Impossible d'apprécier Taxi Téhéran sans le replacer dans son contexte politique: Jafar Panahi, suite à une interdiction de filmer et une peine de prison, utilise ici le procédé d'une caméra camouflée embarquée dans un taxi et s'improvise chauffeur pour mettre en scène des tranches de vies qui lui permettront de distiller sa critique acerbe de la situation iranienne.


A travers des personnages haut en couleurs, comme ce voleur voulant condamner à la peine de mort les autres voleurs (qu'il qualifiera de "losers" bien moins habiles que lui), ce sont des tableaux particulièrement bien léchés que nous présente ce chauffeur de taxi un peu empoté qui ne dépose jamais ou presque ses clients au bon endroit. A l'arrière de son taxi, on crie, on pleure, on manque de mourir, on fait du business...


Car chacune des différentes scènes traduit une facette particulière des interdictions et absurdités vécues par les iraniens: la "noirceur" interdite et ne pouvant être montrée dans les films iraniens est omniprésente, et rappelle le poids qui pèse sur les épaules du peuple iranien.


Un des tours de force de Jafar Panahi est aussi, dès le premier plan, filmé par la caméra embarquée et assimilant le pare brise à ce qui sera notre écran de cinéma d'entraîner le spectateur à travers les différents supports d'image: on passe de la caméra du taxi à son téléphone portable, puis à celle de sa nièce, qui veut aussi faire un film pour l'école, et être récompensée, tout en devant respecter la liste d'obligations et d'interdictions des lois islamiques permettant à un film d'être "diffusable".


Même si les différentes tranches de vie sont inégales, on retiendra surtout le personnage de la nièce du réalisateur, contestataire, vive, éveillée et particulièrement critique et cette scène finale des deux motards voulant voler / détruire la caméra, témoin du discours du réalisateur.


Finalement, Taxi Teheran est un film qui vaut clairement le détour et qu'il ne faut surtout pas réduire à un enchaînement de scènes de vie.

Bluemornings
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le 23 avr. 2015

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