Star Wars, ses personnages emblématiques, son esthétique qui sent bons les années 70, son univers riche, qui nous happe et nous transporte, ses stormtroopers et leurs armures d’un blanc immaculé (plutôt cheaps avouons-le), ses vaisseaux cultes, sa spiritualité, son concept de la « force », sa tragédie familiale, ses sabres lasers. Bref, un univers puissant, étendu et débordant de bonnes idées.


On ne reviendra pas sur l’achat de Lucasfilm par Disney, qui a fait couler beaucoup d’encre et qui est à l’origine de réactions particulières idiotes pour cause d’ignorance aiguë depuis 2012. Certains ont tendance à oublier que Disney c’est aussi Pixar, ou encore Marvel. C’était également Miramax, jusqu’en 2010. La compagnie veut ratisser large et par conséquence croit par acquisition. Parenthèse fermée.


Cette suite, personne ne l’attendait. La fin du sixième épisode était synonyme de happy end, avec la mort de Palpatine, la rédemption de Dark Vador et donc la chute de l’Empire. Après des larmes fanatiques, il était temps de faire le deuil d’une saga mythique. C’était sans compter sur la volonté de Disney de renflouer ses caisses, notamment après l’échec cuisant de Jonh Carter, ayant causé une perte sèche de 200 millions de dollars.


Et puis l’attente. Un attente insupportable pour certains, presque anxiogène, sans commune mesure avec d’autres sorties ayant eu lieu cette année, jouant également la carte de la nostalgie d’un univers que l’on pensait ne jamais revoir dans les salles obscures (au hasard Jurassic World, Mad Max ou encore Terminator). Tout aussi angoissante que pleine d’espoir, cette attente a également été l’occasion pour les fans de sortir de leur hibernation prolongée (mais également leurs plus beaux cosplays) et de s’adonner aux joies de la spéculation frôlant parfois l’hystérie. Il faut dire qu’une trahison digne de la prélogie était attendue. Les réseaux sociaux, mais également la presse, affolés par ce nouvel opus, ont vu là l’occasion de nous rappeler tout ce que l’on savait déjà concernant la saga. Il ne se passait pas un jour sans une publication ou un papier nous offrant analyses paresseuses, retour aux sources, explications et j’en passe. Bref, un matraquage médiatique qui n’a d’égal qu’un marketing très (trop) présent. Dans ces conditions et à l’heure où les réseaux sociaux sont plus présents que jamais, l’exaspération de certains est compréhensible, particulièrement lorsque l'on n'est pas un amateur de l’univers Star Wars.


Le choix de J.J. Abrams, sorte de fossoyer d’anciennes sagas et amateur assumé de lens flare, est un choix qui, à mon sens, porte ses fruits. A l’aise avec la science-fiction, comme nous avons pu le constater avec Star Trek 1 & 2 (bien que ses deux films ne soient pas exempt de défauts), il se décrit lui-même comme un fan de la saga, ce qui, je vous l’accorde, n’en fait pas forcément un atout, étant une caractéristique pouvant déraper sur du fan service idiot, facile et lourdingue. Néanmoins, lui laisser les clés pour une suite relançant la machine star wars était un choix judicieux, pouvant offrir une réalisation dynamique, contemporaine, avec une mise en scène basée sur le mouvement, tout en restant d’une grande lisibilité en intelligibilité dans l’action, ce qui est loin d’être le cas dans la majorité des blockbusters actuels. Bref, un réalisateur pouvant insuffler sa patte dans un univers déjà très distinct, de par l’utilisation de certaines techniques qui sont systématiquement présentes dans chacun de ses films. Avec les qualités qui sont les siennes, il était à même d’offrir un souffle nouveau à la saga, avec un retour conforme aux canons actuels et par une mise en valeur de l’univers de la saga.


Cette suite se déroule une trentaine d’années après le Retour du Jedi, quasiment du temps réel avec la sortie du premier film, en 1977, ce qui ajoute une certaine dose de cohérence, notamment en ce qui concerne l'évolution physique des acteurs originaux.
Dès les premières minutes, il se dégage de cette suite un vrai amour pour la saga, avec un respect de l’univers, de son esthétique, notamment du fait de la présence d'une ambiance qu’il était délicat de reproduire. On retrouve notamment les transitions classiques, présentes depuis le premier film. Abrams apporte néanmoins sa touche et crée la rupture avec les anciens films, puisque le tout nage dans une réalisation contemporaine dont on reconnait sa patte. Néanmoins, on ressent ici et là le sentiment que nous sommes en présence d'une oeuvre conventionnelle, presque ordinaire, chose que l’on retrouve dans la grande majorité des productions actuelles, avec des productions dont on a l’impression qu’elles sont interchangeables de par leur caractère monotone et bien trop lisse. La série de films Marvel en est un exemple assez parlant à ce niveau-là. Ceci dit, la réalisation est globalement de qualité, avec des panoramas souvent sublimes, jouant sur les proportions, autre caractéristique du réalisateur. Ces plans, dispatchés tout au long du film et souvent forts de sens, symbolisent pour certains le passage de flambeau pour la nouvelle génération. Le panorama que l’on voit être traversé par Rey en début de film, avec en arrière-plan un destroyer en est un exemple assez représentatif.


Il ne fait aucun doute qu’il s’agit ici du Star Wars le plus abouti techniquement et qui ne se laisse pas aller au tout numérique : pas de fonds verts ou bleus disgracieux, pas de créatures en CGI complètement ratées. Place à de vrais décors et à des animatronics retravaillés numériquement, certes pas toujours d’une crédibilité dingue, mais qui aurons au moins le mérite de mieux vieillir que ce cher Jar Jar Binks. Peu d’artifices numériques inutiles donc, bien qu’on n’évite pas pour autant certains personnages totalement modélisés numériquement, faisant parfois tache. On pense évidemment à Snoke (sorte d’icone holographique géante), qui aurait mérité de rester dans l’ombre, autant pour son esthétique raté, des effets par forcément des plus réussis, mais également afin de laisser planer un peu le mystère autour du personnage. Ce ratage numérique est également le cas pour Maz, qui là aussi, aurait mérité peut être plus de travail au niveau de sa réalisation. Ces éléments m’ont sorti du film, qui justement mettait jusque-là en avant des effets principalement «organiques».


Autre point, que l’on avait moins l’habitude de voir dans les anciens films, tout le travail sur le gigantisme et les proportions, que l’on retrouve notamment dans Star Trek, avec un travail sur les échelles visuellement intéressant, avec une par exemple utilisation très dynamique du zoom. Pour autant, bien que la réalisation soit plutôt à la hauteur des attentes, quoi que réservant peu de surprises, des défauts persistent, notamment le fait de proposer une majorité de gros plans, avec pour conséquence des décors peu mis en avant, mais également un rythme parfois trop rapide, le film n'offrant jamais véritablement de « pause ». En effet, il reste comme prisonnier dans une sorte de précipitation constante, là où parfois, les anciens films savaient installer de moments plus calmes et réfléchis, consacrés au développement des personnages.


On retrouve également quelques idées visuelles intéressantes, tels que le sabre laser de Kylo Ren qui semble étrangement instable, ou encore la représentation visuelle de la force, particulièrement réussie. Abrams arrive également à se détacher des anciens films, en incorporant à ce septième opus deux nouveaux éléments : pas mal d’humour, avec des scènes qui font parfois mouche. Un élément que certains jugent d’ailleurs beaucoup trop présent, surtout lors de la première demie heure du film. Mais également, une accentuation de la violence qui se dégage des exactions du Nouvel Ordre, avec l’une des scènes en début de film, mais également la vue subjective lorsque l’une des planètes de la République est détruite, scène particulièrement poignante.


Mais outre la réalisation, c’était le scénario qui était un des éléments les plus attendus, et pour cause : comment faire suite au sixième épisode avec les événements qui s’y sont déroulés ? A savoir la chute de l’Empire, entraînant avec elle le du côté obscur. Afin de ne perdre personne en route, de par une narration trop complexe, Abrams a fait le choix de ne pas conserver les éléments de l’univers étendu, même si des clins d’œil sont disséminés ici et là. Ce choix a quelque peu fait grincer des dents aux puristes, mais passons. Il a également fait le choix de ne pas expliciter le contexte, notamment politique, ainsi que les événements ayant eu lieu entre le sixième et le septième épisode, ce qui induit un questionnement dès le début du film quant à l’origine du Nouvel Ordre, mais également celui, plus curieux, concernant le caractère mythique des Jedis, individus manifestement oubliés au bout d’un trentaines d’années et considérés comme des légendes par l’héroïne. On peut d’ailleurs considérer qu’il s’agit d’un élément très localisé et propre aux planètes se trouvant sur la bordure extérieure de la galaxie (c’est également le cas de Tatooine).


Le film commence sur Jakku, sorte de Tatooine bis, où l’on fait la connaissance de Rey, interprétée par Daisy Ridley, jeune actrice britannique de 23 ans, loin des beautés insipides que l’on nous impose aujourd’hui, presque atypique. Et comme certains ont pu le souligner, ce septième épisode reprend, dans les grandes lignes, la structure du quatrième opus, avec des similitudes frappantes concernant certains personnages, lieux, ou situations. En effet, il s’agit grosse modo de l’histoire d’une pilleuse d’épaves quelque peu ingénue (n'ayant manifestement pas besoin qu’on la prenne par la main, littéralement), qui tombe sur un droide, lequel détient des documents d’une extrême importance recherchés par un mouvement totalitaire. A partir de là, elle devra tout faire pour faire parvenir ces documents à la résistance, grâce notamment à l’aide d’un stormtrooper s’improvisant résistant, ainsi que d’un contrebandier pas des plus aimables. Ah oui, et la pilleuse d’épaves possède évidemment d’étranges pouvoirs, dans la mesure où elle est capable de maîtriser un mystérieux champ d’énergie qu'on appelle la force. Bien évidemment, ça ne s’arrête pas à ça et le parallèle avec le quatrième épisode va plus loin. Concernant les lieux par exemple, c’est assez frappant : Tatooine, Endor, Hoth l’Etoile de la Mort (avec notamment une scène qui fait référence au premier film), la cantina. Tout est là, ou presque.


En ce qui concerne les personnages c’est, et bienheureusement, plus complexe. Rey (dont le thème est particulièrement réussi), souvent comparée à Luke, en possède quelques traits évidements, mais n’en est pas pour autant une pâle copie. Ils sont néanmoins tous les deux appelés à l’aventure suite à un événement traumatique survenue peu après avoir refusé l’invitation d’un personnage tiers de s’engager dans la lutte. Finn, le fameux stormtrooper rebelle, peut être le personnage le plus intéressant du film, est l’occasion de donner plus de densité à ces soldats qui n’ont jamais été que des silhouettes sans aucune personnalité, des clones et donc des copies. A noter qu’il ne s’agit plus ici d’une armée composée d’une majorité de clones, mais d’individus ayant été enlevés à leur famille très jeunes. C’est intéressant de voir d’ailleurs comment le film parvient à nous faire prendre conscience que sous chaque casque, il y a quelqu’un avec une histoire qui lui est propre. C’est un élément que l’on retrouve dès le début du film, avec une mort très humanisée d’un des soldats du Nouvel Ordre. Finn est d’ailleurs un personnage qui est également motivé par la fuite et qui comme Rey, n’accepte pas son rôle de héros, ni de rebelle, sans réaliser que par sa fuite, il en est déjà un, qu’il le veuille ou non. Il partage également une histoire similaire avec Rey, puisque lui aussi ne reverra jamais sa famille et en a tout à fait conscience. En ce qui concerne les anciens, nous retrouvons notamment Han Solo, toujours le même, avec une pointe de mélancolie en plus, ainsi que la princesse Leia, désormais Générale de l’Alliance Rebelle. Bref, des anciens personnages qui sont globalement là où on les attend et apparaissent à l’écran d’une manière étrangement prévisible.


Ainsi, avec es différents éléments, difficile de ne pas complètement donner tort aux détracteurs, qui ne voient là qu’un banal calque, une redite, voire un remake du premier film. Mais ce serait dommage de s’arrêter à ça, bien que ce soit quelque chose que je peux comprendre, vu l’attente autour du film. Dommage, oui, puisque le film ne s’arrête pas à ces facilités et propose des éléments plutôt courageux, particulièrement son antagoniste principal : Kylo Ren, sorte de méchant pathétique, presque minable et complètement perdu, puisque attiré par le côté clair. C’est un gamin qui souffre de la comparaison avec son grand père, Dark Vador et qui s’efforce de se donner des airs inquiétants à travers la construction d’un charisme artificiel, qui s’envole une fois le masque tombé. Il est faible, lunatique, capricieux et imprévisible, pouvant autant s’autodétruire, que se repentir. Il faut comprendre qu’il s’agit ici d’un personnage qui a été pensé comme tel, qu’il ne s’agit pas d’un ressenti du spectateur, mais bien d’une volonté des scénaristes. En revanche, la figure du grand méchant derrière tous les plans du Nouvel Ordre et qui manipule manifestement son apprenti, est un ratage complet pour ma part, puisque extrêmement lambda et franchement esthétiquement raté. Le fait qu’il reste complètement dans l’ombre et qu’il ne soit dévoilé qu’à partir du neuvième épisode, aurait été plus pertinent. On se retrouve avec un grand méchant, en tout numérique foiré, pour lequel le spectateur ne récent ni crainte, ni inquiétude. Egalement, il est dommage de ne pas avoir mis plus en avant certains personnages, tels que Poe Dameron, qui a une vrai gueule d’un acteur des années 70, mais encore le capitaine Phasma, sorte de Boba Fett bis.


On note également la disparition (en tout cas pour ce premier épisode) de certains éléments mal aimés des anciens épisodes, tels que les midichloriens, mais la naissance de nouveaux, comme le fait que le sabre laser devienne une baguette magique qui choisit son Jedi. On évite également le syndrome Jurassic World quant au fan service, qui n’est donc pas omniprésent, lourd et inutile. Evidemment, des questions restent en suspens, comme les origines de Rey, son rapport peut être familial avec certains personnages, ou le simple fait qu’il existe une telle relation entre elle et la force. Certains craignent d’ailleurs déjà certains choix de facilité qui sont effleurés dans ce septième épisode.


Bien sûr, bien qu’il faille garder à l’esprit le fait qu’il s’agit avant tout d’un produit commercial grand public extrêmement bien maîtrisé, il faut également reconnaître, qu’au vue des pressions et des immenses enjeux autour du film, mais aussi des différentes générations ayant pu apprécier les différents films, qu’il est presque miraculeux que le film ne soit ne serait-ce que bon. Il faut également saluer les quelques (bien que rares), prises de risque que le film ose.

Rooster
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le 28 déc. 2015

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