Pouvoirs et responsabilités

Sony et Marvel Studios, alliance improbable il y a trois ans, elle avait très bien démarré l'an dernier avec l'introduction de cette nouvelle version de Spider-Man dans Civil War, une apparition rapide qui avait permis de démontrer que Tom Holland était le casting parfait aussi bien pour Spider-Man que pour Peter Parker. Cette alliance prend une forme encore plus concrète avec la sortie de Spider-Man Homecoming, qui m'avait presque inquiété jusqu'à la sortie des premières critiques, car faut le dire, chez Sony, ils sont vraiment minables pour le marketing, entre spoiler la quasi totalité du film dans les trailers, dévoiler quelques gros caméos, et nous faire croire que Tony Stark était quasiment le personnage principal du film, ils ont du mal à apprendre de leurs erreurs sur certains points.

Heureusement, Spider-Man Homecoming est le film dont je rêvais depuis longtemps, Spidey a toujours été mon super-héros préféré, j'adore la proximité qu'on ressent avec lui, et l'évolution de sa vie, principalement sa période au lycée, et ce film est le premier à vraiment explorer cet aspect, et pas seulement à s'en servir comme un simple background. Le film passe beaucoup de temps à développer Peter et ses amis dans l'environnement lycéen, plus de temps que dans la plupart des productions super-héroïques actuelles. Jon Watts, le réalisateur, avait dit que le film était très inspiré des comédies de John Hughes, et l'hommage est extrêmement bien rendu. Avant d'être un film d'action super-héroïque, Homecoming est avant tout une teen comédie, la seule différence avec une une teen comédie de base, c'est que le protagoniste est aussi un super-héro à côté.

Au niveau du casting, on touche la perfection, Tom Holland avait montré dans sa brève apparition dans Civil War qu'il était le parfait mix entre Tobey Maguire, excellent en Peter, et Andrew Garfield, excellent en Spider-Man, et dans Homecoming il prouve qu'il a les épaules (AHAHAH LES EPAULES DE KIRA) pour porter un film aussi important, il se fond totalement dans le rôle et il est déjà à mes yeux le meilleur Spidey sur grand écran, et pourtant mon amour pour Tobey est énorme. RDJ est quant à lui dans le film pour quelques scènes à peine, contrairement à ce que laissait entendre la promotion du film, il sert de figure paternelle à Peter, mais sa présence est là uniquement pour le recadrer, et pour changer, RDJ nous sort une magnifique performance, très subtile et de façon assez surprenante, quasiment sans son humour qui le caractérise si bien. Jon Favreau de retour lui aussi dans le rôle de Happy Hogan est toujours aussi drôle, et a suffisamment de présence à l'écran pour rendre le personnage important, mais pas trop pour qu'encore une fois, le film se concentre sur Peter et son entourage.

En parlant de son entourage, Marisa Tomei en « jeune » Tante May assure et permet de donner une toute nouvelle dynamique au personnage, que ce soit par les blagues faciles sur son physique, ou tout simplement sur sa relation avec Peter, on sent moins cet écart générationnel, ce qui permet de sortir certaines dialogues plus facilement (ceux qui ont vu le film, imaginez Rosemary Harris sortir la dernière réplique de cette Tante May). J'ai aussi beaucoup aimé les réinventions d'autres personnages proches de Peter, que ce soit Ned le meilleur ami de Peter, joué par Jacob Batalon, ce personnage c'est moi au lycée, alors pour l'identification, c'est direct. Malgré les critiques « parce qu'il n'est pas blanc et musclé », Tony Revolori est un excellent Flash Thompson, personnage modernisé pour l'occasion, non ce n'est pas un Flash sportif qui va tabasser Peter, mais en revanche c'est un connard contemporain, toujours un bully, mais un bully qui va harceler Peter d'un façon différente, j'aime cette interprétation, on sent aussi que le personnage a du potentiel pour évoluer vers une personne plus agréable sans que ça ne fasse forcé. Même chose pour Liz Allan jouée par Laura Harrier, et surtout le personnage de Michelle, jouée par Zendaya, qui sort quelques-unes des meilleures répliques du film, et qui est hilarante à chaque fois. Le film réussit à rendre un hommage appuyé aux comics tout en réinventant comme il faut les personnages pour mieux coller à notre époque, tout en prenant certaines grosses libertés qui prennent à revers ceux qui connaissent bien les comics.

Et en parlant de personnage, et ça me fait vraiment plaisir de pouvoir l'appeler un « personnage », vu la médiocrité habituelle des méchants du MCU (même si récemment avec Ego et Zemo, ça a tendance à s'améliorer), le Vautour joué par Michael Keaton est absolument fantastique, très bien écrit, intéressant, on comprend ses motivations, il n'est pas cliché dans ses actions, il n'est pas méchant pour être méchant, et au contraire ses actions ont un sens « héroïque », dans sa tête du moins. Michael Keaton pue le charisme et il permet de lancer quelques-une des meilleures scènes du film. Ce n'est pas Doc Oc ou Sandman chez Raimi, mais c'est proche. A mes yeux il s'agit du meilleur méchant du MCU, avec Loki et Alexander Pierce très proches, enfin le déclic de ce côté là ? Vu les méchants utilisables pour Spidey, il y a de quoi faire en tous cas. Si les suites sont autant basés sur les personnages que celui-ci, c'est de très bonne augure.

Dans ce film, j'ai aussi aimé l'importance qu'ont les choix de Peter, et surtout que ceux-ci ont des conséquences, Peter a 15 ans et logiquement, il est immature, même en croyant faire la bonne chose, il met d'autres personnes en danger, et se retrouve dans des situations déplaisantes. Au sujet du costume, j'ai apprécié la montée progressive de l'assistanat et de la dépendance dont fait l'objet Peter vis-à-vis de ce costume tout équipé, qui peut presque tout faire à sa place, pile au moment où cette dépendance devient agaçante, le film en est conscient et joue pleinement dessus.

Concernant la réalisation de Jon Watts, à part les hommages à John Hughes qui sont bien trouvés, les scènes d'action manquent d'énergie, elles sont efficaces, mais elles n'atteignent jamais l'épique d'un Sam Raimi, notamment la confrontation finale entre le Vautour et Spidey. Cela dit, ce manque d'épique dans l'action est compensé par l'émotion, la « scène du reflet » (j'essaie vraiment de pas spoiler) est par exemple très puissante, et la tension est intense quand il le faut. Comme d'habitude, la 3D est passable, si ce n'est la scène sur le Washington Monument qui m'a foutu le vertige comme pas possible, et qui a réussi à me faire craindre pour l'avenir d'un mec qui va avoir une dizaine de films après celui-là. L'absence d'une énième origin story est aussi un gros point fort, c'est littéralement expliqué en deux phrases au milieu du film, au détour d'une conversation, et la mort d'oncle (Sean) Be(a)n n'est jamais évoquée. La composition de Michael Giacchino n'est en revanche pas très inspirée, à part l'hommage à la série, c'est basique de chez basique, et j'ai l'impression d'avoir entendu ça 1000 fois. Quitte à utiliser un truc qu'on connaît, autant reprendre le thème de Danny Elfman, qui reste parfait. Dernier point, la deuxième scène post générique est absolument exceptionnelle.

Heureusement que j'entre pas dans les spoilers, sinon je pourrais parler pendant des heures de mon amour pour Spider-Man et de mon appréciation pour cette nouvelle adaptation. Un méchant dantesque et inédit, largement au-dessus des standards du MCU, un casting au point, des scènes d'action pas nombreuses qui permettent de se concentrer plus longtemps sur les personnages, qui sont réalistes et attachants, et ne sont pas des clichés ambulants. Le film combine comme il le faut l'hommage aux comics, et la nécessité d'en moderniser certains points. Bref pour son retour à la maison, Spider-Man ne déçoit pas, et j'espère que Sony ne va pas de nouveau se chier dessus et continuer à travailler main dans la main avec notre dieu et sauveur, Kevin Feige, parce que mine de rien, leur association a très bien marché sur ce film, et à mes yeux Tom Holland est déjà le Spider-Man définitif.