Harmony Korine est un nom que j'entends beaucoup, ces derniers temps. Comme si tout le monde alentour connaissait par coeur l'illustre inconnu qu'il est pour moi (pour l'anecdote, il m'a même fallut chercher s'il s'agissait d'un homme ou d'une femme). Un réalisateur très connu du milieu underground new yorkais, apparemment.
Bien. Je ne le connais pas, je n'ai donc aucun à priori sur son travail et me dit qu'il faut savoir être curieux, même si la bande annonce m'annonce que je ne vais sans doute pas apprécier.

Malheureusement, au sortir de cette séance, je ne peux que me flageller moralement de n'avoir pas su écouter mon instinct. Vilaine curiosité, vilaine ! Saint-Exupéry m'avait pourtant prévenu...

Ce film est au regard acerbe sur la jeunesse de la société américaine ce qu'est Bienvenue chez les Ch'tis à la comédie, c'est dire ! ll est vide de tout, si ce n'est d'une exposition constante de paires de fesses et de seins. Du cinéma popcorn, comme on dit, qui a pourtant la prétention de servir un propos critique sur la violence, d'après ce que j'ai compris.
Korine se prend pour Oliver Stone, pour Tony Scott et pour Kathryn Bigelow. Il se veut moderne, tente une approche générationnelle, sans doute pour amener le téléspectateur adolescent à une réflexion qui entre en conflit avec son "kiff" premier (ouaaaaais, des bonnasses à la plage, qui sucent des glaces de manière suggestive, qui se touchent et qui ont l'air chaudes comme la braise. ouaaaaais, allons nous bourrer la gueule à foison et vivre pleinement notre vie, parce que les études ça craint et que la violence c'est cool, et que C'EST CA LA VRAIE VIE !) mais il se rate lamentablement là où ses prédécesseurs ont réussi.
Le réalisateur est sans arrêt en conflit avec lui-même lorsqu'il s'essaie par-ci par-là à donner du sens à son film. Rien n'est cohérent et ce surréalisme, qui pourrait être jouissif s'il était exploité de manière correcte, bascule dans le pitoyable. (Pour sa défense, il donne tout de même vie à deux ou trois scènes qui auraient mérité de constituer à elles seules un excellent court-métrage. Mais 2 ou 3 scènes, c'est peu.)
Là où Tueurs-Nés, True Romance et Strange Days opèrent une critique (imparfaite) de la société, tant subtile que ludique, et vous entrainent dans les méandres du romantisme morbide, Spring Breakers tourne au ridicule. Il s’appesantit sur ses effets de style, qui ne sont là que pour combler un manque de scénario évident. Le choix même de la réalisation, qui se veut "complexe" au travers d'un méli-mélo de scènes croisées, de doubles points de vue, et de flash-back/flash-forward, est d’une lourdeur sans pareille ; ne fait que me conforter dans l’idée que Korine n’a aucun regard à nous proposer.
Il s’y essaie pourtant, en ne faisant que copier à outrance. James Franco (qui sauve quelques scènes) n’innove pas, il pique tout à Gary Oldman interprétant Drexl. Les actrices ne jouent pas, et malgré un ou deux moments de grâce, elles ne sont là que pour satisfaire l’œil lubrique de tout hétérosexuel qui se respecte. Elles ne semblent même pas être conscientes de desservir le propos tant elles sont caricaturales, inconsistantes et incohérentes.

Là où Sexcrimes avait réussi à m’émoustiller, car il a au moins le mérite de développer un scénario et des personnages, le "kiff" de Spring Breakers m’a complètement échappé. Un threesome dans une piscine, déjà vu. Un mec mimant une fellation sur le canon d’un flingue, déjà vu. Déjà vu, déjà vu, déjà vu…et si le déjà vu ne me dérange pas lorsqu’on se l’approprie d’une manière que je juge intéressante, ça n’a pas été le cas ici. Il faut croire que je ne suis pas vraiment de la génération Britney, après tout.

D’aucun disent qu’il est facile de critiquer lorsqu’on reste assis chez soi, derrière son écran d’ordinateur. Il est donc facile pour moi de juger et de condamner ce film qui est catastrophiquement mauvais et vide. Mais si j’avais eu la volonté de me frotter à ce genre de réalisation, jamais je ne me serais accordé le passage à l’acte avec si peu de matière. Regardez Les Anges de la Réalité, ça coûtera toujours moins cher qu’une place de cinéma et vous abrutira tout autant…
1 point accordé à la BO
Black_Snape
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le 14 mars 2013

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Black_Snape

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