La (nouvelle) conclusion épique de la grande Saga des Skywalker. La fin de la fin cette fois-ci, le bout du bout. Et ce qui en ressort principalement, c’est effectivement cette impression de conclusion où on essaye de tout fourrer pour rattacher les trois trilogies. On y retrouve pratiquement tout le monde, on retrouve Tatooine, on y retrouve tous les principaux thèmes et on retrouve notre cher Palpatine, après avoir joué avec le Côté Obscur pour s’en sortir. Mais au final, ce gloubi-boulga ne prendra pas vraiment. À l’image du film dont il essaye de puiser ses racines, à savoir Le Retour du Jedi, L’Ascension de Skywalker s’avérera bien en-dessous de ses prédécesseurs. Certes, pour des raisons différentes, mais le fait est là.


Le principal défaut du film est sa structure narrative : c’est un cafouillis sans nom qui, bien que gardant une simple ligne narrative cette fois-ci, se perd dans des intrigues et des personnages secondaires qui n’apportent rien à l’histoire. Pire, le trio qu’on nous présentait comme le relève ne prendra au final pas : la dynamique entre Rey, Finn et Poe ne fonctionnera jamais. La première est trop occupée dans sa quête personnelle avec Kylo, le second se retrouve à nouveau dans le rôle du bouche-trou qui porte la chandelle sans gagner en profondeur et le dernier fera décoration. Même la bromance entre Finn et Poe ne prend plus. C’est vide. Chewbacca se retrouve catapulter dans le rôle de sidekick, C3PO et BB-8 se contentent d’être présents, Lando apportera une petite touche nostalgique sans plus, Rose viendra faire de la figuration. Et on a deux nouveaux personnages, Jannah et Zorri qui… n’apportent rien.


Ils auront réussi à intégrer Leia de façon surprenante, même si du coup, on sent clairement que son rôle et son poids dans l’intrigue est très fortement diminué. Mais c’était touchant de la voir une dernière fois et dans un ultime sacrifice


(et Chewie a enfin sa médaille !!). Luke et Han viendront faire également coucou, dans des scènes assez intéressantes car un peu symétriques l’une de l’autre, j’ai trouvé que c’était pas mal ces petits moments.


Quant à la dynamique entre Rey et Kylo… C’est contradictoire. Dans le sens où c’est sans doute la seule relation qui fonctionne plutôt bien dans le film, mais elle est ridicule et sa conclusion est risible et totalement à l’ouest. C’est dire le niveau de l’écriture des personnages sur ce film. Chacun des deux suit une sorte de nouvelle quête initiatique, mais l’écueil sur lequel ils tombent, c’est que Abrams et Terrio ont décidé de n’en faire qu’à leur tête. Sous le couvert d’accepter le nouveau statut quo établi par Les Derniers Jedi (de façon très discutable puisque remettant en cause l’idée fondatrice même du film mais également sans tenir compte de l’évolution des personnages autres que Rey et Kylo), les deux comparses ont décidé de mettre en un seul épisode toutes les idées qu’ils avaient eues pour les épisodes VIII et IX.


Ce qui donne au final un film brouillon, au rythme effréné et dans lequel, pourtant, il ne se passe presque rien pendant les deux premiers actes, justement parce qu’on ne prend pas le temps de se poser et d’approfondir les idées avancées et les dynamiques entre les personnages, quand tout n’est pas hyper-prévisible. Exemple tout bête :


quand Rey pense avoir tué Chewie, à aucun moment je n’y ai cru parce qu’il me semblait qu’on avait déjà vu deux vaisseaux justement… donc l’effet dramatique perd de sa force ; mais maintenant, je me demande si je n’avais pas anticipé justement le fait que les Chevaliers de Ren avaient trompé les personnages.


Les Chevaliers de Ren justement : un autre exemple d’une de ses idées qu’Abrams voulait mettre en avant mais n’a pas approfondi, les rendant plus inutiles que de ne pas les mentionner du tout. Je veux dire, même à la fin, il n’y a rien qui se passe entre eux et Ben, alors que c’était censé être leur leader, le type qui les a formé et entraîné… Bah non, rien, juste un combat de quelques secondes et basta, ils sont éliminés en hors-champs. Ou encore mieux, notre cher Général Hux,


réduit au rang de running gag avant d’être éliminé sans cérémonie parce que devenu complètement inutile, voir même superflu à l’histoire.


Sans doute l’un des pires personnages de l’histoire de Star Wars et l’un des plus mauvais développements de personnage au cinéma, l’exemple même de comment il ne faut pas construire et écrire un personnage. Pourquoi ne pas avoir introduit le Général Pryde dès le départ dans ce cas ?


Et que dire de la révélation du film : Palpatine est vivant et était dans l’ombre du Premier Ordre depuis le début, manipulant Snoke dans l’ombre… Genre l’absence de surprise. Alors oui, les bande-annonces nous avaient annoncé son retour, mais d’un côté j’avais déjà avancé à l’époque de l’épisode VII que Hux aurait pu être un clone de Palpatine et plusieurs théories avançaient que Snoke était un clone ou une manipulation génétique de notre cher Empereur. Bref, rien de nouveau sous le soleil donc. Donc Palpatine est là et, plutôt que de retomber dans l’écueil d’une nouvelle Étoile de la Mort (qui aura quand même droit à son caméo dans ce qui est sans doute ma partie préférée du film), a décidé de créer une armée gigantesque avec des canons destructeurs portatifs… Bref, là aussi rien de nouveau, d’autant plus que la faiblesse est vite identifiée et que la flotte ne posera pas vraiment de soucis.


Le plan de Palpatine ne change pas beaucoup non plus, restant dans la même rengaine que pour l’épisode VI. On pourra toutefois créditer le film de dresser enfin le portrait d’un Empereur terrifiant. Que ce soit l’atmosphère d’Exegol, baignant dans l’emprise Sith, le design de l’Empereur, son discours, ses pouvoirs… Pour la première fois en 9 films, Sidious commence à faire peur, vraiment peur. Cet côté sombre, ténébreux, emprunts de mystique et de rituel presque satanique est sans doute le meilleur aspect du film. Même si du coup, on se demande


pourquoi Sidious n’a pas attaqué lui-même la flotte Rebelle dans Le Retour du Jedi, vu ce qu’il est capable de faire avec la foudre Sith (visuellement, la scène nous laisse sur le cul).


Toutefois, on reviendra vite aux bases, avec la tentative de corruption de Rey.


Ce qui nous amène au point suivant :


donc Rey est une Palpatine… Ok. Donc outre le fait de détruire l’une des idées fondatrices du précédent opus, cette révélation semble sortie tout droit d’un délire de fan. Ce qu’est Abrams, certes. Mais clairement, on a l’a le plus bel exemple de la précipitation de l’intrigue de deux films en un. Car on sent très bien que c’était la révélation qu’Abrams avait réservé pour l’épisode VIII, pour contrebalancer/copier/rendre hommage à celle légendaire de L’Empire contre-attaque. Sauf que Johnson en a décidé, à raison, de faire autrement, mais qu’Abrams n’a pas voulu laisser tomber et donc nous force l’idée dans cet ultime opus, sans aucune explication ni logique.


Que Rey soit une Palpatine, soit. C’est une idée bof, mais on peut l’accepter. Mais l’explication donnée ? Elle est foireuse, dès le départ. À aucun moment il n’y a de sens que Palpatine ait un fils : de où ? comment ? avec qui ? Parce que la chronologie est assez claire à ce sujet : si fils il y a eu, il est né et a été élevé sous l’Empire. Donc de qui Palpatine s’est entiché ? On le sait : personne, car comme toutes les personnifications du mal, il est incapable de ressentir l’amour. Donc, de toute évidence, c’est une manipulation à un niveau, et dans ce cas, comment expliquer que le fiston se la soit jouer rebelle contre son papounet ? Est-ce pour illustrer, comme avec Rey, que notre destin n’est pas lié à notre sang mais aux décisions qu’on prend ? Autant avec Rey, le message passe plutôt bien et ça sera sans doute le seul qui fonctionnera dans le film, puisque plus ou moins dans la continuité du précédent opus, autant dans le cas du Palpatine Jr… ça sort de nulle part, ce n’est pas introduit, ça n’a aucun sens. D’autant plus si Palpatine était toujours « en vie » tout ce temps et jouait dans l’ombre. Puis le gamin qu’il manipule insensible à la Force ? Non, ça n’a aucun sens…


Sans doute qu’il faudrait que je revoie le film au calme un jour, attendant de voir si Disney et Abrams sortiront la demi-heure manquante dans une version longue du film… En attendant, ce point-là du film n’a aucun sens par rapport à ce qui avait été développé. Certes, on arrive au même endroit dans la quête initiatique de Rey, même si je trouve très dommage qu’elle prenne le nom de Skywalker, mais j’imagine parce qu’Abrams voulait rester sur l’idée qu’il fallait qu’elle soit d’une grande lignée ; alors que si elle se présentait juste comme Rey, ça aurait renforcé l’idée développée par Johnson et aurait été, à mon sens, bien meilleur. Et c’est d’autant plus dommage, parce que je trouvais justement que lors du duel final, lorsque Rey décide de couper tous liens avec Palpatine (cette scène est vraiment super), ça aurait plus d’impact si, justement, elle soulignait le fait qu’elle décide d’exister par elle-même.


Quant à la dynamique entre Rey et Ben/Kylo…


Bon, autant ça aura été l’un des rares points conservés entre les épisodes VIII et IX, mais bordel que sa conclusion est niaise et complètement foireux. Alors autant, le coup du « soin de la Force » qui permet de soigner les pires blessures, pourquoi pas. Abrams nous l’introduit en amont, ça semble certes overcheaté, mais ça n’a rien d’illogique. Par contre, le coup de « je t’empale / je te sauve / moi aussi »… voilà quoi, c’est complètement surfait. Surtout que l’évolution de Kylo revenant vers Ben est intéressante, mais là aussi elle semble précipitée comme si le personnage évoluait sur deux films au cours d’un seul.


Et lorsqu’il est de nouveau Ben, il perd rapidement de son intérêt ou même de son utilité : il n’est là que pour sauver Rey, quitte à se sacrifier, et l’embrasser… Je ne sais pas, ça me paraît déplacé, faux, maladroit, superflu. Non seulement c’est téléphoné, mais c’est mal exécuté : il n’y a pratiquement plus de ligne de dialogue entre eux après leur affrontement sur la lune forestière d’Endor. Alors certes, l’idée qu’il y ait une complicité qui fonctionne sans parole, c’est vraiment cool, mais une amitié peut fonctionner ainsi également, alors pourquoi avoir transformer ça en romance ? Bref, pour le coup, c’est vraiment très mal dosé et vient plomber un final qui avait le mérite d’enfin lancer l’intrigue (car là, pour le coup, il n’y a plus de réelle précipitation, l’intrigue est beaucoup moins chaotique malgré le déluge d’action).


Très rapidement, pas grand-chose à reprocher sur le casting. Chacun fait son taff du mieux qu’il peut. Sans doute Adam Driver sera celui qui m’aura le plus convaincu, notamment dans l’évolution de son personnage. Ian McDiarmid restera fidèle à lui-même, dans ce qui est sans doute l’une de ses meilleures interprétations du personnage (même si c’est très expéditif). J’ai beaucoup aimé Richard E. Grant aussi, il y avait quelque chose dans sa stature et son regard qui rendait son personnage intéressant.


Techniquement, un peu plus de réserve. Alors je ne vais pas critiquer la musique de JW, parce qu’au final ça se constituera d’un énorme best-of des thèmes emblématiques des trois trilogies, même s’il y aura une nette préférence donnée à l’originale et la nouvelle (et qu’on pourra regretter l’absence de Duel of Fates, je l’anticipais beaucoup lors du duel final, avec limite l’assemblée Sith jouant les cœurs). Et on aura, il me semble, la première utilisation du thème central au court d’une bataille, ce qui lui donne une saveur particulière. Bref, la BO renforcera ce côté un peu nostalgique de la conclusion de la trilogie des trilogies.


Sur le reste, pas grand-chose à redire : décors superbes, effets spéciaux toujours au poil (j’ai beaucoup apprécié que le serpent sous-terrain soit un animatronique) et la mise en scène d’Abrams jouera toujours aussi efficacement sur un visuel qui marque, même si pour le coup, je préfère quand même le travail fait pour l’opus précédent.


Star Wars : L’Ascension de Skywalker sera donc une demi-déception. Parce qu’en soit, le film est sympa et il apporte une belle conclusion à l’ensemble de la saga ; mais encore plus que les précédents, il est perclus de maladresses et de précipitations qui empêchent de profiter pleinement du spectacle et de se laisser porter par l’intrigue. Je comprends les retours mitigés et je les rejoins donc, me disant que même si on n’aurait sans doute pas eu Les Derniers Jedi, il aurait peut-être mieux valu qu’Abrams s’occupe seul de la trilogie. Plus de la frustration qu’une déception, je pense.

vive_le_ciné
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le 14 janv. 2020

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