Avec deux succès commerciaux et critiques de grande ampleur en poche, Christopher Nolan fait désormais partie de ces réalisateurs dont le moindre projet en cours suscite un engouement quasi messianique. Et en 2012, nul autre film que The Dark Knight Rises, suite de l’incontestable réussite qu’avait été The Dark Knight – Le Chevalier Noir, ne pouvait représenter cet enthousiasme naissant. Il était surtout curieux de voir si le Britannique allait continuer sur sa lancée, livrant un ultime opus qui partait déjà de base avec deux handicaps majeurs : le décès du comédien Heath Ledger (qui aurait dû initialement apparaître dans une bonne partie de ce film) et le fait de devoir dépasser l’épisode précédent, qui avait mis la barre très, très haut.

La comparaison avec The Dark Knight était inévitable et le constat tombe très rapidement : ce troisième film est, en quelque sorte, une déception du point de vue scénaristique. Non pas que les frères Nolan et David S. Goyer oublient de traiter le personnage de Bruce Wayne/Batman, ce dernier ayant subi un travail d’écriture digne de ce nom dans la continuité des films précédents, lui offrant une fin grandiose à sa longue et douloureuse épopée. Une mauvaise écriture alors ? Cela serait étonnant de la part de Nolan et The Dark Knight Rises prouve bien le contraire, le long-métrage regorgeant de séquences qui sauront à la fois émouvoir (Alfred révélant la vérité sur Rachel), capter votre attention et divertir, et ce grâce à des répliques qui font toujours autant mouche, souvent par le biais d’un second degré souvent bienvenu. Sans compter les innombrables métaphores qu’emploie le film pour montrer la chute du Chevalier Noir et sa renaissance (Bane surgissant des bas-fonds de Gotham, la sortie de la prison, les policiers coincés dans les boyaux de la ville…). Alors, qu’est-ce qui ne va pas dans le scénario de ce troisième opus ?

La faute principalement à la faible ambition de Nolan vis-à-vis de ce Dark Knight Rises : mettre fin à sa trilogie, ni plus ni moins. Il ne cherche plus à révolutionner quoique ce soit ou bien à surprendre le spectateur comme il le faisait depuis son court-métrage Doodlebug. Ici, il suit juste la descente aux enfers de son héros et son apothéose tout en oubliant les autres personnages, un peu trop nombreux pour être traités convenablement et surtout équitablement (Miranda Tate, John Blake) ou qui servent plus le fan service qu’autre chose (Selina Kyle). Christopher Nolan donne l’impression qu’il voulait vraiment en finir avec le Chevalier Noir, au point de tout condenser en un film de 2h40, créant quelques longueurs qui pourront agacer ceux qui ne seront pas entrer dans l’histoire et allant jusqu’à bâcler une ou deux scènes avec une sensation de fait à la va-vite (la prestation finale de Marion Cotillard). Avec cette ultime croisade de Batman, Christopher Nolan n’arrive pas à impressionner comme il l’avait fait avec ses films précédents, et c’est sans doute pour cela que The Dark Knight Rises ne parvient pas à les égaler. En même temps, le réalisateur avait habitué son public à plus d’originalité et de puissance d’écriture, rarement il s’était contenté d’autant de (bonne) simplicité.

Et c’est ce manque d’audace comparé à l’uppercut qu’avait été The Dark Knight qui provoque cette déception face à cet ultime opus qui, malgré ce constat, bat haut la main la majorité des blockbusters hollywoodiens dont Batman Begins. Car si les deux films n’ont pas les qualités d’écriture d’un Prestige ou d’un Inception, The Dark Knight Rises surpasse amplement le premier opus de la trilogie par tout ce savoir-faire et cette aisance que Nolan a acquis au cours de sa carrière américaine. Il reprend ainsi la photographie de Wally Pfister qui transforme chaque scène (dont l’introduction, le premier duel Bane/Batman, la course-poursuite finale…) via une utilisation judicieuse de l’IMAX, un montage dynamique au possible, une musique encore plus tonitruante qu’à l’accoutumée (Hans Zimmer en solo pour cet opus), un enchaînement de séquences d’action (bien filmées soit dit en passant) à la Inception pour faire monter crescendo une tension palpable et d’effets spéciaux faits « à la main » tout bonnement réussis, une fois de plus. Sans compter un casting d’excellente facture, même si Tom Hardy (Bane) ne parvient pas à surpasser Heath Ledger tandis que Marion Cotillard doit continuer sa carrière avec une séquence qui va la poursuivre à jamais sur les réseaux sociaux.

En clair, The Dark Knight Rises, bien qu’il se montre décevant à ne pas surprendre autant qu’un Dark Knight ou un Inception, reste toute de même un blockbuster grandement divertissant et ayant la classe et l’envergure nécessaire pour se hisser au panthéon du genre. Un super-hero movie mature, sombre et travaillé, voilà ce qu’est The Dark Knight Rises. Aucune raison de faire la fine bouche devant la meilleure conclusion que pouvait donner Nolan à sa trilogie ! Sauf si vous voyez en ce long-métrage le signe que le réalisateur devait passer à autre chose pour poursuivre sa carrière cinématographique avec autant d’audace qu’à son habitude.
sebastiendecocq
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le 28 juil. 2012

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