Inspiré d’une célèbre comédie musicale elle-même inspirée de l’histoire vraie d’un tueur en série Anglais, barbier de métier, Tim Burton se lance dans l’adaptation filmique de Sweeney Todd : le diabolique barbier de Fleet Street. Entre comédie noire et film d’horreur sanglant, cette comédie musicale macabre voit Johnny Depp et Helena Bonham Carter former un duo maléfique poussant la chansonnette entre deux gorges tranchées. Venez rendre visite à votre bon ami Sweeney !


Johnny Depp aura sa vengeance


Plus jeune, il avait été frappé par l’incroyable force dégageant d’une pièce culte de Broadway : Sweeney Todd. Des années plus tard, Tim Burton se lance dans la production de la version en film de l’œuvre qui l’avait interpellé. Aidé de Stephen Sondheim, le parolier de la vraie comédie musical Sweeney Todd, avec la complicité de Johnny Depp, son acteur fétiche et Helena Bonham Carter, l’auteur, véritablement visionnaire prend de nouveau de gros risques. Jamais il ne s’était attaqué à une comédie musicale avec de vrais acteurs. De plus, lors d’une interview, le réalisateur ne manquait pas de dire honnêtement que cette œuvre fût difficile à chanter et à jouer. Nouveau défi.


Pour éviter le fiasco, quelques semaines avant le début du tournage, il travailla comme un diable, sans relâches. Répétition des chorégraphies, des chœurs, création des paroles du film, et, plus important : entrainement vocal des artistes principaux. Burton n’est pas le seul à se lancer un défi. Il en est de même pour celui qui l’accompagne pratiquement dans toutes ses œuvres : Johnny Depp. Johnny Depp, il entend bien se dépasser, s’entrainant intensivement au chant alors qu’il est sur le tournage de Pirates des Caraïbes : Jusqu’au bout du monde. Bien que ce soit une première pour lui, l’acteur a quand même le bagage de faire parti d’un groupe de rock n roll. Néanmoins, il lui fallait prendre des cours. Ce fut chose faite grâce à Bruce Witkin, producteur vocal et ami de Depp qui lui donna un coup de pouce.


Johnny Depp chanter pour la première fois de sa vie, pour un fan, ça ne s’oublie pas. Voix sombre et ténébreuse comme un vieux rockeur, l’acteur, sans casser la baraque comme une star de la musique, s’en sort avec les honneurs. Le timbre de voix utilisé est en parfait concordance avec le caractère et la personnalité de ce personnage vide intérieurement, laissant extérieurement aller sa rage meurtrière qu’il avait pourtant menacé à plusieurs reprises d’éclater lors des premières minutes du film. Mention à la chanson Epiphany, le summum du talent de l’acteur. Une sorte de star du rock.


Helena Bonham Carter, elle est comme Depp, elle n’avait jamais chanté. Pourtant, à 11 ans, cson rêve, c’était de jouer dans une comédie musicale. Pour ne pas souiller son rêve d’enfant et lui faire honneur, elle c’est battue, apprenant pendant trois mois à chanter avec un professeur de chant, Ian Adam. Au chant comme au jeu, l’actrice a la même qualité que Johnny Depp mais d’une façon différente. Les deux se complètent. Un couple bizarre au look gothique/morbide, au teint pale, aux yeux noirs très enfoncés incluant de grosses cernes d’insomniaques. Du Tim Burton pure souche. Pour les autres acteurs, ils ne sont pas chanteurs et pourtant, ils gèrent tous, apportant une qualité particulière.


Sacha Baron Cohen, célèbre pour son personnage de Borat, n’a certes pas un grand rôle dans notre film mais quelle prestation. N’aimant absolument pas cet acteur, j’ai été surpris de l’apprécier, de rire en l’entendant chanter. Quelle voix ! Comme quoi, cet homme est plus doué qu’il n’en a l’air, à condition de choisir les bons rôles.



Pas Barker, cet homme est mort. C’est Todd maintenant. Sweeney Todd.
Et il c’est promis d’obtenir vengeance.



Méchant Johnny ?!!!


Oubliez le Johnny Depp maladroit et comique, dites bonjour à un véritable monstre diabolique assoiffé de vengeance. Comme à son habitude, l’acteur caméléon s’évade de lui-même et se camoufle. Habité par le rôle, vieillit, cheveux ébouriffé et grande mèche blanche apparente, teint pâle, traits prononcés, regard effrayant de haine, look sombre de dandy, lame de rasoir à la main étant d’après lui une extinction de son bras, c’est que feu notre Edward aux mains d’argent serait presque revenu d’entre les morts et passé du coté obscur de la force.


70% du film incluant des séquences chantées, celles et ceux qui fuient les comédies musicales comme la peste devraient dès cette annonce prendre leurs jambes à leur cou. Et pourtant, ils ne doivent pas être rebutés à l’avance par Sweeney Todd. Pourquoi ? Tout d’abord les paroles chantées par chaque protagoniste servent à projeter les sentiments de ces derniers donc, l’émotion passera à travers ce style de narration. Ensuite, Sweeney Todd fait plus vieux film d’horreur muet avec de la musique que véritable comédie musicale.


Dernier point, on est dans du Tim Burton, du film sombre et horrifique de Tim Burton. Il avait gâté les plus sadiques d’entre nous grâce à de belles giclées de sang avec son Sleepy Hollow, il s’en redonne à cœur joie avec son Sweeney Todd. Carotides tranchées, sang giclant, coulant à flot, cadavres jetés dans un vieux broyeur à viande pour être fourrés dans des pains par la suite puis donnés aux clients affamés (bien la métaphore cannibale), c’est à se tordre de rire autant qu’à avoir des envies de vomir en voyant les gens se délecter d’une tarte dont ils n’ont aucune idée de ce qu’elle contient vraiment.



Nous vivons une époque redoutable, Madame Lovett, des mesures
redoutables s’imposent.



Ceux d’en haut serviront ceux d’en bas…


L’histoire tragique du passé de Benjamin Barker étant au summum de l’injustice, tout comme la série Dexter, celles et ceux qui ne supportent pas que les méchants et autres types corrompus s’en sortent, prendront un véritable plaisir à les voir trépasser un à un. C’est l’un des points sur lequel ce film est terriblement plaisant. En effet, les mises à mort de ce film sont spectaculaires et jouissives. L’image étant sombre et presque dénuée de couleurs pétantes, le sang ressort beaucoup plus, donnant la sensation qu’il est beaucoup plus rouge que normalement. Résultat, esthétiquement, les scènes violentes lorgnent presque du coté des comics et films « Sin City ». Et ce n’est pas tout.


Tim Burton, question esthétisme, à chacun de ses films, il veut nous éblouir et à chaque fois, il réussit, poussant son imagination toujours plus loin. Pour Sweeney Todd, il ne se repose pas sur ses lauriers, veut faire honneur à la pièce de théâtre qu’il a tant aimé. Le choix des angles, la caméra qui bouge de ci de là, suivant la musique, Tim Burton se sert de cet instrument avec brio, nous plongeant dans un vieux Londres crasseux et peu rassurant, tout comme l’avait été avant lui un certain village nommé Sleepy Hollow. Le sang de fan des films de la Hammer coulant dans ses veines et son film tapant encore en plein dans l’horreur, le réalisateur ne se gênera pas pour faire un énième hommage aux grands classiques de ce genre.


Pas question de jouer la carte de la redite, Sweeney Todd diffère des autres œuvres du cinéaste. Film d’horreur et comédie musicale : deux mondes totalement différents, un mélange original et étonnant. Humour noir, tragédie, émotion, lumière, brume, rues sombres et crasseuses, ténèbres, Sweeney Todd a beau chanter un peu trop (hormis les titres « Epiphany » et « The Contest » de Sacha Baraon Cohen, c’est pas la joie, surtout le supplice qu’est « Johanna » de Jamie Campbell Bower), il fascine du début jusqu’à la fin parce qu’il est beau, frais, et fun.



ENFIN, mon bras m’est rendu en entier !



Au final, Sweeney Todd : le diabolique barbier de Fleet Street, c’est 1h50 de bonheur absolu nous plongeant dans un Londres victorienne du 19ème siècle sinistre, coincé, où corruption, individualisme, injustice, cruauté, violence, décadence et pauvreté, le tout agrémenté d’un soupçon de théâtralisation, de clins d’œil cinématographiques, et du sang…BEAUCOUP de sang. Johnny Depp magistral, Helena Bonham Carter plus étrange que jamais, Alan Rickman pervers et sadique à souhait, Tim Burton signe un nouveau bijou. Peut-il surpasser l’excellence ?!

Jay77
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films avec Helena Bonham Carter

Créée

le 6 janv. 2018

Critique lue 860 fois

Jay77

Écrit par

Critique lue 860 fois

D'autres avis sur Sweeney Todd - Le Diabolique Barbier de Fleet Street

Sweeney Todd - Le Diabolique Barbier de Fleet Street
Swann
9

Critique de Sweeney Todd - Le Diabolique Barbier de Fleet Street par Swann

Je fais parti des petits cons qui trouvent ce Burton magnifique, un de mes préférés pour tout avouer... Parceque on dit tout le temps que "Putain Burton c'etait mieux avant, maintenant il se parodie...

le 21 janv. 2011

40 j'aime

8

Du même critique

Spider-Man: Far From Home
Jay77
4

Spiderman s’exporte en Europe

Même les super héros ont droit de prendre des vacances. Surtout après avoir vécu la pire des épreuves en affrontant Thanos. Suite direct d’Avengers Endgame, Spider-man Far From Home confronte son...

le 3 juil. 2019

15 j'aime

19

Aladdin
Jay77
7

Le prince Ali Ababwa fait peau neuve

Le diamant d'innocence, solitaire, acrobate, amateur de pommes, accompagné de son singe espiègle et le génie de la lampe, fait un retour évènement sur grand écran. Après avoir conquis le cœur des...

le 22 mai 2019

14 j'aime

5

Bird Box
Jay77
8

Fermez les yeux…enfin sauf pour regarder ce film

Le chat noir collant aux basques de Sandra Bullock dans Gravity, ne l'a finalement pas quitté. Cinq ans après en avoir bavé dans l'espace, Netflix plonge Sandra Bullock en plein cœur d'un survival...

le 27 déc. 2018

14 j'aime