(Cette critique comporte des spoilers)
Que penser du nouvel opus de la célèbre saga spatiale ? Après deux visionnages en VO, le sentiment qui me reste en tête demeure positif. Pourtant, au départ, mes craintes étaient à la hauteur de l'attente générale : non pas par le rachat par Disney, qui s'est aussi emparé de Marvel Studios sans pour autant modifier la qualité moyenne de leurs films ; non pas par l'éviction volontaire de Lucas, tout le monde sait (lui le premier) qu'il n'est pas bon réalisateur et nombre d'écrivains ont su montrer qu'on pouvait faire une bonne histoire de guerre et d'étoiles sans pour autant s'appeler Lucas. Ce qui me faisait m'inquiétait était plutôt la disparition définitive de l'Univers étendu, qui recelait malgré lui de vraies petites pépites. 20 ans de travaux d'auteurs de livres et de BDs, de créateurs de jeux vidéo, partis en fumée en un simple communiqué de presse...
Et, il y avait aussi J.J. Abrams, que fallait-il attendre de ce réalisateur, à mon sens largement surestimé, du ridicule Mission Impossible 3, du film-hommage correcte Super 8, des très moyens derniers Star Trek dont les fans de la première heure se sont empressés de renier l'existence... Certes, à côté, Abrams a participé à la création de certaines "grandes" séries, mais ont-elles bien terminées et était-il seul dessus ?
De nombreuses inquiétudes à l'origine et qui, toutefois, s'évanouirent rapidement : les scénaristes piochent dans le défunt UE ce qui leur plaisait (ou ce qui plaisait), comme le casque de Revan, l'enfant Solo et la Nouvelle République... Quant à Abrams, c'est assurément son meilleur film.
Le retour de la Force
Plus qu'un simple réveil, c'est Star wars qui revient. Là où les amateurs du capitaine Kirk se plaignaient de ne pas avoir affaire à leur univers favori, dont l'esprit avait "été trahi", ici rien de cela. Le réalisateur se veut dans la continuité de la première trilogie, tout en y apportant les évolutions techniques du cinéma hollywoodien actuel. Bien sûr, il ne passe pas à côté des hommages au travail de Lucas, mais ceci reste tout de même bien plus subtil que ceux que Peter Jackson se faisait à lui-même dans la récente (et pathétique ?) trilogie du Hobbit.
Parmi les nouveautés, les protagonistes sont plutôt réussis, avec John Boyega, dans un rôle comique convenu, mais rapidement attachant. Adam Driver campe un méchant complexe qui n'est qu'une ombre de ce qu'était Vador. Il n'inspire ni sa crainte ni son charisme. Il s'agit d'un jeune homme torturé entre un entourage positif et un sombre héritage, qui lui fait de l'ombre et qui le rend instable. On imagine aisément, lors de sa formation, un gamin perdu dans une galaxie où le mal n'existe officiellement plus (cf. La chute de l'Empire) et où, donc, le bien perd peu à peu de son sens. Il me semble que le personnage de Kylo Ren est amené à être développer. Après tout, il n'est qu'un gamin qui achève son passage dans le Côté Obscur dans le film. Il a encore du chemin à parcourir et je n'ai aucun doute que Driver sera capable de nous offrir un Jedi noir mémorable. Par ailleurs, rappelons que si Vador et l'Empereur étaient des ennemis mémorables, les backgrounds de Dooku et Maul étaient inexistants.
Le personnage de Poe est sous utilisé et mériterait une intrigue plus importante, tandis que Rey intrigue et donne envie d'en savoir plus à son propos. Le retour des anciens acteurs perturbe. On peine à être convaincu par notre chère princesse et par notre vaurien dont l'énergie palpable à disparu sous le poid des décennies... Seul le cameo du maître jedi m'a fait rêvé, perdu au fin fond de sa galaxie, cassé par ses échecs et l'éloignement de ses proches. Cette scène est la plus belle. Celle qu'on attendait tous depuis 30 ans et que film a pris un malin plaisir à nous le rappeler. On sent que Luke est devenu le vieux maître que Yoda lui promettait dans l'épisode V. Luke est devenu Ben Kenobi, et c'est beau.
Le principal point négatif reproché au film est de fournir un scénario déjà vu. Et c'est difficile à contredire, on y retrouve les grandes lignes de l'Episode IV, avec une base spatiale Starkiller qui est plus une insulte aux précédentes étoiles de la mort qu'une vulgaire copie. Elle n'a ni le charme de la base mortelle, ni l'aspect effrayant. C'était une mauvaise idée dès le départ. Quitte à faire avec, elle aurait mérité plus de développement dans cet épisode ou ceux à venir.
D'autres éléments du film dont il n'est pas utile de faire la liste se retrouvent également dans l'épisode IV, mais après tout, on les retrouvait aussi dans l'épisode I, et dans un bon nombre de bouquins et de jeux. Star wars est une histoire qui se répète régulièrement, ce qui est parfois dommage. Pour autant, on ne peut incriminer le seul Abrams.
Je regrette également la BO de Williams, qui est était une mauvaise idée dès le départ, le pauvre homme n'a rien livré de mémorable depuis l'épisode III il y a dix ans. C'était donc prévisible. L'ensemble de la BO est correcte mais impossible qu'un thème vous reste en tête après visionnage tant ceci banal pour du Williams.
"We're not finished yet ! It's just us now, Han Solo can't save you now."
Si je ne me trompe, cette réplique lancée par Kylo Ren à la fin de l'épisode peut se comprendre, d'abord d'un point de vue scénaristique évident, mais aussi d'un point de vue créatif : on s'adresse ici au public. Le We're not finished yet m'a immédiatement fait penser à la célèbre saga qui, pour Disney, n'a pas fini de raconter tout ce qu'elle a à dire. Et d'ailleurs, Mickey s'empresse de rajouter "It's just us now", soit Disney et le public, au revoir donc à notre cher George qui n'est plus compris dans l'équation. "Han Solo can't save you now.", ce n'est ni George, ni son légendaire trio (Han, Leia et Luke) qui sauveront nos nouveaux héros, ce n'est que eux-mêmes et ce que nous réserve l'avenir qui les sauvera. Que ce soit le badguy qui crache cette phrase à la figure de nos nouveaux héros n'est pas anodin. C'est violent et cela ne laisse aucune possibilité aux héros de contre argumenter. Lucas a créé Star wars, mais Star wars a fini par le dépasser. Cette page est aujourd'hui tournée et on n'a d'autre choix que de l’accepter, que cela nous plaise ou non. "Deal with it" comme dirait l'idiot du village en une d'un journal bien connu.
Est-ce pour autant une bonne chose ? L'avenir nous le dira, mais pour l'instant, cela ne semble pas mal parti.