Buscemi, Driver, Glover, Murray et Swinton : dans l’ordre d’engagement, d’apparition ou même du « STARmeter » d’IMDB, ça fait forcément saliver, y compris les fans de Peter Venkman ou de Kylo Ren et de l’Ancient One… Réunis par un réalisateur qui a su régulièrement donner un sens à l’adjectif « inspiré », et qui n’a jamais dévié de sa voie du samouraï, au point d’apparaître comme évoluant dans un temps différé, ça fait encore plus saliver… Autour d’un sujet permettant de reprendre la suite de George Romero, ou celle de Shaun of the dead, et d’augmenter le propos d’Only lovers left alive : on est presque étonné que le très rigoriste Festival de Cannes ait offert les honneurs d’une ouverture à la chose, même si cette fenêtre en forme de vitrine est précisément réservée aux films commerciaux ! Alors donc, l’heure est-elle venue, derrière ce titre ouvrant vers le monde des références, pour reprendre celui d’une série B des années soixante-dix, de découvrir le film de la théorie cinématographique du Tout, réconciliant les Anciens du beau et les Modernes du bon ?


Malheureusement, le point d’équilibre entre la lenteur injustifiée, qui est le travers récurrent de l’art et essai, et l’excitation factice, qui peut aller jusqu’à l’illisibilité de l’action, n’est jamais atteint ni même approché car le film n’est jamais efficace. Lourd dans ses citations et sa critique de la consommation, il n’évite ni la complaisance face aux corps attaqués, ni l’inutilité de personnages comme les jeunes de Cleveland, mise à part la voiture qu’ils utilisent pour ramener à Romero et à la lourdeur des citations. Les rares moments d’accélération et la grâce étrange de Swinton sont gâchés par les fils de l’intrigue perdus, comme le devenir des délinquants juvéniles, ou trop montrés, quand la musique titre est présentée comme telle et la fin annoncée, mais aussi par l’imitation maladroite du ton de Twin Peaks et l’apparition incompréhensible d’une soucoupe volante, qui ne peut servir qu’à renvoyer au Gendarme et les extra-terrestres. Car la montagne a tout simplement accouché d’une souris, et le panneau liminaire, interdisant les spectateurs de prendre ne serait-ce qu’une image du chef-d’œuvre, confirme rétrospectivement que tout n’était que vanité, sauf s’il s’agit de prouver que le cinéma de genre n’est pas une fille facile, ou que le cannibalisme cinématographique est le père d’enfants malades.


Pour public averti (et qui fraye de temps à autre avec le Festival comme certains vont voter, sans trop croire au changement) : The dead don’t die (2019) de Jim Jarmusch (qui mérite la palme de la meilleure bande-annonce si c’est lui qui l’a montée, car elle parvient à vendre le film sur ses seuls bons moments), avec aussi Iggy Pop (qui n’est pas exactement dans un rôle de composition puisqu’il joue un zombie) et Chloë Sevigny (qui prouve qu’il est plus difficile de jouer la panique que de faire une fellation sans la simuler)


Avis publié pour la première fois sur AstéroFulgure

Adelme
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le 15 mai 2019

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