J'avoue, l'image de Luc Besson producteur a quelque peu influé sur celle que j'avais du Luc Besson réalisateur. Il faut dire qu'après avoir atteint le nombre de films qu'il souhaitait diriger, alors qu'il était sur la pente descendante, puis s'être orienté vers la production de long-métrages populaires mais décérébrés, sa réputation ne s'est pas amélioré avec son retour plus ou moins clandestin. Les suites de Arthur et les Minimoys - je me suis arrêté au premier - n'ont pas bonne presse, de même que Malavita. Et The Lady ? Là, c'est encore plus simple : personne n'en parle.

En même temps, c'est compréhensible : il fût tourné dans le plus grand secret - Aung San Suu Kyi était encore assignée à résidence à l'époque - et sa sortie deux semaines après sa libération a un peu rendu son propos caduc. D'ailleurs, quand nous savons les techniques de ninja que l'équipe a dû employer pour tourner et donner l'impression que tout se passe à Rangoon - par exemple, en filmant la ville sous couvert de documentaire puis en incrustant les acteurs par-dessus, pour un résultat bluffant de réalisme - ils ont dû trouver ça vexant. Enfin, ils auraient trouvé ça vexant, si cela ne signifiait pas qu'elle était désormais libre de ses mouvements.

The Lady est un film très académique, dans son scénario, sa façon de filmer, etc... Ce qui étonnerait presque de la part de Luc Besson, qui s'était jusque-là focalisé sur des styles radicalement différents. C'est le genre de production qui ramasse des Academy Awards, sauf que celui-ci fût copieusement - et injustement - boudé. Le résultat est à la fois passionnant, puisqu'il nous invite à retracer l'histoire de la Birmanie depuis l'Indépendance, et touchant, avec une image sublime et des cadres très travaillés. Et l'équipe nous offre vraiment une reconstitution magnifique, ainsi que des tournages dans des zones reculées de la Thailande en compagnie de peuplades locales, comme les légendaires Femmes-Girafes. Cela fait un peu tire-larmes par moment, mais cela fonctionne.

Le seul reproche que je ferai concerne le scénario : Aung San Suu Kyi passe pour une mère au foyer qui se serait découvert du jour au lendemain un destin hors-norme - sauf prétexte qu'elle est la fille de son père - car le film joue sur cette dualité entre l'épouse (qui délaisse son mari) et la militante politique. Alors que non, elle n'a pas attendu son retour en Birmanie pour être prise de conscience sur la situation là-bas ; il s'agit d'une femme extrêmement instruite, sortie d'Oxford avec un doctorat. Donc pour la "simple femme au foyer"...

Mais à part ça, il s'agit vraiment d'une œuvre magnifique et touchante, et même d'un des meilleurs Luc Besson.
Ninesisters
8
Écrit par

Créée

le 9 août 2014

Critique lue 326 fois

1 j'aime

1 commentaire

Ninesisters

Écrit par

Critique lue 326 fois

1
1

D'autres avis sur The Lady

The Lady
Before-Sunrise
5

Orchidée sans parfum

Pour son dernier film, Luc Besson a choisi une des histoires les plus touchantes de ces dernières décennies (bien que peu connue chez nous) mais pas des plus passionnantes, n'en déplaise aux fervents...

le 19 déc. 2011

15 j'aime

1

The Lady
Cygurd
3

"John Rambo" se montrait plus instructif

Et de quatre ! « The Lady » est le quatrième film que Luc Besson réalise après avoir annoncé publiquement, en 2006, qu'il arrêtait le cinéma pour se consacrer à l'action citoyenne. Si les trois «...

le 14 nov. 2011

11 j'aime

3

The Lady
SeigneurAo
6

Emmenez votre baladeur si possible

Europa Corp presents... Bon bah, sans avoir le même niveau de sévérité, je partage pas mal des critiques faites par mon estimée co-spectatrice @Before-Sunrise. C'est sans aucun doute le moins mauvais...

le 18 déc. 2011

10 j'aime

Du même critique

Evangelion 3.0 : You Can (Not) Redo
Ninesisters
10

La prochaine fois, j'enlève le bas !

Si je suis légèrement moins emballé que pour les deux premiers opus, je trouve quand même qu’il s’agit pour l’instant du meilleur de la saga. Paradoxe ? Incohérence ? Disons que mon impression est à...

le 30 avr. 2013

44 j'aime

Hellsing Ultimate
Ninesisters
9

Critique de Hellsing Ultimate par Ninesisters

Kôta Hirano est un mangaka plus connu pour la qualité de ses boucheries, enfin de ses manga, que pour son rythme de publication. Ainsi, après le succès d’un premier anime qui ne reprenait finalement...

le 13 mars 2013

38 j'aime

1