Selon Rick Marschall, tous les super-héros étaient directement inspirés de Superman ou Batman. Superman incarne la figure mythologique, le surhomme patriotique aux pouvoirs extraordinaires le plaçant au-dessus de l’humanité mais toutefois caractérisé par une morale irréprochable. Un symbole vivant en somme. Batman, quand à lui renvoie directement au concept du vigilante urbain avec une approche plus sombre et plus réaliste. Il est vrai que beaucoup de super héros se sont basés de près ou de loin sur ces modèles. Stan Lee et Steve Dikto bouleverseront cependant les codes, en introduisant un troisième modèle, plus accessible et plus humain. La première richesse de Spiderman passe par l’identification. Il est en effet difficile de s’identifier à Superman véritable dieu invincible moralement irréprochable tout comme il est finalement difficile de s’identifier à Batman en raison de son interminable liste d’atouts et de compétences : Milliardaire, playboy, séducteur né, polyglotte, dieu des arts martiaux, stratège de génie, meilleur détective du monde, polymathe, leader né…


Avec Spiderman, Stan Lee et Dikto nous invitaient à entrer dans l’univers d’un héros plus humain, faillible, inexpérimenté. Peter Parker est un adolescent mal dans sa peau qui fait face à des problèmes d’adolescent. Il éprouve des difficultés à s’intégrer, à parler aux filles, à se faire des amis. Plus tard, il aura des difficultés à garder son boulot, payer ses taxes. En somme, en dépit du fait d’être surdoué, Peter Parker est un héros faillible dont les erreurs auront de lourdes conséquences pour lui et pour son entourage. Peter Parker fait face aux problèmes que rencontre le citoyen moyen. Là, ou le fait d’être un super héros pouvait sembler très attractif avec un Superman, la carrière super héroïque de l’homme araignée est au contraire présenté comme une véritable malédiction. Le fait de porter le costume empiète bien souvent sur sa vie sociale, sentimentale et professionnelle. Son obstination à assumer ses responsabilités et utiliser ses pouvoirs pour œuvrer au bien être d’autrui, en dépit du désastre qu’est parfois sa vie civile est justement ce qui rend le personnage admirable et très attachant. De grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités peut certes paraitre un peu nias, ringard et bien-pensant, l’adage demeure toutefois fort.


Spiderman peut être vu comme une métaphore du passage de l’adolescence à l’âge adulte, la prise de responsabilité. Le fait de s’assumer en tant qu’adulte, superhéros et plus tard en tant que mari. Voilà ce qu’avait parfaitement compris Sam Raimi dans sa trilogie et ce que Marc Webb n’avait pas compris, nous présentant Spiderman comme un mixe entre Clarke Kent et Robert Pattinson dont la seule préoccupation est de se taper Gwen Stacy (parce que tout ce qui définit l’adolescence, c’est le désir inassouvissable de vouloir se taper la reine des abeilles c’est bien connu).


Avec ce second reboot des aventures au grand écran, le duo Marvel/Disney nous présente une toute autre vision, celle d’un Miles Morales non assumé. Car ce Spiderman n’est pas Peter Parker mais une caricature de geek de 15 ans. Ce qui rend finalement le fait d’avoir pris un casting qui semble tout droit sorti d’une série Disney du genre phénomène Raven encore plus hypocrite. « La prestation d’un acteur n’est pas défini par sa couleur de peau ou ses origines » hurleront les pantins de Disney outré. Un postulat qu’il n’est effectivement pas possible de remettre en question, en outre il est vrai qu’apporter un minimum de diversité dans le modèle hollywoodien mettant sans arrêt en avant l’éternel mâle blanc hétéro viril est honorable. Cependant au final, mise à part la bienpensante de respecter des quotas ethniques, qu’est-ce que ça apporte d’un point de vue scénaristique ou artistique de changer la couleur de peau des personnages dans une adaptation ? Rien. La démarche est encore plus hypocrite en raison du fait qu’il EXISTE des personnages de couleurs dans les comics et je suis le premier à m’en féliciter. X-men qui osait présenter le premier mariage gay dans un comic book, Batwoman qui met en avant une héroine homosexuelle, Marvel qui ose mettre en avant une superhéroine musulmane en la personne de Kamala Khan, Sam Wilson (l’éternel siderkick black) qui succède à Captain América dans le rôle du défenseur du rêve américain c’est fort. Et je l’applaudis même ! Tout comme j’applaudis le fait d’avoir mis en avant Luke Cage dans sa propre série (même si elle demeure tout sauf mémorable). A ce titre, il serait plus intéressant d’oser mettre en avant ces personnages moins connus du grand public, plutôt que de changer la couleur de peau des personnages secondaires. D’autant que finalement, à quoi bon si le personnage central demeure toujours un mâle blanc hétéro ? Ca ne bouleverse en rien les codes. Mordo de Docteur Strange, Johnny Storm du reboot des FF auraient pu être joué par des esquimaux, que ça n’aurait rien changé. Pourtant avec Spiderman, Marvel/Disney aurait pu frapper fort en présentant Miles Morales, un Spiderman noir. Là ça aurait été couillu, d’oser présenter un personnage aussi iconique que Spiderman par un acteur de couleur. Mais non Marvel/Disney préfère finalement s’enfermer dans la bienpensance en nous sortant un casting made in disney. D’ailleurs, l’argument de la qualité du jeu d’acteur n’a pas lieu d’être ici, tant les personnages sont fades et lisses et tant les acteurs sont déplorables, Zendaya en tête (on se surprendrait à implorer que le Vautour lui arrache la tête). Ned leeds est un Ganke non assumé tête à claque, la caricature du meilleure copain geek dont la fonction sera de crier « Cool », «Awesome », toutes les cinq minutes. Liz Allen est un stéréotype de love interest (et sous développé par-dessus le marché) mais le summum demeure tout de même l’ami Flash Thompson. Pour rappel, le personnage est censé être la grosse brute du lycée qui te fait sentir à quel point c’est dur d’être un petit geek puceau pas le petit comique qui lance une ou deux boutades.


Le plus grand désastre demeure tout de même l’ami Peter Parker. Marvel prend ici le choix de présenter un amateur absolu, en démontrant que ce n’est pas si simple d’être un super héros. Ce choix en lui-même ne manquait pas d’originalité, sauf que bien évidemment Marvel ne peut s’empêcher de tomber dans l’excès en présentant du début à la fin un Spiderman gaffeur et con comme ses pieds avec à la clé une petite leçon de morale histoire de faire croire que le personnage a réellement muri psychologiquement. Comme absolument tout est pris à la rigolade, un vide béant traverse le film qui ne parvient ni à être épique, ni à être émouvant, ni mature, ni même drôle tant aucun personnage n’est réellement pris au sérieux et tant les situations semblent tout droit sorti d’une sitcom ( la scène de l’interrogatoire en tête de liste). Nous est finalement narré, l’histoire d’un adolescent faussement surdoué (oui parce qu’il ne suffit pas de glisser quelques scènes où il répond correctement en classe pour nous faire croire qu’il est brillant) faisant le clown du début à la fin et dont la seule motivation est d’être un avengers parce que c’est « cool ». Le pitch est d’autant plus consternant que même les figures parentales se comportent comme de parfaits abrutis. Entre une tante May Milf secondaire d’une complaisance assourdissante et un Tony Stark cynique, insupportable et désinvolte (et qui de par sa flegme pourrait même être considéré comme responsable d’une bonne partie des actions du vautour). Quand on pense au cachet que se fait Robert Downey Jr pour chaque production Marvel, on serait tout de même en droit d’attendre que son personnage grandisse un minimum.


Comme le film ne prend absolument rien au sérieux et tue dans l’œuf toute début d’émotion ou d’action épique, il s’éternise. Pas grand-chose à redire non plus sur la mise en scène très banale, la musique oubliable ainsi que la majeure partie des plans qui ne font pas rêver. A vrai dire, ce Spider man n’a rien de bien amazing, étant présenté comme un assisté ne pouvant se passer de son costume. Toute l’expérimentation des pouvoirs passent de ce fait également à la trappe. En outre, l’amateurisme de Spider man est tellement forcé qu’on se demande s’il s’agit bien du même personnage que dans Civil War. Pour rappel, il affrontait Captain America, Winter Soldier et le Faucon, tandis que là il galère contre des petites frappes dotées de matériel high tech.
La cohérence n’est également pas de mise avec des petites frappes qui créent avec de la technologie chitauri des meilleures armes que les chitauris eux-mêmes, sans se faire repérer par le Shield ou les avengers.


Le seul qui s’en tire avec une parcelle de dignité est finalement Michael Keaton qui campe un méchant plus original que la plupart des antagonistes du MCU. Était-ce par nostalgie de Birdman et Batman qu’il a pris le rôle ? Allez savoir. Un problème demeure toutefois, dans la mesure où le personnage n’est absolument pas détestable. Sans approuver ses actes qui demeurent immorals et illégals, ses actions ne sont finalement qu’une conséquence logique des actions irresponsables et quasiment fascistes du Shield et de l’ami Tony Stark (qui mériterait bien plus que lui d’aller en prison d’ailleurs). De ce fait un contraste schizophrène se crée entre d’une part un méchant plus réaliste et sérieux que d’ordinaire et un parfait gamin caricatural réfléchissant encore de façon manichéenne. En dépit de sa prestation, il n’échappe d’ailleurs pas à des scènes d’une rare absurdité comme lorsqu’il tue un sbire qui lui demande quasiment explicitement de le buter en menaçant de tout balancer à sa femme et à la police.


En somme, c’est à se demander s’il fallait réellement réactualiser le personnage au-delà de la volonté de faire du fan service grossier à l’approche d’Infinity War. Sam Raimi qu’est-ce que tu nous manque bordel !

The-Goblin
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le 25 juil. 2017

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