Six ans après Terminator Renaissance, loin d'être aussi mauvais qu'on le prétend (pétri de bonnes idées, il s'avère même nettement mieux foutu et bien plus épique que Le Soulèvement des Machines), la franchise chère à tonton James Cameron est donc de retour - pour nous jouer un mauvais tour ? - en ce premier mercredi de juillet avec Terminator Genisys.
Ou la promesse d'un premier opus novateur et respectueux d'une nouvelle trilogie indépendante proposant une relecture des mythiques Terminator et Terminator 2; le tout dominé par un Schwarzie sur le retour et une pluie de nouveaux comédiens aussi talentueux qu'ils sont demandés ces temps-ci à Hollywood.
Sur le papier, cette version 2.0 des événements majeurs de la sage (enfin, des deux premiers films) a de quoi faire tiquer un brin, même si Terminator incarne l'un des seuls divertissements populaires des 80's/90's - avec le précieux Retour vers le Futur - a pleinement maitriser le concept casse-gueule du voyage dans le temps.
Remake/reboot masqué histoire de légitimer sa production, porté par un T-800 vieillissant (pas le fait le plus abracadabrant, puisque la peau des cyborgs est organique) et qui efface volontairement les deux précédents films pour mieux s'imposer; Genisys pue le projet bordélique et risqué à plein nez, et ce ne sera pas son affreuse et maladroite campagne promotionnelle, bourrée jusqu'à la gueule de spoilers dévoilant LE twist majeur de l'intrigue (John Connor en grand méchant mi-homme mi-machine), qui aura rassurer les fans que nous sommes quand à sa potentielle qualité.
Mais après vision, le film incarne t-il finalement la purge tant redoutée ou une surprise sur pellicule aussi étonnante qu'improbable ?
Difficile à dire, car comme il le laissait présager, le film d'Alan Taylor est coincé le cul entre deux chaises, à savoir une volonté d'offrir un blockbuster contemporain efficace et divertissant, tout autant qu'une véritable suite à une franchise fragile mais frappée par le saut d'un génie du septième art.
Comme ce fut le cas il y a quelques temps avec Jurassic World, qui lui aussi accumulait les références à l’œuvre original mais qui parvenait pourtant joliment à s'en affranchir - dans la généralité -, pour incarner une véritable suite hommage à Jurassic Park.
Porté par un premier tiers référentiel mais franchement prenant, situé en 1984 et auto-citant de manière assez réjouissante Terminator, tout en offrant un passé alternatif plutôt bien vu aux personnages; Genisys incarne sans forcer la meilleur suite au diptyque de James Cameron, accumulant les bonnes idées - mais mal agencées - tout en se perdant pourtant dans une seconde partie lourdement bancale et en complète roue-libre.
Une seconde partie beaucoup trop retorse et complexe narrativement qu'elle ne devrait l'être - la ou Terminator 1 et 2 assénaient leur riche intrigue avec simplicité -, alignant les rebondissements et les sauts temporels en veux-tu en voilà au point de paraitre méchamment tirée par les cheveux (Sarah Connor, comme dans la série, se téléporte dans le temps...), quand elle ne se perd pas dans une pluie de dialogues explicatifs parfois ennuyeux.
Derrière la caméra, Alan Taylor, qui ne brillait pas vraiment par son talent sur Thor : Le Monde des Ténèbres, suit à la lettre son cahier des charges au niveau action, en cornaquant des scènes certes spectaculaires et balancées à un rythme effréné mais tellement impersonnelles et botoxées au numérique que s'en est presque indécent.
Et c'est bien là que le bas blesse, car si le film avait toutes les cartes en main pour offrir un véritable troisième opus dans la droite lignée de ces illustres prédécesseurs, il manque clairement d'un vrai cinéaste à la barre capable de trancher dans le vif de volontés pas toujours maligne comme celle d'offrir un divertissement populaire à coups de violence lisse (classé tout public, la violence assumée qui était la cerise sur le gâteau des films de Cameron est ici invisible) et d'humour pas toujours très fin (les punchlines sont légions, et on joue un petit peu trop sur l'âge avancé de tonton Schwarzie), le tout porté par un casting plus bankable que finement choisit.
Car si Emilia Clarke convainc plus ou moins (bon plus que moins parce que la Sarah cette fois est vraiment sexy) dans la peau badass de Sarah Connor, et que Jason Clarke sauve les meubles dans la peau pas forcément évidente d'un John Connor plus révolté qu'à l'accoutumée, c'est décemment la présence de Jai Courtney qui gâche véritablement la fête.
Aussi fade qu'un yaourt 0%, déjà horrible en rejeton MacClane dans le tout aussi foireux cinquième (ah tiens, là aussi cinquième film d'une franchise culte) opus de la saga Die Hard.
Plat, rarement charismatique, il peine à rendre vivant son Kyle Reese et son alchimie avec Clarke - la romance Connor/Reese est d'ailleurs totalement zappée - frôle le néant.
Reste que Schwarzenegger, impérial (même si il apparait de manière assez étrange dans la seconde moitié du métrage), porte si merveilleusement le film sur ses (toujours) larges épaules qu'il parviendrait presque à nous faire oublier la plupart des défauts du film sous le coup de la joie immense et nostalgique, de le voir reprendre son rôle le plus culte (par Krom, qu'est-ce que cela va être quand il reprendra l'épée de Conan !).
" Old, but not obsolete " et en véritable père pour Connor (plus encore qu'il l'était pour John dans Le Jugement Dernier), il crève l'écran et sa relation avec Emilia Clarke elle, ne manque cette fois-ci pas d'alchimie puisqu'elle est aussi touchante qu'irrésistible.
Pas complétement la purge redoutée sans pour autant incarner le blockbuster number one de l'été, Terminator Genisys incarne une pimpante série B de luxe, fun et respectueuse mais qui peine à se forger sa propre identité et s'avérant in fine à des années lumières de l'aura majestueuse et unique des deux premiers Terminator, deux blockbusters d'auteurs comme on en fait (presque) plus.
On n'en attendait pas grand chose, on en ressort donc pas forcément déçu pour autant.
Jonathan Chevrier
http://fuckingcinephiles.blogspot.fr/2015/07/critique-terminator-genisys.html