Tiré d'une histoire vraie, en l'occurrence celle d'une famille espagnole en vacances dans un hôtel de luxe thaïlandais, dont les membres, séparés logiquement après le passage du tsunami, se sont miraculeusement retrouvés (d'où le titre) quelques dizaines d'heures après, pour faire l'heureux constat d'une famille entièrement recomposée, "The Impossible" est résolument bancal, souffre d'un sujet traité avec cette lourdeur et cette emphase propres à Hollywood, et, cela va de soi, ne peut convaincre entièrement. 

Mais tout n'est pas à jeter. La première partie du film est plutôt réussie en fait, Juan Antonio Bayona, à mon sens, fait bien le boulot : à travers une réalisation assez propre, il nous présente une famille charismatique (j'ai toujours craqué pour Watts et McGregor n'est pas mal non plus), sans soucis, apparemment heureuse, nous montre quelques scènes agréables de la vie quotidienne bien sucrées (le matin de Noël, filmé caméra à l'épaule) qui ne sont là que pour nous convaincre (à juste titre) que les personnes qui composent une famille harmonieuse sont faites pour être et rester ensemble. Le réalisateur agrémente la petite vie de plage des héros (jeux, soleil, bronzage et restaurant) de quelques contre-champs intelligents, mettant la mer en position de prédateur, comme si celle-ci était le grand requin blanc, ce qui laisse présager le pire à venir et ne nous laisse pas le temps d'oublier qu'une catastrophe naturelle va avoir lieu.


A partir de là, on pourrait presque s'ennuyer, mais Bayona ne lambine pas, au contraire il se dépêche et rompt douloureusement avec cette petite vie de paradis (à laquelle on finit par s'habituer au point de regarder les prix des tickets d'avion sur internet), en nous amenant ce raz de marée funeste, sans se complaire dans les dégâts d'infrastructures qui vont avec ce genre de catastrophe, puis c'est le black out. Ecran noir de quelques secondes, et Naomi Watts refait surface en buvant la tasse, en essayant tant bien que mal de rester accrocher à son palmier de fortune.


Une fois passée la vague géante, on change de film et on passe au registre plus sombre du survival. Et là ça devient long, très long. Une femme et son fils avancent péniblement dans des eaux troubles, faites de gens morts, de rats crevés et de bois flottant. Le spectateur sait que tous les membres de la famille vont se retrouver, puisque l'intrigue se trouve dans le titre, donc la tâche ingrate du réalisateur est de repousser ce moment jusqu'à la fin. Alors... peut-être aussi par ennui, Bayona cède à des codes du cinéma d'horreur (en rappelant au passage d'où il vient), codes qui n'ont rien à faire dans ce film, et qui alourdissent certaines scènes déjà trop encombrées d'un pathos larmoyant (des personnes cherchant leurs enfants dans un hôpital) : une femme s'étouffe avec sa langue, la mère (Naomi Watts), s'étrangle à son tour et fait ressortir de sa gorge des algues et autres déchets, le tout en franchissant les limites du ridicule, ce qui plombe la note. Bayona n'a que faire de ses personnages, et même si ceux-ci sont au bout du rouleau, cumulant blessures, fatigue et souffrance psychologique, il se complaît, avec une rigueur qui force le respect, à les faire souffrir jusqu'au bout (et son film par la même occasion), par des gros plans de blessures bien saignants et des crises de nerfs post-traumatiques larmoyants, le tout accompagné d'une musique un peu trop salée, chargée de pathos, pour accentuer le côté mélo d'un film dans l'ensemble très moyen.


Quand les membres de la famille se retrouvent enfin, il est temps que ça se termine.

Errol 'Gardner

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