchement, sans atteindre des sommets (ce qui n'a jamais été avancé), le film s'en sort très bien et offre un divertissement très convainquant et assez intelligent. A conseiller!
Anfalmyr
6
Écrit par

Créée

le 23 sept. 2011

Critique lue 329 fois

Anfalmyr

Écrit par

Critique lue 329 fois

D'autres avis sur Source Code

Source Code
Hypérion
7

La physique quantique pour les nuls

Source Code, ou le film d'anticipation rafraîchissant du moment. Avec un titre qui ne veut pas dire grand chose et un début accrocheur (quoiqu'éventé par la bande annonce, l'effet de "surprise"...

le 23 août 2011

78 j'aime

4

Source Code
Marius
5

The man who sold the world

"Everything is gonna be ok." C'est avec ce genre de platitudes que Source Code chavire. Conquis par Moon, formidable bizarrerie spatiale (space oddity) et retour à une SF dénudée des oripeaux que les...

le 24 avr. 2011

59 j'aime

12

Source Code
ChrisTophe31
7

Source Code: analyse #2 (SPOILER !!!)

Pour cette seconde analyse, nous allons essayer de décortiquer Source Code . Ceux qui n'ont pas encore vu le film, je vous invite à le voir et à revenir ici après pour avoir des explications, si...

le 16 juil. 2015

37 j'aime

33

Du même critique

Kaamelott
Anfalmyr
10

Alexandre Astier est un menteur

Si vous aimez les histoires de braquage, celle-ci est pas mal. C'est l'histoire d'un lyonnais, musicien, acteur, metteur en scène, scénariste... Le pendant Geek d'Audiard si jpuis me permettre.. Ce...

le 12 janv. 2011

45 j'aime

1

RoboCop
Anfalmyr
5

Le Membre Fantôme

Rarement un Remake n’aura déchaîné à ce point les passions avant même sa première diffusion. Ce film, visiblement personne ne voulait le voir, au point tel que la majorité de la promotion orchestrée...

le 7 févr. 2014

37 j'aime

1

Forces spéciales
Anfalmyr
6

Critique de Forces spéciales par Anfalmyr

Le jour où j'ai appris qu'un film sur les forces spéciales françaises contemporaines était en chantier, j'étais content. Je me suis dit "ah enfin on va parler des héros de l'ombre, on arrive enfin...

le 15 nov. 2011

17 j'aime

2