Comme pour tout épisode de la prélogie, il faut prendre en compte la différence générationnelle pour en comprendre la réception.


Après des années d'attentes, de teasing, d'expansion de l'univers Star Wars, les fans ayant grandi avec la saga n'ont pu qu'être infiniment déçu de The Phantom Menace. Film d'aventure grand spectacle à l'univers visuel agréable, il a pu toutefois être apprécié de la nouvelle génération.


Mais toutefois, tout n'était pas perdu. L'Episode 1 était une mise en bouche, un épisode coloré, avec de l'action dynamique, mais aussi une mise en place des bases de l'histoire. Anakin Skywalker venait d'être proclamé padawan. A partir de là, le plus important restait à écrire. L'essentiel de la série se trouvait ici.
Après tout, The Empire Strikes Back n'avait-il pas été plus noir que son prédécesseur, devenant soudainement plus adulte ? Est-ce que le même sort pouvait être espéré avec l'épisode 2 ?


A l'impossible nul n'est tenu, et certainement pas George Lucas. Si les fans les plus courageux avaient pu remettre de l'espoir en cette prélogie, ils ont tous du vomir dans leur cornet de popcorn.
Toutes les attentes sont ici dévastées. Anakin Skywalker a le traitement le plus bâclé possible. Tout d'abord son choix de casting a été nettement décrié. Christensen ne dégage pas la classe que devrait avoir Dark Vador, il n'a rien. Il ne joue pas mal, mais il ne joue pas bien. Peut-être même ne joue-t-il même pas. Ah... ce qu'on regrette qu'Heath Ledger ait refusé le rôle car il ne voulait pas jouer sur fond vert... (véridique). Si c'était pour mourir à 28 ans, il aurait pu au moins se sacrifier un peu, non de non ! Mais bon, c'est pas le propos.


Je ne répéterai pas les propos de mes confrères, déferlant leur haine sur ce pauvre Hayden, car à mon avis ce n'est pas lui qui doit être incriminé. Christensen joue finalement bien le personnage qu'on lui demande de jouer. C'est-à-dire un personnage aussi caricatural qu'insupportable. George Lucas ne fait preuve d'aucune finesse psychologique dans l'écriture de ses personnages, et cela transparait dans l'écriture du personnage d'Anakin Skywalker lors de cet Episode 2. L'écriture est vide. Vide de toute profondeur, quelle soit émotionnelle ou dramatique. Parfois, souvent même, on dirait qu'il s'agit d'une fanfiction adolescente.
Alors je pense que Hayden Christensen joue parfaitement bien le rôle qu'on lui demande de jouer. Sans doute que si les ambitions de Lucas avaient été autres, un acteur différent aurait été choisi à sa place. Mais pour ce qu'il souhaitait faire d'Anakin, Christensen en était l'incarnation idéale.
Quelque part, ça valait peut-être mieux pour Heath d'avoir refusé ce rôle.


Et quand on prend en compte la saga dans son intégralité, l'écriture d'Anakin Skywalker dans cet opus tient véritablement du scandale. Ce film était censé nous présenter celui qui allait devenir Dark Vador... Et George Lucas a choisi de le dépeindre en ado true-rebel, tellement cliché et insupportable qu'il correspond davantage à un gamin de treize ans en pleine crise d'adolescence qu'à un jeune adulte de dix-neuf ans.
Qu'il fait peine à voir, Dark Vador.


Pour ne rien arranger, l'écriture de Lucas nous laisse pleinement savourer l'une des histoires d'amour les plus pathétiques du cinéma. Rien, absolument rien, ne définira l'amour des deux personnages. Rien ne naît entre eux. Rien ne grandit. Ils ont deux scènes ensemble avant d'être amoureux. Cette histoire d'amour est absolument tronquée. Les dialogues sont d'un ridicule édifiant (la déclaration d'amour de Padmé atteint des sommets d'incrédulités. Tellement niaise et faussement poétique à en vomir des papillons que Anakin lui-même répond " What are you talking about ?").
L'ensemble va beaucoup trop vite, les dialogues n'ont aucun sens, et on n'y croit pas une seule seconde. Alors que, bordel, cette histoire c'est pourtant le coeur de l'enjeu tragique de cette prélogie. C'est ce qui donne à l'arc d'Anakin une allure de tragédie Grecque. J'aime beaucoup l'idée initiale, faire du plus grand méchant du cinéma un romantique désabusé pour mieux retourner cette fragilité contre lui-même... Mais l'exécution est navrante de stupidité.
Les deux pauvres acteurs, perdus dans la vacuité de leur texte, récitent leurs lignes sans y croire en se forçant presque à s'embrasser... Mais qui pourrait leur en vouloir ? Moi-même, face à Natalie Portman dans cette situation, je n'aurais pas été chaud pour l'embrasser (enfin...). On est terriblement loin de l'histoire d'amour entre Han et Leila.


Le seul passage fort et puissant d'Anakin est celui où il va chercher sa mère. Mais encore une fois, Lucas tronque toute once de cruauté. Pour épargner nos yeux sensibles, peut-être ? Quoi qu'il en soit, ce passage constitue le seul où, dans l'écriture, on décèle celui qui deviendra Dark Vador... Mais tout l'impact dramatique de cette scène est tué par la réalisation. Cette scène n'était pas lambda, c'était également une pièce maîtresse de cette trilogie, il ne fallait pas nous épargner. Cette haine, cette douleur, cette violence inouïe, il fallait qu'on la ressente. Triste échec, malheureusement.


Le reste du film se base sur les enjeux de la Fédération et des Jedis, des enjeux qui manquent de clarté et qui ne sont guère passionnants. Honnêtement, je ne sais pas si on ne comprend ou si c'est juste qu'on s'en fout. Il y a en effet la guerre, elle a été amorcée à la fin du film précédent... Mais en ressent-on une seule fois les enjeux ici ?
C'est pourtant le seul scénario de cette prélogie qui justifie toutes les batailles. Mais puisque cette prélogie est coincée entre le fait de raconter l'histoire d'Anakin et celui de l'arrivée au pouvoir de l'Empire Galactique, il ne trouve guère le temps de développer les intrigues menant à ces différents éléments.
On préfère, en revanche, nous abreuver de fan-service ! Pour que les fans se sentent dans le même univers, il faut bien ça. Les stormtroopers apparaissent et... ils sont en fait des clones ! Des clones de Jango Fett ! Boba Fett est d'ailleurs un clone lui aussi. Mais ouaw, c'est super génial ! Au fond j'aime bien cette idée mais elle parait affreusement opportuniste puisqu'elle ne débouche sur aucun traitement sur le personnage de Boba Fett, et n'amène donc rien à la saga Star Wars.
Faut-il donc rappeler une nouvelle fois que ce film/cette prélogie est mal écrite ?


Et pourtant, malgré toute la haine que je viens de déverser et qui m'apparait plus que légitime, je dois avouer que mon visionnage ne fut pas si déplaisant que cela. Sans doute parce que, la dernière fois que j'avais vu le film, sa médiocrité m'avait tellement choqué que j'attendais à présent de lui une bouse insupportable. Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant que, sur bien des aspects, cet Episode 2 est meilleur que le premier !
Pour commencer, George Lucas témoigne d'une maîtrise beaucoup plus soignée de sa caméra. On ne criera absolument pas au chef d'oeuvre, mais celle-ci est beaucoup plus dynamique et donne une énergie à l'action dont étaient privées quasiment toutes les scènes de la Menace Fantôme. En outre, le montage et le screenplay de manière générale laissent beaucoup plus de temps aux scènes d'exister, il n'y a pas des coupures inopportunes qui viennent ternir profondément l'appréciation des scènes. Non, à ce niveau là, c'est plutôt réussi.


En outre, même si l'histoire raconte très mal les différents enjeux qu'elle présente, on a au moins cette fois-ci l'impression qu'on nous raconte quelque chose. Un des plus gros défauts de l'Episode 1 à mes yeux était d'avoir à la fois un rythme plat et une histoire brassant constamment du vide. L'Attaque des Clones, quant à lui, ne brasse jamais de vide et est toujours en train de nous raconter quelque chose d'intéressant pour la saga Star Wars. Mais il le fait tout le temps mal. C'est un problème à ne pas négliger.


Malgré tout, en oubliant Anakin que je ne peux pas encadrer et en m'intéressant principalement à la quête d'Obi-Wan, j'ai pris plaisir à redécouvrir ce second opus sous un jour un peu moins négatif. En débranchant notre cerveau et en faisant fi de toutes les aberrations qui ponctuent le récit, cet épisode passe comme un divertissement loin d'être dégueulasse. Dommage que l'orgie visuelle finale, pourtant sympathique dans l'idée, ne profite d'aucune mise en scène ni d'intensité scénaristique.


Mais ces bons points sont vite oubliés lorsque l'on prend du recul sur ce film et qu'on réalise, avec tristesse et désespoir, qu'il s'agit en réalité d'un véritable scandale. Un film d'une telle ampleur, faisant partie d'une telle saga, ne devait pas se satisfaire d'une écriture aussi creuse, aussi profondément clichée, passant à côté de tous les enjeux sans réussir à en développer d'autres véritables. S'il n'avait pas fait partie d'une aussi grande saga, ce film n'aurait jamais été retenu autrement que pour certains paysages.


Pour revenir au problème de la différence de génération, les jeunes spectateurs ont échappé au pire, eux, n'ayant pas la même attente. Je faisais partie de ceux-ci et, dans les cours de récré, toutes les filles adulaient cet Anakin insupportable, tel le Edward Cullen des années 2000, et tous les garçons n'évoquaient que ce combat badass de Yoda qui nous a tous cloué à notre siège.


Si les plus jeunes peuvent l'apprécier, je pense que la nostalgie a beaucoup moins d'impact sur cette jeune génération avec ce film qu'elle n'en a avec les épisodes 1 et 3. Celui-ci, à part l'histoire d'amour qui réveillera des souvenirs rêveurs chez certaines demoiselles, n'a jamais été très marquant. Tout juste était-il sympathique et éblouissant visuellement lors de son contexte de sortie. Parfois, il n'en faut pas bien plus.


Mais ce n'était pas un film sympathique qu'il fallait. Il fallait un Star Wars. Un Star Wars qui prenne en main son scénario, et qui nous lance vers l'arrivée de Dark Vador. La marche, ici, a clairement été loupée. Ce traitement scénaristique impactera d'ailleurs beaucoup l'épisode 3 qui devra rattraper toutes les fautes de celui-ci.

Créée

le 13 oct. 2012

Critique lue 2K fois

21 j'aime

11 commentaires

Critique lue 2K fois

21
11

D'autres avis sur Star Wars - Épisode II : L'Attaque des clones

Du même critique

Drive
GagReathle
8

You're driving me crazy

Lors de mon premier bout de chemin avec Drive, je n'avais pas été totalement satisfait du voyage. Malgré de sérieux arguments, il n'avait pas su me conduire au septième ciel. Pourtant, au départ,...

le 26 mars 2014

184 j'aime

35

Interstellar
GagReathle
8

Le vrai problème d'Interstellar.

J'ai lu bon nombre de critiques sur le dernier film de Christopher Nolan et j'ai pu ainsi constater que beaucoup de détracteurs s'appliquaient à chercher les moindres défauts du film, les moindres...

le 20 nov. 2014

132 j'aime

55

Fight Club
GagReathle
9

Il est temps d'enfreindre les deux premières règles

Objet d’un véritable culte, Fight Club a marqué les esprits de nombreux spectateurs et a su s’imposer en tant que film quasi-ultime auprès de toute une culture. Du moins, c’est ainsi que je l’ai...

le 27 août 2014

125 j'aime

24