Une copie du Fugitif divertissante mais mal réalisée

Après la trilogie du Transporteur, Taken est devenue la franchise la plus lucrative d’EuropaCorp. Il faut dire que le premier, même s’il avait été boudé par la presse lors de sa sortie en salles, avait tous les ingrédients pour être un divertissement sympathique : un héros charismatique, une mise en scène très énergique, de l’action à gogo… Des atouts que n’avait pas su reprendre convenablement la suite, se présentant alors comme un vulgaire copié-collé mollasson et bien trop invraisemblable du précédent long-métrage. De quoi appréhender ce Taken 3, concocté par la même équipe que le 2 et qui se vante de retrouver Liam Neeson en tête d’affiche après que ce dernier ait accepté un gros chèque de la part de la production. Un nouveau produit purement commercial estampillé EuropaCorp et bâclé jusqu’à la moelle ? Pas tant que cela !

La première cible des cinéphiles purs et durs sera sans nul doute le scénario, comme toute production Besson. En même temps, comment ne pas pester devant autant de clichés, d’invraisemblances et de manque d’originalité et d’âme ? C’est sûr que de ce point de vue-là, les Taken sont de très mauvais films. Mais jamais un opus n’a prétendu être autre chose qu’un divertissement. Il suffit de voir le premier film, qui faisait rapidement entrer le spectateur dans le feu de l’action sans que celui-ci ait le temps de reprendre son souffle. Alors ne blâmer pas Taken 3 pour son script dit « bidon », il n’a nullement l’intention d’être à la hauteur d’un Shakespeare. Juste l’ambition de divertir, ni plus ni moins, et il s’en sort pas trop mal grâce à son concept : ne pas reprendre la trame scénaristique du premier film (pays étranger, enlèvement, le héros tue tout le monde et sauve ses proches), chose qu’avait fait le 2. Taken 3 fait partir la franchise sur de nouvelles bases et c’est plutôt rafraîchissant. Alors oui, le film se présente comme une pâle copie du Fugitif (et pas dans les plus petits détails), recycle pas mal de séquences issues d’autres divertissements (dont un final qui rappelle celui du Transporteur 2) et ne cachent pas ses invraisemblances même vis-à-vis de la saga (le fait d’avoir un Stuart rajeuni par rapport au premier Taken). Mais il remplit son cahier des charges en livrant au public une enquête simple et entraînante à suivre, tout en s’intéressant aux personnages et rendant leurs enjeux plus intéressants à suivre. Sans oublier quelques références bienvenues aux autres opus, comme la réplique "Bonne chance !". Chose que Taken 2 n’avait pas réussi à faire, et c’est déjà ça !

Ensuite, d’autres spectateurs critiqueront le fait de retrouver l’oscarisé Liam Neeson dans un énième rôle d’ex-agent badass au bout du rouleau. Il est vrai que l’acteur est abonné à ce type de personnage depuis – tiens, tiens ! – le premier Taken (soit 2008). Mais en même temps, les gens semblent beaucoup l’apprécier dans ce genre de divertissement, il est donc normal que les producteurs se l’arrachent dans des longs-métrages de ce calibre. Et même s’il se retrouve à cachetonner comme un certain Nicolas Cage, Neeson reste bien plus prestigieux que ce dernier. Taken 3 en est le nouvel exemple en date : le comédien ne crève pas l’écran niveau interprétation, cela va de soit, mais son charisme reste intact et sa façon de jouer est assez bonne pour que le public s’attache à lui. Quant aux autres comédiens (Forest Whitaker, Maggie Grace…), ils sont loin du cabotinage habituel des productions Besson et cela fait plaisir à voir.

Le gros défaut de Taken 3 revient néanmoins à son réalisateur Olivier Megaton, qui avait déjà massacré le travail de Pierre Morel (cinéaste du premier opus) avec la suite. Celui qui pourrait être nommé comme le recycleur de Besson, ne s’occupant que de suites de franchises (Le Transporteur 3, Taken 2 et 3) ou bien de projets lointains (Colombiana, un temps annoncé comme la séquelle de Léon portant sur le personnage Mathilda), s’est nettement amélioré par rapport au film précédent, il faut bien l’avouer : les séquences d’action sont plus énergiques, plus entraînantes et plus palpitantes, à tel point que vous verrez des course-poursuites avec des voitures valdinguant dans les airs et des explosions à tout-va. Même les scènes au corps-au-corps se révèlent bien plus percutantes, sans que cela n’atteigne le niveau du premier film. Mais cela n’enlève rien au fait qu’Oliver Megaton est un très mauvais réalisateur. Parce qu’il livre un divertissement à la mise en scène impersonnelle aux allures de clips ? Toutes les productions Besson possèdent cette étiquette. Non, le problème est que le bonhomme ne sait pas faire un film d’action. Atteint d’une mollesse extrême dans Taken 2, il plonge ici dans le too much question dynamisme : la caméra tremble dans tous les sens faisant perdre les points de repère spatio-temporels aux spectateurs, pour finaliser le tout par un montage qui enchaîne des plans d’une durée inférieure à une seconde chacun. Le résultat est tout simplement illisible et fait perdre le fil des séquences du film, même quand l’action ne pointe pas encore le bout de son nez, toujours à cause de ce montage qui semble sauter du coq à l’âne bien trop souvent (cela se remarque dans l’introduction du film). Si Taken 3 ne se montre pas à la hauteur du 1 à son tour, c’est encore une fois la faute à ce cinéaste que semble pourtant apprécier Luc Besson au point de lui donner la plupart de ses productions à réaliser.

Cela ne fait aucun doute, Taken 3 n’est pas le meilleur film d’action, perdant ses nombreux atouts de divertissement bien calibré dans une réalisation véritablement mauvaise. Mais la catastrophe qu’avait été Taken 2 est évitée haut la main, grâce à un scénario qui oriente la saga sur de nouveaux horizons, du peps et un Liam Neeson toujours aussi charismatique, permettant au film de n’être jamais ennuyeux (c’est toujours mieux qu’Expendables 3 et Lucy). Taken 3, le dernier de la franchise ? À en croire le comédien et le chiffre que fera ce long-métrage au box-office, il faudra bien s’attendre à ce qu’un quatrième opus voit le jour. Pourquoi pas ? Du moment que Besson trouve un autre réalisateur ou fasse de nouveau appel à Pierre Morel, aucune raison d’être contre !

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le 21 janv. 2015

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