Exorcisme par la danse et métempsycose taïwanaise

M'est avis que la traduction des dialogues et la relative difficulté d'accès d'une partie de la culture sino-taïwanaise rend assez peu naturelle l'adhésion à un film comme "Split of the spirit". J'ai l'intime conviction qu'une grande partie des subtilités du scénario, en lien avec la métempsycose, la possession du corps par une âme errante, et des combats macabres faisant intervenir de nombreuses thématiques mystiques, a été gommée lors du passage aux sous-titre anglais. La méconnaissance du contexte culturel précis dans lequel il s'inscrit, aussi, tend à réduire le film à une série B bizarroïde, vaguement kitsch.


Le scénario, dans son appréciation en langue anglaise, souffre en tous cas de beaucoup de maladresses d'écriture, qu'une direction d'acteur aléatoire et marquée du sceau des années 80 n'aide pas dans la constitution d'une charpente pour la narration. On suit les élucubrations de la protagoniste d'un œil distrait dans la première partie, clairement. Mais à mesure que l'on plonge dans la dimension mystique et incantatoire de l'intrigue, le film se transforme peu à peu en un conte macabre qui nous immerge dans un univers tout autre, à l'esthétique de plus en plus barrée, baroque, et (presque) envoûtante.


C'est dans la possession du corps d'une danseuse, après le meurtre d'une femme de manière particulièrement machiavélique, que la véritable curiosité naît. L'histoire de vengeance par corps possédé interposé qui suit ne brille pas particulièrement sur le plan de l'écriture mais plus dans l'ambiance qui se dégage de ce maelstrom incongru. Nécromancie, rites mystiques, croyances diverses... On se trouve plongé dans une sorte de néo-noir spirituel à la sauce taïwanaise qui trouve pour point culminant une séquence de danse en transe vraiment étonnante, très avant-gardiste, avec un trajet aller-retour sur le chemin de l'au-delà vraiment mémorable. Le choc esthétique à ce moment-là constitue le principal intérêt du film, à un moment où les forces antédiluviennes de la superstition rejoignent l'art contemporain, entre hier et aujourd'hui, entre Taïwan et Hong-Kong. Le développement de l'action se trouve largement surpassé par la touche horrifico-mystique de l'ensemble, constituant une expérience viscérale et un revenge movie singulier qui se termine sur une séance d'exorcisme artistique sidérante.

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le 16 janv. 2018

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Morrinson

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