Précédé de sa réputation sulfureuse Spring Breakers marque un nouvel aboutissement formel dans la carrière du terrible Harmony Korine. Auteur des géniaux Gummo et Julien Donkey-Boy mais aussi du traumatisant Trash Humpers le cinéaste underground n'a eu de cesse de dépeindre des personnages limites et marginaux, des freaks ou bien des punks décérébrés... Aux antipodes d'un certain puritanisme trop souvent présent dans le Cinéma Américain Spring Breakers se penche, non sans une certaine complaisance, sur un quatuor de jolies pépées bien décidées à vivre l'aventure de leur vie : un séjour en forme de spring break sur la côte floridienne. S'ensuivra un dérapage moral un peu trop énorme pour convaincre totalement, mais loin d'être inintéressant car à contre-courant des attentes du public...


Plus calibré que ses films antérieurs mais non moins indépendant pour autant Spring Breakers s'affiche d'emblée comme un trip cinématographique, clinquant jusqu'au racolage et séduisant jusqu'à l'indécence. Formellement ampoulé le film bénéficie d'une bande originale en parfaite adéquation avec son sujet, et de la photographie de grand Benoit Debie ( qui livre peut être là son chef d'oeuvre, rinçage de rétine particulièrement efficace ). Un sommet d'esthétisme bandant ainsi qu'audacieux, nous plongeant aux côtés de ces quatre jeunes étudiantes souhaitant se sentir exister et du gangster Alien ( James Franco, impeccable ), ersatz grotesque de Scarface réduit à sa fascination pour le cul, le fric et les braquos.


C'est du reste là que le scénario de Spring Breakers s'avère le plus intéressant : dans le traitement du personnage d'Alien, irrésistible trou du cul étonnamment attachant dans sa bêtise et ridicule jusque dans sa manière d'en finir avec la vie... Si le script demeure un tantinet bâclé car trop abrupt dans ses enchaînements le montage réserve quelques très belles audaces narratives, mélangeant flashbacks et flashforwards tout en masquant la pauvreté relative du scénario. Quant à Korine et Debie ils subliment chaque bikini, chaque corps et chaque néon fluorescent, transformant cette escapade cauchemardesque et poème white trash saisissant. On pardonne sans mal les excès du cinéaste et du chef opérateur tant leur indiscutable maîtrise s'affirme telle une évidence à nos yeux, même si l'on aurait aimé davantage d'étoffement sur le plan de l'intrigue. Beau et courageux.

stebbins
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le 13 juil. 2015

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