Commençons par la fin.
Dans un style très road-movie, une petite bande de dépenaillés couverts de sang poursuivie par toute la police du canton fonce sur une route désertique, bientôt ils vont apercevoir devant eux le barrage de la mort sur lequel ont péris tant de road-movies, alors ils sortiront leurs flingues et dresseront au vent leurs chevelures blondes pour l'assaut final. Mais ils n'en sont pas tout à fait là, et pour l'heure, ils foncent sur fond de "Free as a Bird", et l'on pourrait presque voir flotter l'étendard de la confédération au dessus de cette scène. Car nous nous souvenons bien que le drapeau sudiste a été l'emblème de Lynyrd Skynyrd, le même groupe qui chantait "Sweet Home Alabama" en réponse au "nordiste" Neil Young mais également au bluesman JB Lenoir qui chantait lui plutôt " I'll never go to Alabama" (ce n'est pas un endroit pour moi, ils tuent ma soeur et mon frère, et tout le monde les laissent faire). D'ailleurs, l'examen de la musique de "The Devil's Rejects" ne laisse apparaître aucune trace de musique noire. Mais nous nous souvenons aussi que le groupe de Rob Zombie s'appelle "White Zombie", un hommage au film des frères Halperin mais qui commence à faire plus de "white" que notre lessive en poudre. Il y a bien un personnage noir dans "The Devil's Rejects" mais celui ci est le faux frère, le traître dont le spectateur appréciera le châtiment final.
Dans " 2000 Maniacs", Herschell Gordon Lewis avait également eu recours à de la musique country, avec notamment le fameux " The south is gona rise again" mais la manière de le présenter était totalement sans ambiguité. Ce qui n'est vraiment pas le cas dans le film de Rob Zombie. Et si je mets en regard ces deux films, c'est qu'ils illustrent tous deux cette Amérique blanche, pauvre et oubliée du monde. Celle là même qui espère tant en Donald Trump et qui pour une part, défilait récemment à Charlotteville en chantant des hymnes nazis, en faisant flotter fièrement au vent leurs drapeaux sudistes.
Je ne dis pas que Rob Zombie est un sympathisant nazi, ni même un raciste, il est bien trop malin pour sombrer dans de telles ornières mais le message qu'il véhicule reste clairement celui d'une Amérique blanche. Ceci étant dit, rembobinons notre film à son moment clé, celui où par un tour de force et d'esprit, le réalisateur arrive à retourner le public et à faire prendre en sympathie, la bande de psychopathes dont il s'évertue depuis une heure à vous montrer à quel point ils sont vraiment monstrueux. Mais pas des "freaks" attachants du tout, leur maison recèle un charnier de dizaines de corps torturés et mutilés, le long de leur route, ils tuent, ils violent, ils sont sadiques, pervers et incestueux. S'il y a un intérêt dans le film, il est précisément ici. Et s'il y a quelque chose de réellement dérangeant, c'est dans cette façon de monter toute la subjectivité du jugement humain, le notre, nous et notre civilisation spectatrice toujours entrainée à se placer derrière notre moralité. Et c'est une question, il me semble, à laquelle nous devrions bien réfléchir à l'heure des like et des dislike.
En conclusion, au delà de ces considérations citées plus haut, cela reste quand même cinématographiquement très moyen. Un peu comme une baraque de foire à trois lampions avec Sheri Moon devant l'entrée pour aguicher le pigeon.

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le 1 févr. 2018

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