The Day par pierrick_D_

"The day",c'était pas leur jour.Cinq survivants de l'Apocalypse se baladent à travers des contrées en apparence désertes,mais qui sont en fait infestées de groupes de cannibales désireux de les boulotter.Ils s'installent dans une maison abandonnée,où ils sont bientôt assiégés par les viandards affamés.Ce post-apocalyptique canadien,présenté à Gérardmer en son temps,est réalisé par le clipeur manchot Douglas Aarniokoski,celui qui avait enterré la franchise "Highlander" avec son piteux "Endgame",tandis que deux des comédiens,Shawn Ashmore et Dominic Monaghan,sont co-producteurs du film.En l'occurrence,ce brave Doug a fourni un excellent travail technique.Il fait de la belle image,utilisant un noir et blanc tirant parfois sur le sépia qui masque opportunément le manque de moyens de l'entreprise tout en lui conférant une patine "cinéma d'auteur" et parvient à installer une ambiance oppressante à coups d'effets visuels et sonores efficaces,alors que la musique colle parfaitement à l'action.Dommage que la première partie du film soit complètement ratée,avec une mise en place qui est plutôt une mise en surplace.Scènes vides étirées au maximum et au-delà,dialogues affectés qui ne disent cependant rien,cette entame calamiteuse plombe le film d'entrée.Il est vrai qu'on assiste généralement à l'inverse,une chute de rythme vertigineuse succédant à un début fracassant.Autre défaut,le manque d'originalité du projet.Un post-apo en noir et blanc,ça fait tout de suite penser à "La nuit des morts-vivants" ou au "Dernier combat",mais il y a plus grave car le scénario de Luke Passmore est étrangement proche de celui de "La route" de John Hillcoat,sorti trois ans avant et adapté du formidable roman de Cormac Mc Carthy.Et le script de Passmore recèle en outre quelques grosses incohérences.Comment par exemple les membres du groupe n'ont-ils pas vu le tatouage qu'arbore Mary en haut de la cuisse alors qu'ils sont ensemble H24 et que la fille est vêtue d'une petite robe ras de la moule?Pourquoi les anthropophages ne rappliquent-ils pas en nombre à la maison dès l'alarme déclenchée,laissant ainsi à leurs proies le temps de fuir ou de s'organiser?Pourquoi n'ont-ils pas d'armes à feu,alors qu'ils ont tué des tas de gens et contrôlent des régions entières?Pourquoi la nature n'est-elle pas abîmée du tout après une catastrophe nucléaire,même si celle-ci date d'une dizaine d'années?Malgré ces problèmes scénaristiques,l'histoire fonctionne assez bien une fois l'action enclenchée,alignant même des péripéties intéressantes et des revirements de situations inattendus.Sur le fond,on retrouve le judicieux constat pessimiste sur la nature humaine qui était celui de "La route",à savoir que l'Homme,confronté à la faim,au froid et au désespoir,peut vite revenir à l'état sauvage.L'habileté de "The day" est d'atteindre un certain équilibre dans le traitement en évitant le schématisme.Certes,les deux groupes antagonistes ont fait des choix différents.Les héros tentent de survivre en conservant une certaine dignité,en essayant de se conduire de manière civilisée,alors que les cannibales ont abdiqué cette forme d'humanité et opté pour un comportement animal.Mais le film ne se contente pas,comme c'est la coutume,de traiter les seconds en abstractions maléfiques et en simples cibles à détruire,les décrivant au contraire comme des êtres humains dévoyés mais malgré tout capables d'éprouver des sentiments.Quant aux premiers,ils ne sont pas si sympathiques qu'on pourrait le penser,et leur obsession survivaliste les amène à transgresser leurs propres règles et à se conduire de manière totalement sauvage.Ce qui nous vaut beaucoup de scènes d'une extrême violence et d'une grande cruauté.Les combats,hélas,sont montés trop cut,la maladie du ciné d'action moderne.Les acteurs sont pour la plupart inconnus.Seuls Shannyn Sossamon et Monaghan,le hobbit Merry dans "Le seigneur des anneaux",bénéficiant d'une certaine notoriété.Mais c'est Michael Eklund,saisissant en chef de gang,qui impressionne,et surtout Ashley Bell qui rafle la mise.Stupéfiante de profondeur et d'énergie,elle incarne une guerrière torturée,dans tous les sens du terme,avec une conviction scotchante.Son personnage,coincé dans une situation inextricable,reste dans la mémoire.