Il faut parfois forcer le trait pour pouvoir se faire entendre. Au festival de Cannes on entendait parait-il le bruit des sièges qui se rabattaient à cause des spectateurs qui partaient.On ne pouvait pas trouver meilleure publicité. Dans le cinéma où j'étais, seules deux spectatrices sont parties.


Effectivement le film est déconseillé aux personnes sensibles mais LVT n'a rien inventé et suit les pas des grands maîtres du cinéma italien des seventies que furent Lucio Fulci ou Dario Argento. On peut d'ailleurs voir THTJB comme un hommage à Lucio Fulci et à son Eventreur de New York. On regrettera beaucoup l'absence d'érotisme qui était au moins pour moitié dans l'intérêt des gialli mais on appréciera en connaisseur les séquences très réalistes d'énucléation (arrachage d'un œil) au rasoir et de mastectomie (ablation d'un sein) au couteau.


L'humour des dialogues est quasi-absent pour plus d'efficacité dans le réalisme (même si le personnel médical a trouvé en général le film très drôle). Et la violence n'est plus un but en soi comme autrefois. Plus de fétichisme de la main gantée de noir, de la lame de rasoir sanguinolente ou du couteau étincelant. De même que le sein arraché, une fois desséché, sert de porte-monnaie, la violence envers les femmes sert le propos de notre metteur en scène mélancolique, et pas seulement par pure provocation.


Le crime, nous dit LVT, n'est qu'une tentative de réponse à la domination croissante des femmes, tant dans le monde de l'entreprise que dans celui du cinéma, une domination rampante qui est masquée par la victimisation que les femmes mettent en avant avec habileté pour justifier leurs ambitions. « Les hommes sont forcément coupables, les femmes sont toujours des victimes. » nous dit SOS Misandrie. Le propos n'est pas de savoir si la réponse est appropriée ou pas mais de prouver sa singularité artistique.


« Sofistication » Jack, double maléfique de LVT, assure sans faiblir dans un nouveau domaine d'expertise : l'assassinat. De chapitre « incidents » en chapitre« incidents », il poursuit son œuvre d'artiste maudit avec la satisfaction du travail bien fait, alors que Verge représente la voix de la raison pour lever le doute. Le mauvais goût assumé est également une réponse à l'ostracisme dont LVT est victime de la part des troupes innombrables du politiquement et du cinématographiquement correct.


Il faut donc faire la part des choses: THTJB est une incursion dans un genre cinématographique considéré à tort comme mineur sous la forme d'un énorme canular, mais ce qui change le fonds, c' est le contrepoint apporté par des digressions culturelles. Classé comme par hasard dans la catégorie des dingues par les bien-pensants, Glenn Gould en train de jouer du Bach est un spectacle dont on ne se lasse pas, tout comme les dessins hallucinés de William Blake illustrant la Divine Comédie de Dante. Le tableau intitulé Dante et Virgile (Verge Hill?) aux Enfers de Delacroix, lui aussi assassiné par la critique à son époque (Delacroix, pas le tableau), est clairement l'inspiration de toute la fin du film sous-titrée Catabasis (κατάϐασις ) la descente aux enfers.


Les critiques officiels préfèrent ne rien dire là-dessus et ne parler que de la brève évocation par LVT des Stukas, et nous refaire le coup de son admiration supposée des nazis afin de mieux le dégommer. Mais c'est aussi pour ça que les critiques professionnels servent à quelque chose. Une seule critique négative et de mauvaise foi donne d'avantage l'envie de voir ce genre de films que ne l'auraient fait cent critiques positives. Je ne dois pas être le seul à penser ça. Malgré un thème pourtant peu grand public la salle était remplie de spectateurs.

Zolo31
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le 26 sept. 2018

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