L'étrange destinée de l'Homme...

L'un de mes grands-pères disait, à chaque naissance de l'un de ses petits-enfants : "encore un (ou une) qui s'envole vers la mort ! Je lui souhaite la vie la plus longue mais en bonne santé". Et pour se faire pardonner de cette réflexion assez décalée, il offrait un superbe ours en peluche. Pour la petite histoire, ce grand-père en question souffrait le martyre car il avait été gazé et torturé pendant la seconde guerre mondiale... Il respirait très mal et ne pouvait faire aucun effort. Il est décédé à 74 ans, ce qui s'est avéré être un exploit. C'est ainsi.
Ici, dans ce film, c'est la mémoire de ce grand-père qui fout le camp... Et rien ne pourra empêcher sa déchéance lente qui ne pourra que se terminer par la mort. Nous connaissons tous cette situation à un niveau ou à un autre. La fragilité de notre cerveau fait qu'il vieillit parfois plus vite que le reste de notre corps, faisant des dégâts irréversibles dans notre conscience et nos souvenirs. Je peux comprendre certaines prises de position par rapport à l'euthanasie...
Ce film mérite notre attention car il nous pousse dans nos convictions et ébranle nos certitudes : que ferons-nous si nous y sommes personnellement et intimement confrontés ? A condition que nous conservions une once de conscience...
Anthony Hopkins est assez époustouflant dans ce rôle et porte subtilement à 84 ans, cette dérive intellectuelle à laquelle rien ne pourra s'opposer.
Un film lucide, minutieux, intime qui vous enserre sans vous lâcher pour mieux pour confronter à la finalité de la vie. Pourquoi mourir tardivement si c'est pour souffrir ou être absent... La vie doit-elle quémander son utilité pour mieux nous sacrifier ? Étrange destinée que celle de l'Homme...