L'exploration d'un mythe et l'un des meilleurs films de super-héros tous confondus...

Le succès du premier volet fut tellement retentissant que le studio Columbia Pictures demanda à Sam Raimi d’enchaîner avec un second film en 2004. Le cinéaste accepta avec grand plaisir, mais ce fut à partir de là que les embrouilles entre réalisateurs et producteurs de studio commencèrent à naître. Le premier objectif fut de faire avancer l'histoire du Bouffon vert, ennemi du précédent opus, jusqu'à un affrontement redoutable. Cependant, le studio imposa un autre vilain, en outre l'inénarrable docteur Octopus, suffisamment puissant pour apporter un lot de scènes d'action plus présentes que pour la première aventure de l'homme-araignée. Raimi voulut néanmoins se centrer encore sur Peter Parker, et donc essaie d'adapter Octopus au scénario afin d'éviter un film trop fouillis.
Ce second opus raconte les mésaventures de Peter Parker qui a bien du mal à jongler entre les tracas de sa vie privée et ses déboires héroïques. Mauvaises notes à la faculté, désespoir de trouver de l'argent, relations tendues avec son meilleur ami vengeur : tout concorde à ce que la vie de Spider-Man soit incompatible avec son quotidien. S'ensuit la venue dramatique d'un nouvel ennemi en la personne du Docteur Octavius, scientifique obstiné et figure d'admiration pour le jeune étudiant...
"Spider-Man 2", couronné d'un succès phénoménal, est non seulement l'une des meilleures suites surpassant son aîné mais il est également un des films déjà en avance sur le thème du super-héros. Dès le début, nous voyons non pas Spidey aller se battre contre des brigands de bas-étage, mais Peter, l'être ordinaire, essayant de trouver un petit boulot pour assurer sa vie d'adulte. Cela peut rebuter le fan qui cherche avant tout dans un "comic-books movie" un divertissement mettant en scène son super-héros favori démontrer ses pouvoirs ô combien démentiels, j'en conviens. Mais ce serait oublier que l'objectif de la saga de Raimi est de porter à l'écran un conflit entre deux personnalités dans un seul homme, l'une ordinaire et maladroite et l'autre dynamique et sûre d'elle. Et c'est ce que nous voyons dans la première scène : Peter est sur le point de trouver un moyen de gagner sa vie, tandis que Spider-Man sauve les enfants d'un camion dangereux. Là où dans le premier film nous savions faire la différence entre Parker et Spidey à l'écran, dans le deuxième film nous ne le faisons pas autant car les destins des deux sont liés intrinsèquement. Mais, avant d'être un héros, Spidey est avant tout une personne ordinaire qui, par choix du destin, a pris des responsabilités l'amenant à des péripéties extraordinaires. Sam Raimi est le précurseur de l'humain derrière le masque super-héroïque, thème à la mode, bien avant "The Dark Knight" de Christopher Nolan. Plus optimiste, le film de Raimi n'oublie pas d'installer une dramaturgie pesante. Entre Harry qui rêve de faire la peau à l'homme-araignée, un amour qui s'éloigne de plus en plus et un méchant né de manière importune, notre héros aura bien du mal à concilier ses deux vies et à endurer les conséquences de ses responsabilités. A travers l'histoire romantique entre Peter et Mary-Jane, ces problématiques principales liées au super-héros, spécialement Spider-Man, sont exploitées de main de maître par Raimi. Spider-Man se rapproche quasiment du public, comme une personne ordinaire qui détient des pouvoirs extraordinaires. Dans cet opus, il est confronté aux conséquences de ses choix personnels et il doit assumer à présent ses responsabilités avant d’en sortir grandi. Le sens du devoir est désormais au centre du film. Même le méchant impressionnant, incarné sublimement par Alfred Molina et mise en scène magistralement comme un monstre tentaculaire, est plus humain qu’il n’y parait : c’est un scientifique, promis à un bel avenir balayé devant lui, qui essaie en vain de le reconstruire dans sa folie. C’est un personnage tragique et touchant, dont le spectateur peut arriver à comprendre ses motivations. Son développement est construit de belle manière, puisqu'il suit le thème principal du devoir de chacun dans le film.
De manière formelle ensuite, le spectacle est encore plus présent que jamais : Raimi assume désormais un visuel coloré et dynamique institué à la saga, commencé maladroitement dans le premier opus, et s'en donne à coeur joie pour exploiter les folies que peuvent apporter son parti-pris. Ainsi, le film porte l'identité cartoonesque et iréelle propre au cinéma de Raimi, tout en délivrant des morceaux de bravoure époustouflants et dignes de la puissance que laissent transparaître Spider-Man et le docteur Octopus - en outre on retiendra leur affrontement dantesque sur le train, l'une des scènes d'action les plus mémorables dans l'univers cinématographique des supers-héros. La musique de Danny Elfman est toujours aussi bien mise en valeur pour apporter un dynamisme incroyable au film. S'il y aurait des reproches à faire, ce serait du côté des dialogues, pas forcément assez subtils pour illustrer les relations entre les personnages, et de certains tics qui commencent à se répéter (les rôles d'objets-à-sauver des femmes, l'aide de la population new-yorkaise), lesquels sont très visibles avec le temps - et donc l'évolution des films de super-héros - et ne sont pas réellement gênants. Au contraire, c'est à la fois un spectacle généreux et bien construit et une lettre d'amour sincère adressée à l'univers des comics-books que nous a offert Sam Raimi sur grand écran.
"Spider-Man 2" est certainement l’opus le plus abouti de la trilogie et l’un des meilleurs films de Sam Raimi, dans lequel le spectateur admire un spectacle flamboyant et généreux en scènes d’action impressionnantes. Avec ce long-métrage, Raimi transcende cette fois-ci le schéma narratif classique du film de super-héros pour livrer une belle histoire à la fois tragique et optimiste, dans laquelle tous les personnages sont confrontés à des blessures du passé et sont amenés à les exorciser d’eux-mêmes.

Max_Sand
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le 14 juin 2014

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