Voilà un film bien étrange. A la fois fort, brut et sensible et d'un autre côté expérimental, maladroit et abstrait, "Synonymes" suscite un intérêt mi-figue mi-raisin. Le réalisateur raconte ici l'histoire de son arrivée en France alors qu'il ne pouvait plus supporter la folie de son pays. Il y a donc une empreinte culturelle et politique très forte qui n'est pas forcément accessible et compréhensible par tous. Ce récit d'une errance pose les questions de l'exil et de l'accueil, des immigrés qui fuient leur pays en horreur. Mais le regard de Nadav Lapid est bien plus spécifique car il se concentre sur la nationalité israélienne et donc sur son Histoire et son mode de vie. C'est ce prisme-là que j'ai eu du mal à vraiment cerner. Beaucoup de scènes, dont les flash-back et celles avec le personnage de Michel, m'ont paru floues voire incompréhensibles. Et pourtant, l'Israël justifie la fougue intrépide de ce personnage principal. Mais oui, je me suis senti pommé et peu concerné par la plupart des scènes qui relevaient d'avantage d'un grand n'importe quoi guignolesque.
Heureusement, Synonymes propose en contre-partie des scènes vibrantes et marquantes. Les images de cet étranger en proie à l'envers du décor de la culture française est parfois très parlante. Les scènes sont souvent violentes, dérangeantes ou étonnantes. La séquence d'ouverture tout comme la dernière scène véhiculent une réflexion intéressante sur notre place dans le monde. Une touche d'humour non-négligeable est apportée par Léa Drucker dans le rôle d'une professeur des valeurs françaises totalement bidon. Mais surtout, le film ne serait rien sans Tom Mercier, qui, par sa force sauvage et sa grande présence, secoue, rendant ainsi ce film incontrôlable. Il est épatant tout en restant très simple. Son maniement de la langue française est très singulier et surplombe ses deux partenaires de jeux qui s'écoutent parler et ont eu le don de m'exaspérer. La façon de parler irréaliste de Quentin Dolmaire est insupportable tout comme Louise Chevillotte qui minaude plus qu'autre chose.
Les parti prix de mise en scène m'ont aussi dérangé. C'est très expérimental si bien que le réalisateur opte pour une caméra tremblante pour figurer le point de vue du personnage principal. On a donc plusieurs plans de son errance dans Paris, filmés en GoPro, majoritairement en gros plans et visant le sol. C'est... conceptuel et ça ne sert nullement le film. Une fois sorti de la salle, on a l'impression d'avoir assisté à une succession de scènettes, plus ou moins marquantes, rendant compte de la vie d'un exilé en France, mais sans que l'ensemble soit homogène. Le scénario est imprécis et il manque un ciment pour consolider chacune de ses scènes entre elles. Pour ma part, je ne suis pas rentré dans le film mais j'ai été captivé par ce jeune acteur qui impose une vraie rage de vivre.