Critique de la Prélogie, épisodes I, II, et III


C’est finalement la sortie de l’épisode VII qui me pousse à poster un billet que je pensais ne jamais rédiger, de peur qu’il ne se noie dans la troicentaine d’autres critiques déjà disponibles sur le site. Mais tant pis. Car après avoir revu toute la saga mainte fois, toujours le même constat : j’adore ! J’aime la Trilogie originale, certes, mais également cette Prélogie tant dépréciée, dont un plaidoyer des trois épisodes s’impose.


Et histoire de changer un peu, je décide de ne pas revenir sur les habituelles controverses des trois films, de ne pas expliquer pourquoi Jar Jar, bien que dispensable, ne m’a pas plus gêné que les Ewoks de l’épisode VI, pourquoi Hayden Christensen souffre d’un rôle mal écrit plus que d’une absence de talent, pourquoi les midichloriens sont avant tout un faux débat… Bref, de ne pas expliquer pourquoi certains ont tort de détester la Prélogie, mais plutôt pourquoi les autres ont raison de l’aimer.


Parce que la Prélogie n’est ni plus ni moins que le Big Bang de l’univers Star Wars. J’adorais la Trilogie originale évidemment, mais j’en gardais toujours une petite frustration : cette sensation d’un monde extrêmement dense mais dont on ne percevait qu’une infime partie, qui plus est un peu terne. La Menace Fantôme, puis ses suites, ont contribué à l’expansion brutale de cet univers, nous livrant un monde que l’on découvre peuplé d’armées droïdes, de planètes variées dont la capitale galactique Coruscant, la Trantor de George Lucas, mais aussi et surtout un monde qui a connu l’âge d’or d’une caste qu’il me tardait de découvrir : celle des Chevaliers Jedi. Et rien que pour le développement de ce vaste univers, la Prélogie vaut le coup d’œil.


Alors il y a des maladresses, mais quand je regarde un de ces épisodes, la magie opère et je crois en ce monde. La Prélogie est dotée d’une réelle ambiance qui constitue l’essence Star Wars, qui donne une âme à la saga et qui la distingue d’autres films de SF qui n’ont pas une identité aussi forte. Au même titre que les deux soleils de Tatooine, la Cité des Nuages de Bespin ou la mythique Etoile Noire, la cité Gungan de Naboo, le monde-océan Kamino et le temple Jedi sont autant de lieux qui surgissent dans mon esprit quand j’entends « Star Wars ». Difficile donc de nier la marque qu’a laissée la Prélogie dans l’imaginaire commun.


Difficile également d’oublier les scènes marquantes de ces trois épisodes qui n’ont pas à rougir de celles de la première Trilogie : la fameuse course de pods, le duel de Qui Gon et Obi Wan contre Maul, la course poursuite avec Jango Fett dans la ceinture d’astéroïdes, Yoda croisant le fer (ou plutôt le laser) pour la première fois à l’écran, le plan séquence d’ouverture de l’épisode III, et évidemment les points culminants que sont l’exécution de l’Ordre 66 et la naissance de Vador ! Alors on peut toujours se focaliser sur les choses qui fonctionnent moins bien, mais elles n’enlèvent rien aux fulgurances de la Prélogie. Les adieux d’Anakin à sa mère, son retour sur Tatooine et le massacre des Tuskens, le dépit d’Obi Wan regardant son apprenti mourir devant lui... voilà des scènes d’une charge émotionnelle forte, qui n’ont rien à envier à celles de la Trilogie originale.


Enfin, j’aime la Prélogie pour son scénario largement occulté des critiques. Parce que raconter le combat d’une faction rebelle contre un Empire Galactique, c’était sympa, mais nous montrer le déclin d’une démocratie se transformant en dictature au fil de subtiles machinations politiques, qui plus est du point de vue de personnages qui ne voient pas le coup arriver, voilà un défi autrement plus ambitieux ! C’est là toute la force de la Prélogie qui montre aux spectateurs, qui sait ce qu’il adviendra par la suite, ce que les personnages ne peuvent pas voir : la corruption et la chute d’un système entier. Ainsi, on assiste au déroulement méticuleux du plan de Palpatine :


Episode I : il provoque le blocus de Naboo pour forcer une motion de censure à l’encontre du Chancelier Valorum et prendre sa place.
Episode II : il charge le Comte Dooku de rassembler une armée séparatiste, créant une situation de crise pour que le Sénat lui octroie les pleins pouvoirs, justifiant l’existence d’une armée de clones de la République.
Episode III : Palpatine parvient à faire des Jedi des ennemis de la République en simulant un complot de la caste de Chevaliers et proclame l’avènement de son nouvel Empire.


« Ainsi s’éteint la liberté, sous une pluie d’applaudissements. »


George Lucas est loin d’être un escroc ou un imbécile, et si son écriture laisse parfois à désirer, il fait preuve d’un véritable sens narratif en nous servant un propos plus complexe qui n’est pas sans rappeler une période bien connue de notre Histoire. Il nous livre un plan qui se déroule sur plus d’une décennie, et auquel l’Empereur intégrera un élément crucial de son ascension et de sa chute : Anakin Skywalker.


Comment parler de la Prélogie sans mentionner ce nom ? On le sait depuis les trois premiers opus : Vador fut un puissant Jedi ! Un jeune homme talentueux et arrogant, mais aussi naïf et fragile, un homme formé trop tard et ayant la lourde tache de satisfaire à une ancienne prophétie. Le mythe de Vador est-il juste celui du plus grand vilain de tous les temps ? Surement pas. C’est bel et bien le mythe d’un homme déchu, d’un homme bon, qui souhaite sauver ceux qu’il aime, qui souhaite la paix, mais qui, en poursuivant ses idéaux se trompe de moyen. L’enfer n’est-il pas pavé de bonnes intentions ?


Finalement, la Prélogie a le mérite de nous présenter le vaste univers de Star Wars avant l’avènement de l'Empire, de nous servir une intrigue enfin digne d’intérêt, et surtout de mettre en avant le seul véritable héros de cette saga : Anakin Skywalker. Et finalement, elle ne s’en sort pas si mal avec de telles ambitions.


Alors, il ne s’agit pas pour moi de clamer que la Prélogie est le plus grand chef d’œuvre jamais conçu, ni même qu’elle est meilleure que sa grande sœur. Elle manque parfois de subtilité, en particulier dans ses dialogues, et elle comporte son lot d’imperfections, tout comme la Trilogie originale d’ailleurs. Mérite-t-elle pour autant le bashing systématique dont elle fait l’objet ? Rien n’est moins sûr. Pas de ton polémique dans cette critique, mais je crois qu’il serait temps d’admettre que la Prélogie est loin d’être l’abomination pour laquelle on voudrait la faire passer. Elle a des défauts qui se sont sans doute heurtés à de fortes attentes, mais aussi des qualités qui ont fait d’elle un mythe cinématographique qui a marqué son public. Pas de quoi la haïr donc.


D’ailleurs, la haine ne mène-t-elle pas au côté obscur de la Force ?

Gilraen
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le 13 janv. 2016

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Gilraën

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