Hitchcock disait que "les femmes sont comme le suspense. Plus elles éveillent l'imagination, plus elles suscitent d'émotions". Et Vertigo, c'est exactement ça.
J'ai vu plusieurs films du réalisateur que j'ai aimé pour leur qualités cinématographiques mais qui m'ont souvent déçu dans leur construction de la tension, je trouve que le britannique donne souvent trop de cartes aux spectateurs dès le départ. Ce n'est pas du tout le cas pour ce film. On établit que le héros a la peur du vide, et on attend de voir quand cela va revenir dans le scénario. On établit qu'il doit suivre les agissements suspects de la femme d'un ami, et on attend de voir ce qu'il va apprendre. C'est tout. Et ça marche : on se retrouve comme Scottie à échafauder des théories de plus en plus sordides pour expliquer ce qu'il découvre, ce qui fait que le long-métrage garde deux niveaux de lecture jusqu'à la grande révélation.
Et après ce moment là, ce n'est pas fini. Sur le moment je trouvais cela dommage de ne pas mettre le twist à la toute fin, mais après avoir réfléchi à la structure narrative l'explication aurait alourdit la scène, alors qu'il s'agit d'un moment intense où les personnages agissent instinctivement. De plus, cela installe un autre type d'attente, intéressant malgré quelques longueurs.
Outre le suspens, il y a un travail d'ambiance remarquable. A l'instar de Psychose ou des Oiseaux, il y a quelque chose de pesant dans l'atmosphère. On sentirait presque une menace invisible peser sur Scottie, et quelques scènes contribuent à cette idée, comme la scène dans la forêt ou bien encore la séquence du rêve qui est aussi étonnante que dérangeante. L'ouverture joue d'ailleurs très bien son rôle à ce niveau là, la superbe musique de Bernard Herrmann mettant instinctivement le spectateur sur ses gardes.
Vertigo possède une gestion du suspens selon moi plus efficace que d'habitude, couplée à la virtuosité de Hitchcock pour manipuler une caméra (en particulier pour ses travellings). Le personnage de James Stewart, reprenant son ton cynique de Fenêtre sur cour, captive le spectateur et poursuit une Kim Novak plus mystérieuse que jamais.