Parler de la crise dans un film n'est pas chose aisée, le trop sombre et incompréhensible Margin Call s'y était cassé les dents avant que Le Loup de Wall Street remette sur les rails une certaine compréhension pour que le public suive ces données sans forcément les approuver.
Alors quand vient le tour de The Big Short, on se dit que le film a assez de recul, et sur la situation économique qu'a engendré la crise de 2007, et sur les attentes du public vis-à-vis d'une histoire complexe de traders, de MBC et CDO.
Il faut reconnaître que de ce point de vue là The Big Short respecte entièrement cet imbroglio de sigles que le spectateur lambda ne saura de toute façon pas assimiler. Jouant à la fois sur deux tableaux, essayant d'un côté d’expliquer la crise tout en sachant parfaitement que c'est une chose ardue. Du coup la réalisation avec une caméra hésitante et des personnages qui s'adressent aux spectateurs prend le contre-pied en avouant d'emblée que cette crise n'est pas une sinécure d'explications limpides, bien au contraire.
L'humour que dégage le film, dû au passé du réalisateur, vient rendre le tout plus plaisant et plus facile d'accès, jouant à fond la carte de la dérision quand on use de personnes célèbres pour vous expliquer simplement ce que les banques ont créés pour vous couler. L'utilisation de Margot Robbie, femme du personnage intrépide dans Le Loup de Wall Street ne manque pas d'ironie ; et les explications visuelles apportées ramenant au plus simple des faits compliqués sont des métaphores intéressantes, utiles tout en étant drôle.
La grande réussite réside aussi dans la manière d'aborder les faits, ne privant pas le spectateur de l'enquête qui se déroule. En vivant l'enquête de terrain d'un groupe d'investisseur suspicieux sur la manière dont est gérée l’économie (pour faire simple), cela permet de voir les impacts et la stupidité d'une telle crise. On arrive à mieux comprendre comment le château de carte s'est écroulé à partir du moment où il n'y a plus aucun regard sur les revenus des emprunteurs, ouvrant la voix à des irresponsabilités dignes d'un coup de pied au cul (à l'image de cette strip-teaseuse multi-propriétaire).
En plus de se targuer d'un bon scénario et d'une mise en scène astucieuse (mon acolyte fait référence à The Office), le casting est parfait. Christian Bale et Brad Pitt sont méconnaissables, Steve Carell et Ryan Gosling excellent et la suite du casting n'est pas en reste. Chacun campant des personnages aussi jouissifs qu'hypocrites. Car il y a tout de même quelque chose qui nous taraude durant tout le film : si ces mecs ont compris avant tous les autres l'impact des subprimes sur l'économie, aucun ne s'est demandé si il ne fallait pas les dénoncer plutôt que parier contre ; à l'image de Brad Pitt, qui loin de danser comme ses camarades prend conscience de la vague qui va déferler sur les gens ; tout comme Steve Carell, qui brandit son drapeau contre l'injustice durant tout le film, se pose un sérieux cas de conscience.
Au final, le film aurait besoin d’être revu pour réussir à comprendre tous les enjeux, tout comme il est utile d'ouvrir le débats avec ses acolytes tant le film est riche à plusieurs niveaux. En tout cas il aura réussit son pari de nous ouvrir les portes d'un système défaillant ; un film cynique plus qu'humoristique, assumant pleinement son sujet, qui n’oublie pas de souligner l’éternel recommencement d'une telle arnaque.

LuluCiné
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le 7 janv. 2016

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