Critiquer un film de Lars von Trier est devenu compliqué tant il est difficile de séparer la création de son créateur. Car s’il l’on s’arrête à son créateur, il y a fort à parier que seul le rejet va subsister, tant ses propos et ses actes (réels ou supposés) ne sont pas réjouissants (et là je suis politiquement correcte, mais rassurez-vous, ça ne va pas durer).
Cela devient encore plus compliqué avec son dernier film "The House that Jack Built" car chaque pierre de l’édifice est empreint du réalisateur. Véritable plongée dans les profondeurs d’une abyme Nietzschéenne, on peut être certain que Lars a passé beaucoup de temps à contempler les profondeurs… Pour nous livrer un film des plus étonnant.
Le film est évidemment violent mais il serait réducteur de s’en tenir à cet aspect tant l’ensemble fourmille de quantités d’idées dont une large partie est excellente.
L’étude de l’obsession meurtrière est aussi bien ficelée et profonde qu’une victime dans attachée au fond d’un puit !
La prestation de Matt Dillon est absolument impeccable de froideur, d’opiniâtreté et de démence.
Tour à tour amusant, répugnant, bête, ou inquiétant, que dire de sa pâleur, de son stoïcisme et de ses yeux noirs qui sont pourtant toujours expressifs et toujours dans la bonne tonalité !
Du grand art sombre et non dénué d’un humour noir fort bienvenu pour supporter la construction de l’édifice, brique par brique, au ciment rouge sang et aux outils variés.
Lars nous live comme une forme de justification de la part très sombre de ses créations, qu’il disperse tout au long du film telle une mise en abyme de « celui qui doit combattre des monstres doit prendre garde de ne pas devenir monstre lui-même ». Même si le passage sur les camps de concentrations sont malvenus de prime abord et rappellent ses récents dérapages oraux… En bonus de provocation très actuelle, la position des femmes dans le film n’est pas du tout « me too » approved !
Etrangement (ou pas), le personnage de « Verge » vient mettre de l’ordre. Conflit Freudien ou pas, Verge semble redresser le tout dans la bonne direction…
Le final est de toute beauté, Dantesque en tout point, il faut voir la maison que Jack a construit pour le croire, mais aussi et surtout, l'exploration de son "sous-bassement".
Une pépite macabre qui demandera beaucoup à son spectateur mais s’il parvient à éviter les pièges (de plus en plus grossiers) de la provocation, alors la récompense sera livrée sans équivoque.
Du moins je l’espère.

ATHMOS
7
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le 5 nov. 2018

Critique lue 277 fois

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ATHMOS

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