J.J Abrams "l'éponge" est de retour et après avoir repompé des scènes entières de ses Spielberg préférés pour Super 8, ou de Star Wars pour Star Trek, il fallait pas s'attendre à voir un truc 100% inédit pour son Star Wars, le vrai, celui avec des sabres lasers et tout l'attirail qui va avec.
En cela, voir que le film est un remake déguisé de l'original n'a finalement rien de surprenant, la félicité d'Abrams semblant être là pour faire passer la pilule et carrément la justifier.
C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes après tout... Non?


Tel un élève supra consciencieux, J.J offre un spectacle pas désagréable, avec un rythme suffisamment soutenu pour éviter qu'on regarde notre montre, et fait jouer la fibre nostalgique à plein régime, le bougre débordant d'enthousiasme quand il est question de faire joujou avec toutes ces figures iconiques qui ont marqué l'inconscient collectif depuis 30 ans.
En cela, il remplit toutes les cases du parfait cahier des charges pour tous les fanboys du monde, qui sont forcément en transe à l'idée de revoir le Faucon Millenium, des sabres lasers ou une planète qui ressemble comme deux grains de sable à Tatooine, même si, attention, c'est pas Tatooine les gars!


Et c'est précisément là où le bât blesse : Incapable d'avancer sans perdre de vue son rétroviseur, Abrams et les scénaristes livrent une oeuvre prévisible dès sa première scène, où chaque intrigue, chaque rebondissement et chaque péripétie tient du déjà vu. On essai de noyer le poisson comme on peut : R2D2 est devenu un ballon, l'étoile noire est désormais une planète et Luke Skywalker est remplacé par la nouvelle Keira Knightley, excellente au demeurant.
D'ailleurs, on voit avec elle et John Boyega l'envie d'être moderne et dans le coup : à l'heure du vivre ensemble et du féminisme, ca fait forcément bien. Cela dit, ils auraient mis un nain et un martien à la place ou un duo latino/russe que ca n'aurait pas changé grand chose tant l'écriture se maintient à des archétypes n'exploitant pas la nature des acteurs.


Et d'ailleurs, la dite écriture n'ose à vrai dire rien qui sorte des sentiers battus : la grande révélation géniale de l'Empire Contre Attaque est devenue un gimmick où quasi chaque personnage important est le fils ou la fille d'untel, tout comme on dézingue un personnage vite fait bien fait parce que ca fait toujours son petit effet. De là à mettre ça en scène correctement, c'est une autre affaire : la mise en place de la dite scène crie son issue à des kilomètres et une fois la chose faite on passe à autre chose parce qu'il faut que ca avance ! Ainsi Abrams se plante comme bon nombre de ses collègues : Les choses prennent du souffle et de l'ampleur quand on prend le temps de les poser et de les traiter avec soin.
Ici, tout va vite pour être trépidant, et finalement rien ne marque vraiment, l'entreprise reposant sur des questions en suspend à tout va pour s'assurer qu'on reviendra pour le prochain.


Et dans cette quête référentielle tout en déférence, Abrams oublie le principal en route. Bien sûr, Star Wars et son mythe sont basés sur des personnage forts et c'est sympa de les revoir, tout comme son imagerie. Mais justement, la chose qui faisait de Star Wars une saga vraiment unique et à part, c'était cette imagerie folle qui n'avait de cesse de nous étonner et de pondre toutes les 20 minutes un élément d'univers étonnant. Pour avoir fait découvrir la trilogie originale récemment à ma douce, j'ai pu observer combien ca marche encore et la façon avec laquelle l'univers n'a de cesse de surprendre avec ses trouvailles successives. Or ici, rien de nouveau.
On est en terrain connu, on a éventuellement des figures célèbres un peu rafraîchies esthétiquement mais quand il est question de retrouver la découverte et l'approfondissement grisant de tout ca, que dalle! C'est le risque zéro, on ne quitte pas une seule seconde sa zone de confort et on complaît le spectateur en lui disant perpétuellement "t'as vu comme c'est cool Star Wars?".
La seule chose un tant soit peu inédite c'est la scène avec des monstres tentaculaires dans un vaisseau, et c'est l'unique moment où j'ai pu me satisfaire d'un truc différent de d'habitude.


Même la prélogie, aussi mal écrite et insupportable soit elle, avait le mérite de renouveler l'imaginaire de Star Wars, avec sa cité sous marine des Gungans, ses courses de pod, Coruscant, la planète de flotte du 2, celle de Grevious dans le 3, etc...
On perd donc l'une des caractéristiques les plus marquantes de la saga, ce qui la rendait constamment fraiche et excitante. Et par conséquence, ce qui était une grande épopée mythologique avec un début, un milieu et une fin (une histoire en bonne et due forme donc), se trouve désormais sérialisée, avec comme seul enjeu de savoir qui est le prochain grand méchant et quel est son lien avec les personnages. La puissance mythologique en prend un coup tant Abrams n'y apporte rien, ne faisant que répéter des scories thématiques dans une énième version.


Après coup, Abrams me fait un peu penser au méchant assez naze de cet épisode, une sorte d'ado rebelle emo tellement fan de Dark Vador qu'il en vient à porter un cosplay tout moche pour faire pareil. Trop anxieux qu'il est pour comprendre ce qui a fait la grandeur de son modèle, il en recalque le parcours sans avoir appris les erreurs du passé et se complaît dans la ressemblance illusoire. Bon, d'un autre côté, le pauvre n'a aucun charisme dès qu'il montre sa tête de prépubère mal dégrossi, donc je ne sais pas ce qui est le pire, mais toujours est-il qu'en voulant complexifier la figure du méchant, Abrams donne juste de la poudre aux yeux et perd toute la fascination qu'on pouvait avoir pour une icône monolithique comme Vador, dont les traumas étaient passionnants parce que gardés sous silence et donc mystérieux. La Nolanisation du cinéma américain, avec de la psychologie bas du front explicitée à outrance pour faire illusion, a encore de beaux jours devant elle...


Au final, tout ca est un peu à l'image de l'un des rares reproches que subit le film de toute part, les gens trouvant que John Williams n'a rien amené de nouveau à la musique si emblématique de la saga, chose qu'il avait pourtant su faire sur la prélogie (Ahhhh Duel of the Fates...).
Étant donné qu'il n'y a fondamentalement rien de nouveau sous les nombreux soleils de la galaxie, comment voulez-vous que Williams, aussi génial soit-il, apporte quoi que ce soit de nouveau à l'édifice quand Abrams ne le fait pas?
Alors oui, la musique est loin d'être dégueu, seulement ça fait 30 ans qu'on la connait, et par coeur qui plus est.
Autant dire que pour une franchise qui s'est fait le plus grand nom de l'histoire du 7ème art à la seule force de son imaginaire fougueux et de son audace perpétuelle, tout ça est bien insignifiant.

Xidius
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le 23 déc. 2015

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Xidius

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