Greg McLean : retour à la violence primitive du mythe (5/6)

The Darkness constitue certainement le film le plus faible de son auteur, Greg McLean, la faute à une forme pauvre qui ne laisse percevoir aucune appropriation du genre investi, sinon l’exécution mécanique d’un cahier des charges. Tout cela est assez longuet, tout cela ne fait guère peur, en dépit d’un segment final plutôt réussi.


Néanmoins, même raté, ce long métrage atteste la persistance des thématiques qui définissent le geste cinématographique de McLean : confronter une communauté fragmentée – l’embarcation de touristes dans Rogue, le groupe d’amis dans Wolf Creek et Jungle, les collègues de bureau dans The Belko Experiment, la famille dans le film qui nous intéresse, The Darkness – à une entité supérieure et qui met en péril son existence, à l’incarnation physique d’une totalité mythique en rapport direct avec la création du monde. Ce sont les Indiens Anasazis qui incarnent la menace, cinq esprits maléfiques qui se plaisent à tourmenter les êtres en les confrontant à leur ombre, c’est-à-dire à leurs vices, à leur part cachée ; le film prend aussitôt l’aspect d’un tribunal devant lequel est convoquée la famille, une puissance qui rouvre les blessures passées, dévoile les secrets, exhibe la faiblesse profonde de l’homme. Bronny Taylor se demande d’ailleurs si les perturbations qui viennent déstabiliser son quotidien ne sont pas les signes d’un karma qui la raccorderait, elle et son mari, à l’idée de faute primitive, cette conviction qu’ils sont responsables de l’autisme de Michael.


Car le long métrage introduit un personnage de jeune garçon autiste, ce qui lui permet de s’éloigner des sentiers battus pour proposer autre chose, une communication entre les esprits et le trouble en question en raison d’un rapport différent aux autres et au monde. D’autant que l’autisme n’a pas pour finalité d’être ici représenté comme une pathologie, mais constitue une clef donnant accès à un autre niveau de réalité, ce qui est certainement idéaliste, ce qui est certainement faux, mais qui a le mérite de brosser les traits d’un personnage qui participe à l’intrigue, qui la construit.


The Darkness est un film mineur, une ombre dans la petite carrière de son metteur en scène, un film qui dissémine néanmoins sous une forme convenue une réflexion sur la culpabilité parentale révélée par la confrontation à la violence des mythes primitifs.

Fêtons_le_cinéma
5

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Le cinéma de Greg McLean : retour à la violence primitive du mythe

Créée

le 29 mars 2020

Critique lue 272 fois

2 j'aime

7 commentaires

Critique lue 272 fois

2
7

D'autres avis sur The Darkness

The Darkness
Fêtons_le_cinéma
5

Greg McLean : retour à la violence primitive du mythe (5/6)

The Darkness constitue certainement le film le plus faible de son auteur, Greg McLean, la faute à une forme pauvre qui ne laisse percevoir aucune appropriation du genre investi, sinon l’exécution...

le 29 mars 2020

2 j'aime

7

The Darkness
RAF43
5

"Greg McLean en mode Hollywood !"

Après nous avoir terrifiés avec «Wolf Creek», fiévreux survival australien dont le méchant Mick Taylor entrera au Panthéon des ordures finies, McLean enchaîne en 2007 avec «Rogue», excellent film...

le 1 nov. 2016

2 j'aime

The Darkness
Baron_Samedi
6

Critique de The Darkness par Baron Samedi

The darkness : Peter et Bronny Taylor sont les parents de Michael et Stéphanie. Michael souffre d'autisme, et ses réactions et comportements sont plutôt imprévisibles. Lorsqu'ils reviennent de...

le 23 oct. 2016

2 j'aime

Du même critique

Sex Education
Fêtons_le_cinéma
3

L'Ecole Netflix

Il est une scène dans le sixième épisode où Maeve retrouve le pull de son ami Otis et le respire tendrement ; nous, spectateurs, savons qu’il s’agit du pull d’Otis prêté quelques minutes plus tôt ;...

le 19 janv. 2019

86 j'aime

17

Ça - Chapitre 2
Fêtons_le_cinéma
5

Résoudre la peur (ô malheur !)

Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point...

le 11 sept. 2019

77 j'aime

14