Ah… Les films d’infection… Force est de constater que quelle que soit l’approche du réalisateur, les avis et les attentes de chacun sont toujours aussi subjectifs qu’intenses. Ainsi un sujet d’apparence aussi dérisoire que la vitesse de déplacement des zombies / infectés / morts-vivants, prend vite des tournures de débats passionné, les approches d’un Romero ou d’un Boyle ou d’un Snyder ayant chacune leurs fervents défenseurs, pour le plaisir de la déconne ou pour la défense d’un style de film aux doux accents de miroirs grinçants de notre Société. Depuis quelques années, on trouve également un angle différent dans l’approche de l’infection, faisant directement le lien entre une nature qui se rebelle face à une nuisance humaine et une maladie plus simplement virale. Désormais parasitaire et tout autant dévastatrice, dans l’esprit de « The Bay » de Barry Levinson, les pandémies deviennent terrifiantes car non seulement elles tuent mais elles déshumanisent aussi la victime.



Donc le pitch : On découvre un groupe de survivant évoluant dans une structure militaire et étudiant un groupe de gamins infectés mais pas trop, aux relents de patients zéro et de stéréotypes qui tâchent. Une jeune et jolie Maîtresse de classe tente d’apporter, seule contre tous, un peu d’amour et d’eau fraîche à ses gamins. Mais il y a les méchants militaires, les méchants docteurs et les méchants infectés.
Voilà, parti comme ça, je reconnais que ça n’est pas spécialement vendeur. Mais j’avais bien aimé le trailer, et les films d’infectés sont souvent de bons divertissements, à défaut d’être génialement poilants (Shaun of The Dead) ou bien flippants. (euh…) Je suis donc allé à cette séance en bon public, essentiellement dans l’espoir d’y trouver un bon film popcorn un peu hyp et confidentiel. Je voulais implicitement le punch et la nervosité d’un Snyder, réalisateur que j’apprécie particulièrement pour son Watchmen ou son Dawn of the Dead. J’attendais éventuellement une certaine générosité dans la mise en scène, avec des scènes intenses et une histoire développée à minima pouvoir bien m’immerger dans le film. Donc en bref, je voulais du fun, de la hargne et de la tripaille.
De ce point de vue, je ne suis donc vraiment pas déçu. Le film est ponctué de petites fulgurances d’humour British, frais et inattendu, et dès le départ on sent aussi une tension savamment entretenue ; vous amenant évidemment à constater la fragilité de l’écosystème de ce petit groupe de survivant pour mieux le faire exploser dans la foulée. Dès lors, on passe d’un huis-clos gentillet et assez convenu à un survival solide et nerveux.
Alors oui, la trame est assez convenue au début du film, mais elle évolue dans le bon sens pour donner un relief appréciable, et le rythme donné par Colm McCarthy étant franchement dynamique, le spectateur lambda y trouvera son compte sans trop tortiller sur son siège.
Par ailleurs les interprétations solides de Glenn Close, (Glenn Close, quoi) Gemma Arterton et surtout de la frissonnante petite Sennia Nanua contribuent à solidifier ce socle en accentuant le jeu sur les nuances, parallèlement aux effets spéciaux discrets mais réussis.
Le résultat est donc largement moins consensuel qu’il n’y parait. Pour détailler un peu le fond, l’histoire va évoluer vers plusieurs niveaux de lectures, les angles glissants doucement de la haine de ces gamins hybrides vers un peu de compréhension, voire d’attachement. Un contraste d’autant plus frappant que cette petite fille est Noire, et terriblement adorable. On se surprend donc à faire de l’empathie pour les seconds rôles, (Kieran) et j’ai souri en constatant l’aspect légèrement subversif pris par Colm Mc Carthy pour se moquer en douceur des bons gros clichés caractéristiques du cinéma Hollywoodien. (Médecins et Soldats notamment, pour leur côté froids et inhumains, mais aussi des enfants en tant que faire-valoir)

Melanie, au centre de l’attention, devient rapidement un personnage fort et ambigüe dans ses relations avec la race humaine sur le déclin ; au point de devenir le chantre d’une nouvelle évolution et le chef d’une bande de gamins tueurs surpuissants. Un point de vue que je n’avais pas retrouvé depuis les révoltés de l’an 2000.
Mais ce qui m’a fait le plus plaisir, ce sont surtout les différents degrés de lecture, avec notamment la réflexion globale sur la tolérance, ou la note finale sur l’interrogation que l’on devrait avoir sur la normalité, notre point de vue étant souvent ethnocentrique ou relativement partial. Comprendre l’autre par ses motivations et ses besoins plutôt qu’agir en colonisateur.
Les influences sont évidentes pour « The Last of Us », dont on sent l’influence jusque dans le dénouement de l’histoire, et pour « Je suis une Légende » dans la recherche désespérée du remède, mais The Girl with all the Gift sait largement prendre ses distances avec les ainés pour proposer un final dystopique original.



Je vous conseille donc largement ce très bon film d’infection, aux accents modernes et efficaces, autant que pour des acteurs sortant largement de leur zone de confort. Vraiment une belle trouvaille.


amjj88
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le 4 févr. 2017

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