Sueurs froides, sueurs froides, c'est vite dit...

Ayant démissionné de la police après un accident qui le rendit extrêmement sensible au vertige, John Ferguson (James Stewart) se voit convoqué par un vieil ami, Gavin Helster (Tom Helmore), qui lui demande de surveiller sa femme Madeleine (Kim Novak). En effet, il craint que la vie de cette dernière soit menacée, Madeleine multipliant des moments d’absences lors desquels il semblerait qu’une ancêtre vienne se réincarner momentanément en elle…


Mystérieusement traduit en français pas le titre Sueurs froides, Vertigo en est à peu près dénué. Des sueurs froides, on pourra à la rigueur en ressentir lors des cinq dernières minutes du film, dans un climax assez réussi. Le reste du film, on attendra vainement d’être sous tension, le récit se concentrant bien plus sur l’histoire d’amour entre Ferguson et la femme qu’il est censé surveiller que sur l’explication du mystère. Hitchcock semble même se désintéresser de ladite explication qu’il dévoilera sans aucune raison une demi-heure avant la fin du film, par une plongée dans la conscience d’un personnage qui ne se justifie en rien, puisqu’elle ne sert qu’à nous révéler à l’avance ce que Ferguson apprendra durant le climax final, et qu’il aurait été beaucoup plus efficace pour le spectateur de découvrir en même temps que lui. En-dehors de ce procédé aussi superficiel qu’inutile, on pourra regretter que certaines questions restent sans réponses, laissant planer un soupçon d’incohérences sur un film dont l’intrigue originale écrite par le tandem français Boileau-Narcejac est poutant plutôt bien ficelée.
Pour compenser ces défauts, auxquels on peut ajouter des personnages plus pénibles qu’attachants, on pourra tout de même trouver la mise en scène d’Hitchcock assez inventive, bénéficiant d’un travail impressionnant sur les jeux d’ombres et les couleurs. On pourra également goûter une réflexion intéressante - quoique pas très optimiste - sur le refus de l'amour vrai (Betty, la fiancée de John, qu’il ignore superbement pendant tout le film) au profit d’un amour romantique malsain, uniquement fondé sur le souvenir d’une femme aimée disparue, et


qui finira mal, conférant encore davantage d'intérêt au film.


Cela ne parvient pas à faire oublier les longueurs coupables dont souffre le film d’Hitchcock, mais permet de passer un moment relativement agréable, pour peu que l’on soit assis à côté d’une personne particulièrement émotive (exemple parfait : ma petite soeur, qui sursaute à chaque mouvement de caméra ; sans elle, je serai d'ailleurs sans doute descendu à 6...) et qui, elle, serait sensible à la tension hitchcockienne, même quand cette dernière est réduite à peau de chagrin.

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le 31 déc. 2016

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Tonto

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