The Homesman par Hugo Harnois
L'Amérique nous fascine encore aujourd'hui. Pourquoi sinon le cinéma se pencherait encore sur le genre usé du western ? Parce que le passé ne nous a pas encore tout dit et que l'immensité de ces espaces nous effraie autant qu'elle nous séduit. Neuf ans après Trois enterrements, Tommy Lee Jones revient sur les terres arides des États-Unis pour nous dévoiler une nouvelle face cachée de ce pays.
Trois femmes jugées « folles » doivent être emmenées dans l'Iowa, tandis que Cuddy, une vieille fille au tempérament rude, s'est proposée de les accompagner sur ces terres dangereuses. L'acteur-réalisateur nous prend à contre-pied dès le début. Alors qu'on pourrait s'attendre à un divertissement énergique fait de rebondissements, les colts sont finalement remplacés par des mots, et les fusillades par des chants nocturne. The Homesman prend son temps pour construire ses personnages et leurs tourments. Filmés avec une infinie délicatesse, on entre en totale empathie avec eux.
Transcendante dans Boys don't cry et Million Dollar Baby, Hilary Swank revient au meilleur de sa forme en incarnant une femme seule et courageuse. Son désarroi de n'avoir personne se lit sur son visage et nous déchire de l'intérieur, car nous savons qu'elle n'était pas la seule dans cette triste condition. Face à elle, Tommy Lee Jones joue un personnage roublard et affectueux, qui arrivera, grâce à la lenteur et la construction de la narration, à grandir sous nos yeux parfois embués.
Toujours pris par surprise, le public appréciera la qualité d'un récit qui n'a pas mis l'humour de côté. S'approchant plus de l'histoire que de la tragédie, le destin de ces femmes exclues par une société aussi religieuse qu'intolérante enlève une pierre à l'édifice du mythe américain. Mais par un cadre toujours bien placé et nous offrant des plans sublimes, Jones le réalisateur vous prouvera qu'il y a du bon dans l'homme. Et si la musique de Beltrami n'atteint pas directement vos sens, Jones l'acteur saura vous montrer que l'être humain n'est pas une cause perdue.
Quand les westerns des années 1940 dressaient un culte à l'Amérique et à ses parfaits cow-boys, ce même genre cinématographique a su évoluer pour, au contraire, rétablir la vérité sur toutes ces injustices et ces faits humiliants. Messieurs Tarantino, Coen, Miller, Anderson, Jones, merci pour cette quête de vérité.
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