Les zombies… tout comme les vampires et autres monstres du fantastique horrifique, il est désormais impossible de savoir ce que ces créatures peuvent bien nous réserver de neuf à l’horizon. Et pour cause, avec les innombrables histoires déjà eu à leur sujet, en passant par tous les genres (allant de l’horreur pure à romance, en passant par l’action et la comédie) et supports possibles (films, séries TV, livres, BD, jeux vidéo…), plus rien ne peut désormais nous surprendre. On se demande même pourquoi certaines personnes daignent persister à les exploiter, tant il n’y a plus rien à dire sur le papier. Mais apparemment, cela n’empêche pas certains de s’y coller, au risque de faire dans la redite bas de gamme. Tout comme le réalisateur qui nous intéresse ici, à savoir le Britannique Colm McCarthy. Un metteur en scène s’étant notamment illustré dans les séries (Les Tudors, Doctor Who, Sherlock, Peaky Blinders…) qui décide de s’attaquer aux zombies, et ce malgré un héritage populaire pour le moins consistant (des films de George A. Romero à la série The Walking Dead), avec cette adaptation d’un roman de M.R. Carey (qui officie sur le film au poste de scénariste). Alors, peine perdue que ce long-métrage intitulé The Last Girl ? Énième trame de morts-vivants qui n’a pas forcément de raisons d’exister ? Eh bien qu’à cela ne tienne, McCarthy parvient à livrer une petite pépite du cinéma anglo-saxon qui aurait bien méritée un peu plus de notre attention lors de sa sortie en salles.


Car même si The Last Girl reprend les ingrédients inhérents à une histoire de zombies (un virus, un monde post-apocalyptique, des survivants tentant de rester en vie en plein milieu de hordes d’infectés…), le long-métrage surprend déjà par son postulat de départ. À savoir prendre son temps (soit une bonne demi-heure) pour présenter ses personnages et surtout son univers dystopique. Une sorte de futur pas si éloigné dans lequel des expériences sont menées sur des enfants qui, malgré le port du virus et de quelques réactions zombiesques qui en découlent (perdre le contrôle face à de la viande fraîche, par exemple), parviennent à conserver toute leur humanité. Notamment une fillette, qui se prend d’affectation pour son institutrice tout en essayant de découvrir ce qu’on fait à ses semblables. Le temps donc au réalisateur et à son scénariste de développer tout ce qu’il faut afin de nous accrocher à leurs protagonistes et leur cadre comme il se doit. De nous permettre de comprendre les diverses relations les unissant (qu’elles soient bonnes ou mauvaises) et de nous inciter à en savoir d’avantage. À vouloir que les choses évoluent entre eux. Et c’est exactement dans cette direction que part le film ! À défaut de renouveler le genre zombies, The Last Girl ne prétend cependant jamais vouloir le faire. Au contraire, il préfère l’exploiter, tel un prétexte, afin de faire avancer son intrigue, ses personnages. Nous livrant pour le coup une histoire très touchante, des protagonistes attachants (et ce malgré les parts d’ombre de certains) et – surtout – une véritable humanité qui fait chaud au cœur (que nous devons également à la prestation sans faille des comédiens, notamment la jeune Sennia Nanua).


Il est juste dommage que le final de The Last Girl vienne tout gâcher. Alors que le récit avance, on sent que le dénouement peine à pointer le bout de son nez. Que l’évolution des personnages touche à son terme mais qu’aucune fin n’a été trouvée pour baisser le rideau, l’ensemble s’étirant pour le coup de manière excessive. Tourne même en rond, en balançant à la figure du spectateur des sous-intrigues sorties de nulle part (la communauté d’enfants zombies revenus à l’état sauvage) ou bien inutile (la plante géante, juste histoire de donner une origine au virus), qui meublent plus qu’autre chose. Et là, d’un seul coup, la jeune héroïne qui ne présentait aucun signe d’hostilité décide de causer en un claquement de doigts l’annihilation de l’espèce humaine. Prend la tête du groupe d’enfants sauvages cité plus haut tout en gardant en vie son institutrice, cloîtrée dans une sorte de bunker scientifique afin qu’elle leur fasse cours à l’abri des pores envenimant l’air… FIN… Dit comme cela, le final n’a clairement aucun sens. Pourtant, à bien y regarder, on y voit l’aboutissement de la pensée de la jeune héroïne qui, durant son aventure, va voir les maux qui rongent l’humanité et vouloir remédier à cela en la faisant évoluer (en libérant le virus sous forme de pores afin que tous deviennent comme elle, et de redémarrer à zéro pour un monde meilleur). Quelque part, ce n’est pas tiré par les cheveux. Là où cette partie du film ne passe pas, c’est surtout par son traitement expéditif et abrupt. Le fait que la fillette ait cette idée d’un coup, sans crier gare, et que tout s’enchaîne à une vitesse folle. Cela termine The Last Girl de manière assez ridicule, ce qui n’est pas tout raccord avec le reste du film. Et c’est fort dommage…


D’autant plus que d’un point de technique, le long-métrage bluffe l’assistance à tous les étages ! Car, arriver à un tel résultat final avec un budget des plus restreints et aucune majeure hollywoodienne pour tout financer, cela relève presque de l’exploit ! Et pour cause, pendant son visionnage de 111 minutes, le film nous gratifie d’un visuel très soigné, rappelant celui de la saga 28… plus tard (l’aspect documentaire en moins). D’une caméra sachant se poser quand il faut pour toucher le spectateur ou encore se montrer suffisamment énergique lors des séquences d’action pour nous prendre aux tripes. Comme en témoigne l’attaque des zombies à la base militaire (l’élément perturbateur de l’histoire) : un plan-séquence d’une très grande maîtrise, mis en scène avec talent et savoir-faire ! Mais ce qui va vous marquer avec The Last Girl, c’est irrémédiablement l’ambiance qui suinte à travers chaque minute de film. Entre justement le visuel (les effets spéciaux sont d’ailleurs très bons) et la musique aussi étrange que mélancolique de Cristobal Tapia de Veer, l’atmosphère sait être pesante et lourde sans jamais en faire trop. Glaciale et violente sans perdre un côté bucolique. Austère à souhait sans toutefois faire défaut à cet espoir dont fait preuve le script. Bref, vous l’aurez compris, elle ne parait jamais artificielle ni excessive dans ce qu’elle entreprend. L’ambiance est prenante à souhait, offrant à The Last Girl toute cette classe, cette prestance que peu de films actuels ont sur le sujet. Et rien que pour cela, il vous est vivement conseillé de vous lancer dans le visionnage de ce long-métrage sans plus tarder !


Comme quoi, les films de zombies peuvent encore en avoir sous la dent ! Même si The Last Girl ne réinvente rien du tout, il trouve tout son charme dans le traitement de ses personnages (et donc de son histoire) et son travail artistique. Preuve qu'un bon réalisateur, sachant mettre en avant les atouts de son projet, peut permettre à certaines thématiques éculées de la culture populaire de perdurer encore, sans lasser l'assistance. Mais il faut bien avouer que les oeuvres de cet acabit restent bien rares, même si le cinéma international parvient à marquer le coche de son côté (le dernier exemple le plus marquant étant le film coréen Dernier train pour Busan, sorti en 2016).

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