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L'Amérique est encore capable de se moquer de nous

    Parodie même pas satire. Politiquement correct, voire ennuyeux de correction. Voilà le parfait film indépendant pour festival à la mode. Bien propre sur soit, filmé façon clip vidéo, hystérie au montage, et dialogues très punch-cocktail, comme pour un amuse-gueule série télé. On a utilisé toutes les astuces possibles, pour faire croire qu’il se passe quelque chose à l’écran, alors qu’il ne se passe rien. N’oublions pas le générique clipesque, en forme de paquet de Mâle-Boro, et le casting, on ne peut plus glamour. Il ne manque plus que le sujet, verbe, complément.


    Aaron Eckhart fait son job d’acteur, et toute sa fougue tombe à plat, et vire cabotinage, parce qu’il ne dit rien de plus que son texte. Où est le cynisme supposé du film ? Son incorrection ? Sa « charge » contre l’industrie du tabac ? On reste devant la porte du bureau, mais on n’enfonce pas la porte. Aaron est un père de famille qui fait son job, et la caméra est collé sur lui, à un moment je me suis dit que le vrai sujet du film, c’est lui. Donner un rôle à la hauteur pour le faire briller dans un premier rôle, lui habitué à être le second couteau de luxe. Son patron est comme lui, un honnête travailleur, le grand boss, n’en parlons pas, c’est lui dans 20 ans. Se sont tous des pantins de l’American Zoo, et pas les plus flamboyants. On gueule fort, on tape du poing sur la table, mais avec une telle bonne humeur qu’on n’a même pas l’occasion de rire ; sourire, peut-être. Et un premier degré intégral qui nuit considérablement à la crédibilité du film. Le gars qui a écrit ça, a oublié qu’un film n’est pas que des dialogues mit bout à bout, même si ça claque dans la tête. Les personnages doivent vraiment vivre, eux aussi, et exister un peu.


   On a choisit de tout concentrer sur la figure de Nick Naylor/ Eckhart, Méphisto pour les intimes, (rien que ça), avocat, qui défend sa boîte : l’industrie du tabac. Rien n’est fait pour le rendre antipathique ou le montrer tel qu’il devrait être, un tant soit peu cynique ou dangereux.  Son seul acte répréhensible, c’est de trouver la journaliste (Katie Holmes) à son goût, et donc de faire une faute de déontologie, mélanger le travail et le plaisir. (En même temps, c’est Kate Holmes, je le comprends). C’est  tout ?


  Un sourire de VRP professionnel, qui renverse tous les obstacles par un bon mot, et quelques voltes-faces, le héros américain dans toute sa splendeur. Et l’industrie du tabac dans tout ça ? Un prétexte pratique pour vendre le pitch. Les méfaits du tabac sont-ils soulignés ne serait-ca qu’un petit peu ? Le jeune cancéreux que Naylor rencontre sur un plateau télé, à l’air plus alerte que vous ou moi (?) Le député écolo qui doit lui donner la réplique ne fait pas le poids, même si l’acteur devrait faire le poids (W. H. Macy, sous employé). Quelques répliques qui tuent comme de la fumée de cigarette, et le tour est joué.


   Je parle pour moi, mais un méchant de cinéma, qui cause pas moins de 100 000 morts par jour, ça doit faire plus « peur » que ça. Ou alors c’est à désespérer du cinéma. Et le gag du Club Des Tueurs, MDM pour marchands de mort. Club où il se retrouve avec un représentant du lobby des armes, un autre du lobby des vendeurs d’alcool, pour jouer à qui a la plus grosse bite, (en gros qui est le plus salaud), ça ne fonctionne pas, ça reste à l’état de sketch. Mauvais script, film gag. Film choral, et stand up de Aaron.


On est plus proche du buddy-movie, avec les répliques entre copains, et la détente habituelle, que du choc annoncé , (signal de fumée, peu de cendres). Les seuls qui sont ridiculisés, sont la journaliste, et le député écolo. Et l’ancien cowboy de chez Mal-Beauro, qui veut faire un procès à sa boîte, mais qu’on va acheter à coups de dollars bill. C’est tout ? Les vrais lobbyistes de l’industrie du tabac ont dû bien rire, eux, en voyant le film. C’est pas ça qui va leur faire du mal, t’inquiète. Bien au contraire. Le titre du film n’était donc pas une feinte. Allez-y, faîtes comme au cinéma, grillez-en une, c’est cool ! Par contre toutes les critiques élogieuses de la presse dite spécialisée, elles m’inquiètent un peu.

Angie_Eklespri
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le 4 mai 2016

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