Critique parue sur Cinephila.fr/blog


Ca y est ! Enfin ! Voici le film qu’une grande partie de la population mondiale attendait depuis l’achat de LucasFilm par Disney (pour environ quatre milliards d’euros, autant dire qu’on va encore bouffer du merchandising pendant un petit temps histoire qu’ils rentabilisent tout ça). Si on savait déjà que George Lucas avait l’intention de faire neuf films pour son univers galactique, l’homme n’a pour autant pas été impliqué dans ce nouvel épisode. Suite à la revente de LucasFilm, il a perdu tout droit de regard. On suppose tout de même que J. J. Abrams a cherché à avoir son approbation. Lors de la sortie de La Menace Fantôme, le monde entier était inquiet. Qu’allait donner ce que l’on appelle désormais la prélogie ? Serait-elle à la hauteur des trois premiers films (les épisodes IV, V et VI donc) ? La réponse fut cinglante : non. Des craintes du même acabit étaient donc légitimes lors de l’annonce de la mise en chantier d’une nouvelle trilogie. Mais un nom est venu rassurer bon nombre de personnes : celui de J. J. Abrams. L’homme a une sacrée réputation, celle de toujours essayer de garder l’âme de l’œuvre. Il l’a fait pour Star Trek et pour Mission Impossible et … c’est le cas pour Star Wars également.


Alors ? Qu’est-ce qu’il vaut ?


Il vaut qu’il enterre la prélogie, et de loin. Il vaut même qu’il enterre, ce n’est que l’opinion de votre humble serviteur, l’épisode VI qui, dès l’apparition des Ewoks, tombait un peu en pastiche. Avec Le Réveil de la Force, J. J. parvient à retrouver l’âme chère aux fans de la première heure. Qu’on ne s’y trompe pas, après six films, il est compliqué de faire quelque chose de totalement neuf. L’intrigue générale rappelle un ou plusieurs épisodes et les nouveaux personnages Rey, Finn, Poe et Kylo Ren évoquent Leia, Luke, Han Solo et Dark Vador. Ce ne sont pas tout à fait des ersatz puisque chacun des personnages a une personnalité et un parcours qui leur donnent une existence propre et totalement cohérente. Il y a également une certaine ressemblance en ce qui concerne les intrigues, les schémas narratifs et les relations entre les personnages. Rien qui décevra réellement les gens mais, rien n’y fait, la ressemblance est bien là. Difficile d’en dévoiler davantage sans risquer de révéler des informations qui pourraient gâcher la surprise aux fans. On va toutefois vous parler un petit peu de Kylo Ren, ce fameux méchant au sabre laser qui a le look d’une épée (pas de spoiler, promis juré craché). La connexion avec Dark Vador est évidente à cause du visuel mais, il faut saluer le travail des scénaristes tant leur boulot sur ce personnage est bien exécuté. Le personnage de Ren est bien plus travaillé et complexe que ne l’était Vador. Il est bien plus équilibré et devrait ravir les spectateurs. Bref, ce n’est qu’un mince exemple pour montrer combien le travail d’écriture est important et surtout, très réussi.


Ce qu’on peut en tout cas dire que ça tient la route. Les rencontres entre les différents protagonistes, les enjeux, les péripéties, la cohérence et l’équilibre sont là. Cela manquait cruellement à la prélogie et la production a bien fait de rectifier le tir. Dès les premières minutes, on sent que tout le monde est à son affaire. Les personnages et les intrigues se mettent en place doucement et, on retrouve un élément qui manquait aussi beaucoup à la prélogie : l’humour. On le doit principalement aux personnages de Finn et Poe, brillamment interprétés par John Boyega et le toujours aussi génial Oscar Isaac (Inside Llewyn Davis, A Most Violent Year). On le doit également à BB-8, le nouveau robot qui semble déjà faire sensation depuis plusieurs semaines. Celui qui « reprend » le rôle de R2-D2 a tout pour gagner le cœur des fans, ce qui semble déjà sur la bonne voie. Le scénario est intelligent. Il fait la part belle aux nouveaux venus de la saga, mais n’oublie pas quelques anciens pour autant. Cela donne de très belles scènes comme celle qui introduit Han Solo et Chewbacca.


Si le scénario et l’écriture sont à la hauteur, il en est de même pour la mise en scène de J. J. Abrams. Pour beaucoup, un des seuls intérêts de La Menace Fantôme était la course de modules. J. J. réitère le coup en proposant deux superbes courses-poursuites de vaisseaux. En plus de ça, il parvient à rendre un côté plus mature et adulte à la saga. Ses plans sont beaux, recherchés, attrayants et ont de l’intérêt. Il a donné un rythme parfait au film si bien qu’il n’y a aucune baisse de régime. Chaque transition est vraiment parfaite et on ne tombe jamais dans le futile. Cela était l’un des problèmes majeurs de la prélogie. Il y avait bien trop souvent des discours politiques dévitalisés qui plombaient la dynamique lancée, chose qui est totalement évitée ici. De bout en bout il gère mais, ce dont il faut lui être reconnaissant, c’est d’avoir pu gérer la pression et l’héritage qui lui a été attribué. On sent qu’il y a mis tout son cœur. Cela se sentait déjà grâce aux bandes-annonces et au making off publié il y a plusieurs mois mais cela est flagrant quand on est face au film.


Il a été aidé dans sa tâche par un casting de haut vol. Il n’y a aucun mauvais choix, personne ne fait tâche. Parlons d’abord des anciens. Dans son rôle d’Han Solo, Harrison Ford fait un retour remarqué et marquant. C’est comme s’il n’avait jamais quitté le rôle (il faut dire que celui d’Indiana Jones a beaucoup de points commun ce qui aide un peu forcément). C’est un plaisir de le voir dans chaque scène et de voir sa relation avec Chewbacca, toujours interprété par Peter Mayhew (à qui nous avions posé une question il y a quatre mois, vous pouvez retrouver ça ici). Carrie Fisher est de nouveau là dans le rôle de Leia. La complicité entre les comédiens est toujours là et, c’est l’occasion d’encore saluer le travail des scénaristes puisqu’ils ont étoffé et embelli la relation entre Han et Leia. Un vrai bonheur. A propos des nouveaux, il y a beaucoup à dire. Commençons par les méchants, le général Hux et Kylo Ren qui ont les traits de Domnhall Gleeson et Adam Driver. Le premier est très sérieux, très impliqué. Le second est génial. Il rappelle (ou annonce pour ceux qui ne le connaitraient pas encore) qu’il est un des acteurs qui montent, un de ceux qu’il faut suivre parce qu’il va durer. Le grand méchant de cette nouvelle trilogie, c’est le Chef Suprême Snoke qui lui est interprété en motion capture par le spécialiste de la discipline : Andy Serkis. On peut également mentionner Gwendoline Christie (Brienne dans Game of Thrones) dans le rôle du Capitaine Phasma mais, elle ne quitte jamais son masque et on la voit relativement peu donc il est compliqué d’émettre un réel jugement sur son jeu tout à fait correct. Du côté des gentils, on trouve donc le trio composé de John Boyega, Oscar Isaac et Daisy Ridley. Les trois sont fantastiques mais c’est véritablement Daisy Ridley qui crève l’écran. La jeune femme a les épaules pour faire perdurer cet héritage mondial avec la manière. Elle est le vrai moteur du métrage et peu de monde fait le poids face à elle. Boyega est aussi une excellente surprise. Le jeune anglais, surtout connu pour avoir joué dans 24 Heures Chrono, montre, comme ses deux acolytes, qu’il faut désormais compter avec lui. Plein de peps et de dynamisme, il remplit parfaitement son rôle. Il en est de même pour Oscar Isaac qui nous montre déjà depuis plusieurs années l’excellent comédien qu’il est. A côté de tous ces rôles plus ou moins importants, on trouve tout un tas de seconds voir rôles de moindre importance avec quand même de sacrés noms comme Max Von Sydow, Greg Grunberg (oui, JJ Abrams est quelqu’un de loyal), Lupita Nyong’o ou bien encore Iko Uwais et Yayan Ruhian, les deux acteurs principaux de The Raid et son excellente suite. Là, vous vous dites qu’il manque quelqu’un et pas n’importe qui : Luke Skywalker. Rassurez-vous, il est bien là, toujours sous les traits de Mark Hamill. Mais on ne voit pas assez le personnage que pour dire quoi que ce soit de pertinent à son sujet si ce n’est qu’on a hâte de voir ce qu’il va donner dans la suite.


Enfin, impossible de clôturer cette critique sans parler d’un homme présent depuis le début, un homme essentiel et qui a participé à la renommée de la saga : John Williams. Le compositeur américain, qui peut se targuer d’avoir composé quelques uns des hymnes les plus célèbres de l’histoire du cinéma, est en grande forme et étoffe sa palette musicale. Il a composé des thèmes qui s’intègrent parfaitement à l’univers créé par George Lucas et réhabilité par JJ Abrams.


On peut conclure en disant simplement que J. J. l’a fait. Il a réussi ce difficile challenge de devoir rendre à Star Wars ses lettres de noblesse. Il est parvenu à faire un film qui plaira aux fans et devrait en amener de nouveaux. Il n’y a vraiment pas grand chose à lui reprocher et, devant la tâche accomplie, on ne peut que s’incliner. La seule inquiétude, c’est ce qui va arriver après ce Réveil de la Force mais, si Abrams reste impliqué d’une manière ou d’une autre, on ne peut que rester confiant.

ThibaultVandeWe
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le 16 déc. 2015

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