Tout le monde le sait que Jack Black adore le rock, puisqu’il a joué dans Rock Academy, hey.


Oui, mais l’acteur est aussi chanteur et musicien. Avec Kyle Gass, rencontré au sein du théatre expérimental The Actor’s Gang fondé par Tim Robbins, ils ont crée Tenacious D, un groupe de rock aux paroles comiques et outrancières. Quatre albums ont été sortis, plusieurs tournées, différentes collaborations, et même deux séries, une série sur HBO et une autre animée sur Youtube.


Et puis le film, sorti en 2006. Scénarisé par Jack Black et Kyle Gass, réalisé par Liam Lynch, qui avait déjà travaillé avec le groupe sur un de leurs vidéo clips. Oh, bien sûr, il n’est pas parfait. Et c’est peut-être ce qui le rend si attachant.


Tenacious D et le Médiateur du Destin va ainsi relater la rencontre entre JB et KG, dans une version évidemment fortement ro(ck)mancée, plongée dans les eaux sales de cette musique de sauvages. Où JB est élevé dans une famille religieuse conservatrice alors que lui ne rêve que de rock. Chassé par son père il va faire la rencontre de KG, guitariste de rue de Venice Beach dont il sera le seul du public à en louer le talent. Prêt à tout pour travailler avec lui, il va se mettre à suivre ses enseignements, avant de se rendre qu’il n’est qu’un prétentieux paresseux subventionné par sa mère. Mais JB a une destinée dans le rock à accomplir, c’est Dio de Black Sabbath qui lui a dit depuis un poster, et il va mettre le doigt sur un point commun entre plusieurs groupes légendaires, un médiator bien spécial qui serait sculpté dans la dent de Satan. C'est peut-être ce qu'il leur faut pour leur groupe.


Pour le rock !


Comédie un peu régressive, Tenacious D a l’impertinence immature du rock, les dialogues sont fleuris, parfois très imagés. Quelques gags un peu gras seront dans la même veine. La subtilité n’est pas le fort du film, et on s’en fiche. JB et KG sont deux grands enfants, l’un ne vivant que pour le rock, l’autre étant un peu plus dilettante, son attention se détournera rapidement en présence de jolies représentantes féminines. Leur amitié devra se construire, sera ensuite mise à mal pour mieux se reconstruire, comme toute bonne relation amicale entre deux loosers de comédie américaine.


Jack Black use de ses mimiques habituelles, mais on le sent habité dans ce film, c’est l’une de ses prestations les plus convaincantes. Toutes les grimaces précédentes ou celles qui ont suivi ne faisaient que satisfaire la demande, c’est ici qu’elles sont les mieux utilisées. Il se montre même parfois terriblement charismatique, parfois obstiné, confus et d’autres fois déterminé, alors que tant de rôles dans d’autres films se contentent d’en faire une andouille. Kyle Gass est plus habitué aux seconds rôles, mais son physique quelconque lui donne un bel air de glandeur. Son jeu est limité, mais il a une certaine candeur, notamment quand il joue l’étonné, ce qui lui va bien.


JB et KG sont évidemment au coeur de Tenacious D, mais d’autres amis sont de la fête, tels que le rockeur Meat Loaf, Tim Robbins, Ben Stiller ou sa rockissime star Dave Grohl (Nirvana, Foo Fighters et d’autres grands groupes) qui incarne un formidable Satan dans la scène la plus folle et mémorable du film.


C’est d’ailleurs l’un des principales reproches qu’on peut faire au métrage, c’est qu’il n’est jamais aussi bon que quand il en fait trop. Que ce soit ces moments de comédie un peu régressive ou cette quête du médiateur, le film apparaît souvent bien trop classique, un peu trop dans l’imitation de certains clichés. Alors que le groupe Tenacious D a crée son style sur une certaine prétention, des paroles loufoques, une douce folie rock qui a parfois du mal à se retrouver ici.


Les morceaux qui composent le film sont bons, même s’il manque un peu de batteries (à mon goût). Jack Black est un excellent chanteur, ce qu’il arrive à faire avec sa voix est formidable, la modulant dans des aigus tout en gardant du coffre. Les paroles sont légères, parfois outrancières, et c’est un régal quand les scènes qui y correspondent en font trop. Master Exploder, par exemple, est un titre entraînant, mis en images avec un crescendo d’idées de plus en plus folles, commençant par un micro enflammé par le souffle de Jack Black. Et la dernière musique, tellement puissante qu’il ne faut pas en parler, mais bien regarder le film jusqu’à celle-ci. Non, non, pas de triche sur Youtube.


Attention quand même à ne pas en faire trop, le segment hallucinogène franchissant beaucoup trop loin les portes de la gêne. Mais bon, je lui pardonne.


Le film suggère aussi la fin d’une époque pour le rock, Tenacious D n’a ainsi qu’un seul fan (JR Reed, membre d’un autre groupe de Kyle Gass, Trainwreck). Les ambitions du duo ne leur apporteront rien de plus. Dans une scène où KG est séparé de son compère, sa prestation dans une soirée étudiante va être rapidement écourtée, avant qu’il soit moqué. La musique d’ambiance reprendra avec celle du DJ. La jeunesse a perdu le goût du rock, à moins de KG ne soit juste pas si bon. Tenacious D est peut-être le meilleur groupe de rock du monde mais ils sont les seuls à pouvoir y croire, avec le spectateur qui les aura pris en affection. Leur meilleure prestation apparaît d’ailleurs presque comme un coup de chance.


Tenacious D et le Médiator du Destin apparaît donc comme mal réglé, se contentant d’une certaine mollesse alors qu’il avait de quoi être plus magistral, plus rock, plus cinglé. Ses meilleurs moments le prouvent, on rit et on rote de plaisir devant ses éclats de folie. On s’attache malgré tout à ses loosers sympathiques, ses rockeurs bien seuls, mais on sent qu’ils pouvaient faire mieux. Le film fit un flop mou en salles, mais le groupe Tenacious D est toujours d’actualité, ce qui n’est pas une si maigre consolation.

SimplySmackkk
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le 3 sept. 2020

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