Qu'un cinéaste talentueux de la trempe d'Eli Roth peine à atteindre nos salles obscures relève autant du ridicule que de la triste réalité d'un business ou peu de metteurs en scènes peuvent aujourd'hui se targuer d'avoir l'assurance de voir leur film décemment distribuer.


Reste qu'après six ans d'absences, et alors que son divertissant mais bancal Knock Knock a tout récemment foulé nos salles obscures, le Eli semble doucement mais surement truster de nouveau l'actualité, pour preuve la sortie en e-Cinema de son Green Inferno ce mois-ci, projet de longue haleine tourné en 2012 et passé par le TIFF en 2013.


Deux piges d'un chemin de croix semé d'embuches qui trouva finalement le salut grâce à l'appuie solide du moneymaker de l'horreur made in US number one, Jason Blum, qui permit au film d'être distribué à la fin du mois de septembre outre-Atlantique, après avoir flirté avec les multiplexes d'Amérique latine.


Après s'être amusé à revisiter à sa sauce le film de virus avec Cabin Fever, le torture porn via Hostel et sa suite, ou encore le home invasion avec Knock Knock, le Eli s'attaque donc à un nouveau sous-genre du cinéma d'horreur et pas des moindres, le film de tribu cannibal immortalisé par l'insoutenable Cannibal Holocaust de Ruggero Deodato; sans conteste l'un des plus haut sommet du cinéma extrême et viscéral (et accessoirement l'un des tout premiers found-footage).


Assumant pleinement ses (nombreuses) références, filmé comme un bis italien des années 70 - l'époque de l'âge d'or du genre - tout en s'attachant à ne pas uniquement bazarder ses scènes gore histoire de rendre mal à l'aise son spectateur; à l'instar de Romero et des ses zombies, Roth à quelque chose à raconter dans son Green Inferno et use du cannibalisme tribal pour valeureusement cracher sur l'activisme vert creux et visant bien plus à flatter l'égo qu'a réellement aider des peuples dans le besoin.


Éprouvant (dans le bon sens du terme), un peu lent au démarrage (le film démarre réellement une fois que la tribu entre en jeu) mais génialement cynique et hystérique, Roth tourne un film d'horreur à l'ancienne et s'approprie le genre avec un respect aussi révérencieux que jubilatoire pour mieux s'amuser une nouvelle fois à punir avec sadisme une bande d’adolescents occidentaux individualistes et égocentriques dans un jeu de massacre collectif explosant dans un final jusqu'au-boutiste et - fort heureusement - dénué de tout voyeurisme annihilant son impact aux yeux de spectateurs.


Le revival improbable d'un sous-genre tombé dans l'oubli au milieu des 80's doublé d'un vrai moment de cinéma terrorisant, extrême et hargneux, ne se laissant aller à aucune facilité (ou presque, les habituelles délires potaches du cinéaste gênent plus ici que dans Hostel) et dont la beauté de son cadre hostile et loin d'être paradisiaque aurait bien mérité une diffusion en salles pour dévoiler pleinement sa splendeur.


On se contentera donc de la VOD et, un peu plus tard, de la version DVD/Blu-Ray mais si Knock Knock nous laissait sur notre faim, The Green Inferno confirme qu'Eli Roth est bel et bien l'un des cinéastes du cinéma ricain les plus plaisant à suivre de ces dix dernières années; mais également un réalisateur


Bref, sans conteste le meilleur moment de flippe de la pauvre année 2015 (Ouija, Poltergeist, Unfriended les navets ne manquent pas), d'une très large tête devant le pourtant très efficace It Follows.


Jonathan Chevrier


http://fuckingcinephiles.blogspot.com/2015/10/critique-green-inferno.html

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le 5 oct. 2015

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