J'en suis encore retourné comme un gant.


Etant un grand fan de Hopkins depuis des années, j'avais l'habitude de le voir plutôt dans des rôles puissants, de personnages tout en maîtrise et en confiance d'eux mêmes. Que ça soit Hannibal, Dr Ford ou Van Helsing, il m'a toujours fasciné par le charisme qu'il dégageait. Hopkins, c'était la classe incarnée.


Et puis Florian Zeller a cassé le mythe.
The Father est une leçon, déjà par l'humilité de sa mise en scène ; on sent que le scénario est tiré d'une pièce de théâtre mais le film est une vraie oeuvre de cinéma, avec beaucoup de bonnes idées de mise en scène, une maîtrise de chaque plan pour mieux déstabiliser le spectateur, et un talent certain pour instaurer une ambiance et la briser en un instant. Je ne suis pas expert mais j'ai vraiment trouvé la réalisation très efficace, notamment sur la manière que Zeller a de filmer l'espace, ses trop pleins, ses vides. On sent que, puisque le personnage se sent perdu, il s'attache à des objets, à des ambiances, à ce qui l'entoure. Et le réalisateur joue avec ça, en mouvant l'espace constamment pour nous perdre, comme Anthony l'est. Ca, c'est déjà une grande qualité du film. Cependant...


Là où Zeller fait son home run, c'est sur la direction d'acteur.
On aura rarement donné un oscar aussi mérité que celui qu'a reçu Hopkins. Sa performance est assez indescriptible, tant elle est multiple. Tour à tour agaçant, pitoyable, détestable même puis enfin profondément sympathique... Ca faisait longtemps que j'avais pas autant oublié l'acteur derrière son personnage, la confusion étant d'ailleurs voulue par le réal. Olivia Colman est incroyablement juste, elle aussi, toujours sur le fil, à deux doigts de s'effondrer et pourtant si forte. Leurs échanges m'ont tiré plus d'une fois des larmes tant j'avais l'impression de revivre une situation familiale douloureuse, pour une fois en tant que spectateur. Des personnages aussi bien écrits, servis par de tels acteurs, on voudrait voir ça plus souvent.


Au fond, je n'aime pas l'idée, présente dans la com autour, que ça soit "LE film sur la démence sénile", mais je pense que malgré tout, beaucoup de gens y retrouveront quelque chose de vrai, de profondément humain. Et dans ces temps où le cinéma échoue souvent à toucher juste, c'est précieux. Ici, pas de gentils, pas de méchant, on n'y sauve pas le monde, on se contente juste d'accompagner, de faire l'effort matin après matin d'enfiler une paire de pantalon et une chemise, parce que c'est tout ce qu'il reste à faire.

Llanistar
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le 4 mai 2021

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